Des «montagnes de batteries» à Gaza : l’AFP corrige une énormité

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Trop gros pour être vraiDes batteries usagées s’amoncelant à Gaza sur une hauteur avoisinant les 50 mètres ? En réaction à la vigilance d’InfoEquitable, l’AFP a rétracté cette assertion. 

50 mètres. C’est, rapportait l’Agence France-Presse (AFP) en citant le directeur de l’Institut national pour l’environnement et le développement à Gaza, la hauteur atteinte par les batteries usagées entreposées dans une décharge publique de Gaza.

Alors que « des tonnes de batteries s’amoncellent dans des décharges, parfois atteignant jusqu’à 40-50 mètres de hauteur« , il n’y a aucun processus de recyclage, se désole-t-il lui aussi.

50 mètres, c’est aussi, peu ou prou, la hauteur de l’Arc de triomphe, vous savez, ce petit bâtiment de pierre qui fait passer voitures et passants pour des fourmis, et surplombe toutes les maisons des alentours sur la place de l’Etoile ?

La bande de Gaza comporte bien quelques tours qui dépassent cette taille, mais c’est un territoire sans grand relief et dont l’immense majorité des constructions sont des immeubles de quelques étages.

Une structure haute de 50 mètres, cela devrait se voir de loin.

Nous avons bien cherché, regardé des clichés du territoire, examiné les photos de décharges publiques qui s’y trouvent. Nous n’avons rien trouvé de tel.

La photo produite par l’AFP pour illustrer sa dépêche est, elle aussi, loin du compte.

Alors nous avons sollicité l’avis des fact-checkers d’AFP Factuel qui oeuvrent au sein même de l’agence :

Le 13 mars au petit matin, 4 jours après la parution initiale de la dépêche, l’AFP en a émis une nouvelle version.

La phrase donnant la hauteur des tas de batteries a été expurgée.

Quid du reste de l’information ?

Reste que l’article se focalisait précisément sur le gigantisme de ces déchets sous lesquels on nous dit que Gaza, que la presse n’a de cesse de dépeindre comme un « enfer » (un « territoire miné par la pauvreté et le chômage », pour reprendre les mots de la dépêche) croulerait.

Or le responsable de cet enfer ne serait évidemment pas à chercher à Gaza : « Les batteries s’accumulent depuis près de 15 ans », soit depuis qu’Israël impose un blocus à l’enclave palestinienne pour contenir le mouvement islamiste Hamas au pouvoir, explique Ibrahim Baraka, qui travaille dans la décharge ». On lit aussi que « Les batteries ont commencé à être utilisées après la guerre de 2006 entre Israël et le Hamas, lorsque la centrale a été bombardée par l’aviation israélienne, et sont aujourd’hui notamment raccordées aux nombreux panneaux solaires sur les toits. »

Mais si l’ampleur du problème a été librement augmentée de quelques dizaines de mètres, comment être sûr que la description des éventuelles responsabilités soit plus fiable ?

Cette hauteur des piles de déchets était tout de même l’argument principal de l’article, au point de figurer dans le titre qui faisait état de « montagnes de batteries ».

Si les « montagnes » ne font pas 50 mètres, mais, disons, 5 mètres (et encore…), sont-ce encore des montagnes ? Des collines ? Des bosselettes ?

Malgré la suppression de cet argument de taille dont le retrait pourrait invalider l’ensemble du récit, le titre n’a pas été modifié.

Quel crédit accorder à une dépêche qui laisse filtrer une telle exagération, puis en fait le point d’accroche de son titre ?

Tout cela sans que les relecteurs n’y trouvent rien à redire, l’information étant par ailleurs reproduite sans sourciller par les grands journaux clients de l’agence ?

Même certains titres de la presse israélienne s’y sont laissés prendre, comme l’indiquent nos confrères de CAMERA.

C’était, pourtant, gros comme une maison.

InfoEquitable

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