Des avions azéris se ravitaillent en matériel israélien

Des avions azéris se ravitaillent en matériel israélien

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Illustration : Bakou

Des avions de transport entre Israël et l’Azerbaïdjan

Au cours des deux dernières années, des avions azéris sont arrivés sur les bases de l’armée de l’air et ont chargé du matériel de sécurité pour Bakou. De même hier matin, lundi 29 septembre, parallèlement aux combats au Haut-Karabakh, des avions de transport décollant de Bakou ont en fait atterri en Israël. Sur quoi porte l’accord sur les armes avec l’Azerbaïdjan et pourquoi les relations avec l’Etat musulman sont-elles importantes pour Israël?

Il y a aussi un angle de vue israélien à la reprise de la confrontation militaire dans la région du Haut-Karabakh, qui est au centre du différend entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie. Ces dernières années, les liens avec l’Azerbaïdjan, le riche pays musulman frontalier de l’Iran, se sont resserrés et ce n’est que ces derniers jours qu’on a constaté le mouvement des avions de transport entre les deux pays. Les relations de sécurité ont atteint un sommet il y a quatre ans – lorsqu’un énorme accord d’exportation d’armes a été signé pour l’Azerbaïdjan.
La portée de l’accord a été révélée de manière inhabituelle par le président azéri en 2016, après une rencontre à Bakou avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu. Israël a tendance à dissimuler ses accords avec les pays de l’Est, en particulier ceux qui sont en conflit actif avec leurs voisins – et la révélation de l’accord a fait froncer les sourcils au sein de l’establishment de la défense israélien.
Selon les publications, les Azéris ont acheté des armes d’une valeur d’environ cinq milliards de dollars aux industries de la défense en Israël. À titre de comparaison, il s’agit d’un montant supérieur au chiffre d’affaires annuel moyen d’une grande industrie de la défense en Israël.
Au cours des deux dernières années, dans le cadre de la coopération en matière de sécurité entre Israël et l’Azerbaïdjan, des avions de transport du ministère azéri de la Défense ont atterri sur une base régulière et chargé du matériel de sécurité. Ce sont parfois des Illiouchine IL-76 exploités par le ministère azéri de la Défense lui-même, et parfois des avions de transport de la compagnie Silk Way (Route de la Soie) Airlines appartenant au gouvernement et opérant pour le gouvernement.
Jeudi dernier, avant le début du cycle actuel entre l’armée arménienne et les Azéris du Haut-Karabakh, deux avions de transport qui sont arrivés sur un vol de Bakou ont atterri en Israël. Hier matin, lundi 29 aussi, malgré les appels en Arménie exigeant qu‘Israël cesse d’armer l’armée azérie, un autre avion de transport a atterri sur une base dans le sud du pays pour charger une cargaison de sécurité. Au moins sur le plan pratique, dans le cadre des combats dans le Caucase, Israël est désormais du même côté que la Turquie, qui étend son parrainage aux Azéris.
Il semble qu’une grande partie de l’armement israélien acheté par l’armée azérie soit aérien et terrestre, ainsi que des centaines de drones avancés, et même des avions spéciaux qui sont restés dans le domaine du matériel secret fourni par les industries israéliennes pendant de nombreuses années.
Selon le Washington Post, les Azéris ont attaqué ces dernières années des cibles arméniennes dans le Haut-Karabakh à l’aide de drones itinérants de type IAI (Harop), qui planent sur de longues distances et, dans leurs derniers instants, servent de missiles, ce qui leur vaut le surnom de «drone suicide».
Selon les Arméniens, sept personnes ont été tuées dans cette attaque. L’Arménie a protesté auprès d’Israël contre la vente des nombreuses armes qui ont amélioré le niveau de l’armée azerbaïdjanaise ces dernières années, les armes visant principalement le conflit dans la région séparatiste.
Notre commentateur sur les affaires militaires et de sécurité, Ron Ben-Yishai , qui en mars 1992 a couvert pour Yedioth A’haronoth la série de combats qui s’est terminée en 1994, un mois avant qu’Israël et l’Azerbaïdjan n’établissent des relations diplomatiques, ajoute que l’intérêt d’Israël provient principalement du pétrole que l’Azerbaïdjan vend à bon prix et à la frontière commune avec l’Iran, dont 23% de ses citoyens, y compris son principal dirigeant Khamenei lui-même, sont d’origine azérie.
La Turquie et les Juifs d’Azerbaïdjan ont servi de « demoiselles d’honneur », le jour du sacre des relations étroites entre Jérusalem et Bakou, mais Israël entretient également des relations diplomatiques avec l’Arménie, bien que les relations ne soient pas resserrées en raison de l’influence russe sur elle et des armes que Moscou lui vend. Dans le passé également, les relations avec Erevan ne se sont pas resserrées principalement, à cause de l’opposition turque, qui considère l’Arménie comme un ennemi – et qui soutient l’Azerbaïdjan en tant qu’État musulman.
Les avantages apportés au renseignement et aux opérations qu’Israël tire de ses relations étroites ne sont pas détaillés, mais les médias internationaux ont publié des articles sur les activités de renseignement israéliennes contre l’Iran menées à partir d’installations situées sur le territoire azerbaïdjanais, et où les supposées facilités livrées par l’armée de l’air azérie, selon des publications étrangères, apparaît de temps en temps.
De plus, dans le cadre des relations entre les deux pays, l’Azerbaïdjan a reçu des drones, dont l’un a déjà été utilisé contre un bus transportant des soldats arméniens dans la région de Baladan.

Adaptation de l’hébreu : Marc Brzustowski

ynet.co.il

Le point de vue israélien surplombant les activités nucléaires et de missiles de l’Iran apparaît clairement comme l’objectif n°1 de Jérusalem, au même niveau que l’approvisionnement en pétrole à meilleur marché ; il s’établit un jeu trouble (ou de zone grise) avec la Turquie, permettant à Israël de garantir une partie de ses intérêts indirects, au regard de son influence sur l’Azerbaïdjan et de maintenir Ankara en dehors de la zone d’influence pleine et entière de la Russie et de l’Iran.

Il est crucial de ne pas mettre tous les Chiites dans le même panier et de conserver un levier indépendant de l’Iran (alors que Téhéran développe son « Axe chiite » jusqu’au Liban), mais aussi de concurrencer l’influence turque sur un peuple turcophone, ou la mainmise russe sur les marchés d’armements régionaux… 

C’est une stratégie « complexe » permettant d’avoir plusieurs fers au feu, dont le maintien de la concurrence en matière de matériel militaire face à la Russie directement, de façon plus intensive que cela n’a été le cas à l’égard de la Géorgie, d’assurer ses propres intérêts dans le Caucase, bien qu’il y ait une proximité historique entre Juifs et Arméniens. On peut regretter que la morale ne soit pas mise en avant dans ces affaires enchevêtrées, dans une vision plus manichéenne du prétendu conflit « israélo-musulman ». Au moins n’accusera t-on pas Israël « d’Apartheid » dans ce contexte! Quoi qu’il en soit, ce conflit ancien remonte (au moins) à 1917, s’intensifiant avec le démantèlement de l’ancienne URSS, et ne s’arrêtera qu’à condition de négociations intensives entre les belligérants, où la Russie elle-même joue dans les deux camps à la fois, pour préserver son arrière-cour et diviser pour mieux régner… La composition ethnique du Haut-Karabagh ne correspond pas aux données territoriales et on voit mal comment cette réalité « hors de l’histoire » va pouvoir se rétablir. 

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