Coalition: nouvelle crise politique, les scénarios possibles?

Coalition: nouvelle crise politique, les scénarios possibles?

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La coalition du Premier ministre israélien Naftali Bennett ne compte plus désormais que 60 sièges au Parlement. Un nombre insuffisant pour conserver sa majorité, le Parlement israélien comptant 120 députés. En cause, le départ surprise de Idit Silman, une députée de la formation de droite radicale Yamina du Premier ministre. L’événement a été aussitôt salué par l’opposition.

Comment en est-on arrivé là ?

Le principal responsable de cette situation est sans aucun doute Naftali Bennett. A force de respirer l’air enivrant des « sommets », entre médiations avec Poutine, et conversations avec Biden ou Al-Sissi, le Premier ministre a oublié de ménager les députés de son propre parti Yemina. Depuis la formation du gouvernement, ces députés qui lui sont restés loyaux se plaignent d’être pointés du doigt par leur électorat qui ne leur pardonne pas d’avoir rejoint une coalition avec la gauche et les islamistes de Ra’am.

Ces dernières semaines, préoccupé entre autres par la vague terroriste, Bennett n’a pas été à l’écoute de la détresse d’Idit Silman. Il n’a pas mesuré à sa juste valeur l’ultimatum que celle-ci lui a lancé dimanche autour de la décision du ministre de la Santé et leader du Meretz (extrême gauche) Nitzan Horowitz, d’autoriser l’entrée dans les hôpitaux de produits alimentaires interdits (‘Hametz) durant la fête de Pessa’h. A force de vouloir ménager la chèvre et le chou au sein de la coalition, le chef du gouvernement a suscité colère et frustration chez une Idit Silman qui a même dû essuyer des critiques de la part de… son mari, opposé lui aussi à ce gouvernement.

Mais derrière la responsabilité incontournable de Bennett, se trouve justement la composition hétéroclite de la coalition. On l’a dit et répété: avec une majorité étriquée de 61 députés, cette coalition a toujours été fragile. L’une des erreurs commises a été de croire qu’après le vote du budget de l’Etat, l’obstacle principal était franchi, et que la coalition se stabiliserait.

Cependant, c’est exactement le contraire qui s’est produit: après le vote du budget, lorsque le souvenir de « Bibi-Premier ministre » a commencé à s’estomper, chacune des formations de cette coalition a tenté de satisfaire son électorat, en avançant sa propre idéologie et ses projets spécifiques. C’est ce qu’a fait Horowitz en permettant l’entrée du ‘hametz dans les hôpitaux, sans se préoccuper du mécontentement que ce geste provoquerait dans l’électorat sioniste-religieux d’où Silman est issue.
Au cours des derniers mois, on a recensé plusieurs « bras de fer » idéologiques et « religieux » entre la gauche et la droite dans la coalition. L’affaire du ‘hametz a été pour Idit Silman la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Et ceux qui ne l’ont pas vu venir sont au moins aussi responsables qu’elle-même. D’autant plus que la députée a négocié son transfuge en se garantissant une place de choix dans la prochaine liste électorale du Likoud ainsi que le poste de ministre de la Santé si Netanyahou était amené à former le prochain gouvernement.
L’opposition a, certes, remporté une bataille, mais elle n’est pas encore au bout de ses peines. Avec 60 députés, dont les six de la Liste arabe, elle a absolument besoin d’un 61e candidat pour faire pencher définitivement la balance en sa faveur. Prenant conscience de la gravité de la crise, Bennett a tenté de l’enrayer, mercredi, en apaisant ses troupes. Mais deux maillons faibles subsistent encore au sein de Yamina: les députés Nir Orbach et Abir Karé. Le premier, qui envisage de se retirer de la vie politique, pourrait être remplacé par Shirly Pinto, l’élue sourde-muette de Yemina (qui siège actuellement au Parlement en vertu de la loi dit norvégienne). Le second a toujours été critique envers le leadership de Bennett et pourrait céder aux tentatives de séduction du Likoud. Une défection dans le parti Nouvel espoir de Gideon Saar est également possible, mais peu probable.

 

Avec la démission du député Idit Silman de la coalition, il y a maintenant quatre scénarios possibles.

Effet domino

1. Un autre membre de la Knesset quitterait la coalition et aide l’opposition – dirigée par le chef du Likoud Benjamin Netanyahu – à adopter un projet de loi de dissolution de la Knesset et entraînant de nouvelles élections générales.

Dans ce cas, immédiatement après la dissolution de la Knesset, le ministre des Affaires étrangères Yair Lapid deviendrait Premier ministre jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement.

Pour Silman, la situation idéale serait qu’un autre membre de Yemina se sépare du parti afin qu’elle puisse ensuite – avec l’ancien député rebelle de Yamina Amichai Chikli – former une nouvelle faction qui pourrait fusionner avec un parti existant et se présenter dans une nouvelle élection.

