11 Novembre : les soldats juifs morts pour la France

11 Novembre : les soldats juifs morts pour la France

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11 Novembre: Les « poilus » juifs dans la Grande Guerre

Le 11 novembre 1918 à 11 heures, les armes qui avaient plongé le monde dans l’horreur de la Grande Guerre pendant plus de 52 mois furent finalement déposées.

L’humanité pouvait respirer à nouveau. L’armistice marquait la fin de la guerre la plus destructrice jusqu’à ce moment là.

Le bilan des pertes humaines fut terrifiant : plus de neuf millions de soldats périrent sur le champ de bataille à cause d’opérations très meurtrières et l’utilisations d’armes modernes très destructrices.

Beaucoup d’autres ont été blessés et marqués à vie. Des millions de civils ont également péri. Quel rôle ont tenu les poilus juifs dans la Grande Guerre?

Faits historiques

En 1914, la France compte 185 000 Juifs (soit 0.5% de la population totale de 39 millions d’habitants).

Se sentant totalement intégrés à la République, et soucieux de récupérer les provinces perdues en 1870 (40 000 Juifs vivaient en Alsace et en Moselle à ce moment là), les Juifs vont massivement participer à l’effort de guerre.

Partisans de l’Union sacrée, 16 000 Juifs français partiront sur le front (auxquels il faut ajouter 14 000 Juifs venus d’Algérie sur un total de 65 000, et 8 000 Juifs étrangers vivant en France sur un total de 30 000).

En Algérie, sur 294 000 hommes, 14 000 israélites sont appelés sous les drapeaux puis incorporés dans les Régiments de marche d’Afrique et la Division marocaine. Les déserteurs sont rares, à savoir moins de 2 % (Bensimon-Donath, 1976, 339-342). De condition très modeste, ce sont souvent des pères de famille. La guerre accélère dans bien des cas la paupérisation de cette communauté composée de petits artisans et commerçants. Hommes de troupe, les combattants participent aux grandes batailles de la Marne, de Verdun et des Dardanelles. Concentrés dans des régiments d’élite comme les troupes de zouaves et de tirailleurs envoyés sur les premières lignes du front, ils subissent de nombreuses pertes : environ 15 % des combattants juifs d’Algérie meurent au cours du conflit (Bensimon-Donath, 1976).

Au total, ce sont environ 38 000 Juifs qui s’engageront dans l’armée française, dont 12 000 engagés volontaires.

Les actes héroïques ne manquent pas. Les Juifs paient « l’impôt du sang ».

6 800 Juifs de France meurent sur le front, soit 17% du nombre de juifs mobilisés (une proportion similaire à la moyenne nationale), dont 5 000 Juifs français. 6 rabbins français sont tués, soit 13% du corps rabbinique.

 Juifs célèbres durant la Grande Guerre

 
Le capitaine Alfred Dreyfus, porté volontaire à plus de 45 ans, son fils, et les 3 fils de son frère ainé, Jacques Dreyfus : 2 d’entre eux seront tués, et le troisième, l’un des aviateurs les plus décorés de la grande guerre, mourra à Auschwitz.

Marc Bloch, fusillé pour faits de résistance en 1944. René Cassin, gravement blessé sur le front.

Et bien sûr, Jacob Kaplan, le futur Grand rabbin de France, symbole à lui-seul de cet engagement des Juifs Français, et dont le Grand rabbin de France Haïm Korsia a consacré une très belle et très complète biographie en 2006.

Jacob Kaplan à 19 ans en 1914 et il est élève du Séminaire. Il fut combattant alors qu’il s’engageait sur la voie du rabbinat. Mobilisé le 20 décembre 1914, il déclara « Je ne veux pas être aumônier, mais combattre avec mes camarades ». Il fera toute la guerre dans le 411ème régiment d’infanterie.

Ses états de service durant les quatre ans de guerre seront remarquables. Il connaîtra les tranchées, les combats, les hivers froids, les bombardements, la bataille de Verdun pendant 16 mois.

Il sera blessé par un éclat d’obus dans les tranchées de Champagne en 1916 et retournera au combat juste après.

Cela lui vaudra d’être décoré de la Croix de guerre et de figurer dans le « Livre des défenseurs de Verdun ». Il retournera au Séminaire juste après la guerre en 1919.

Et parmi ces rabbins engagés sur le front, comment ne pas évoquer la mort au champ de bataille du rabbin Abraham Bloch le 29 août 1914 en tendant un crucifix à un soldat chrétien agonisant, devenant l’image mythique du patriotisme juif dans la France républicaine.

En mai 1916, le Président de la République, Raymond Poincaré, participera à l’office célébré dans la Grande synagogue de la Victoire à Paris, à la mémoire des combattants juifs morts au champ d’honneur.

Il faut aussi souligner que les combattants juifs seront soutenus à l’arrière par un travail sans relâche de la communauté, en particulier les deux seules institutions juives de l’époque, le Consistoire Israélite et l’Alliance Israélite Universelle.

En août 1914, le Consistoire organise l’aumônerie militaire. En 1915, il publie la « Tefila du soldat » qui sera distribuée sur le front.

Les sermons rabbiniques associent l’idéal religieux et l’idéal républicain, l’histoire du peuple juif et l’histoire de la nation.

Et notons également que jamais, dans l’histoire du judaïsme français, la femme n’aura été autant mise en valeur, avec un rôle clé d’organisation et de motivation.

Mais le grand paradoxe de cet engagement sans précédent pour la nation, c’est qu’il n’effacera pas, loin s’en faut, l’antisémitisme présent de longue date.

En France, malgré la réhabilitation d’Alfred Dreyfus en 1906, l’antisémitisme n’a pas disparu au sein de l’armée, ni dans la société. Il se renforce même à nouveau à partir de 1917.

En Allemagne, l’antisémitisme ne cessera d’augmenter tout au long de la guerre, sur fond de détérioration de la situation économique et d’une victoire qui ne vient pas. On cherche le coupable. Et une fois, de plus on le trouve dans le Juif.

Une stèle honore ce geste extrême de fraternité, à 6 kilomètres de Saint-Dié dans les Vosges: «Ici, le 29 août 1914, le Grand rabbin Abraham Bloch, aumônier aux armées françaises, a été tué, après avoir porté la croix du Christ, à un soldat catholique mourant. Inauguré le 2 septembre 1934 par M. G. Rivollet, ministre des pensions.»

Adaptation par Jforum

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