Gantz quitte le navire

2. Avant la dissolution de la Knesset, le président de Ka’hom Lavan Benny Gantz décide de rejoindre l’opposition et de devenir Premier ministre d’Israël. Ce scénario est probable pour plusieurs raisons. La première est que Gantz, qui est actuellement ministre de la Défense, est mécontent du gouvernement actuel depuis sa création. Il était particulièrement gêné par le fait que Bennett – avec six sièges et maintenant cinq – soit devenu Premier ministre alors que lui – Gantz – avait huit sièges.

 Le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, s'adresse à une mairie à Munich, en Allemagne, le 20 février 2022. (Crédit : Conférence de Munich sur la sécurité)Le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, s’adresse à une mairie à Munich, en Allemagne, le 20 février 2022. (Crédit : Conférence de Munich sur la sécurité)

De plus, Gantz pourrait préférer cette option à la dissolution de la Knesset, qui verrait Lapid devenir Premier ministre. Rappelons que les deux hommes politiques se sont séparés – le parti Yesh Atid de Lapid ayant quitté l’alliance bleu blanc – lorsque Gantz a décidé en 2020 de rejoindre le dernier gouvernement de Netanyahu, qui s’est finalement effondré.

Bien que Gantz ait déclaré qu’il avait retenu la leçon en s’associant à Netanyahu et qu’il ne referait pas la même erreur, il pourrait affirmer qu’en rejoignant Netanyahu, non seulement il serait Premier ministre, mais qu’il empêcherait également une autre élection et d’autres élections politiques.

Ou bien l’analyste politique de la chaine 14, Yaakov Berdugo, révèle ce soir qu’il y aurait des négociations entre les hommes de Benny Gantz et les représentants des partis orthodoxes.

L’idée derrière ces discussions serait de déposer une motion de censure constructive qui permettrait de remplacer le gouvernement actuel par un gouvernement alternatif avec à sa tête Benny Gantz. Selon Berdugo, l’intérêt des parties serait d’empêcher Yaïr Lapid d’accéder au siège de Premier ministre.

Pour convaincre les orthodoxes, les hommes de Gantz insiste sur le fait que cette option permettrait de faire sortir Liberman du ministère des Finances.

Pour le moment, toujours selon Berdugo, les négocations qui ont duré depuis ce matin se sont concentrées sur les partis ‘harédim mais aucun membre du Likoud n’a encore été approché. L’analyste politique estime que le parti de Binyamin Netanyahou n’acceptera pas l’accord si une date pour des élections n’était pas fixée en parallèle.

En d’autres termes, le bloc de droite soutiendrait Benny Gantz comme Premier ministre alternatif avec en échange la garantie que des élections seraient programmées à une date définie. Berdugo insiste: sans date pour des élections, le Likoud ne marchera pas dans la combine.

Un retour pour Netanyahu

3. Netanyahu parvient d’une manière ou d’une autre à former un gouvernement à la Knesset actuelle ou se retire en tant que président du Likoud – hautement improbable – et permet à un autre député du Likoud de le faire. Il est plus probable qu’il préférerait couronner Gantz plutôt que quelqu’un de son propre parti, ce qu’il aurait pu faire avant que Bennett ne devienne Premier ministre en juin dernier.

En réponse au message de la députée Silman il a répondu « Idit, tu viens de prouver que ce qui guide ton action est l’identité juive d’Israël, la terre d’Israël, et je t’accueille à nouveau dans le camp national », a déclaré dans une vidéo Benjamin Netanyahu qui dirige un bloc de l’opposition droite réunissant son parti, le Likoud, des formations juives orthodoxes et de la droite nationale.

L’ancien Premier ministre, qui cherche à revenir au pouvoir en dépit de son procès pour corruption, a appelé les autres élus de droite dans le gouvernement de coalition à rejoindre son camp. « Vous serez accueillis à bras ouverts et avec tous les honneurs », a-t-il déclaré.

Chef de l'opposition et chef du parti Likud Benjamin Netanyahu (crédit : MARC ISRAEL SELLEM/THE JERUSALEM POST)Chef de l’opposition et chef du parti Likud Benjamin Netanyahu (crédit : MARC ISRAEL SELLEM/THE JERUSALEM POST)

Boiteux jusqu’à la fin du mandat

4. Le gouvernement – ​​désormais un canard boiteux et incapable d’adopter des lois – parvient à survivre jusqu’au début de 2023, lorsqu’il doit adopter un nouveau budget. Bien qu’il ne puisse adopter aucune loi, cela pourrait être le meilleur scénario en ce moment pour Bennett.

Par Jforum avec JÉRUSALEMPOST, Les Echos, LPH, et i24news (Daniel Haïk)
Marc Israel Sellem/POOLLe ministre israélien des AE, Yair Lapid, et le Premier ministre Naftali Bennett lors d’une réunion du cabinet à Jérusalem le

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