Les enjeux planétaires de la crise coréenne

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PAR GUY MILLIÈRE

Certains analystes francophones jugent Kim Jong Un rationnel. On peut penser, je l’ai déjà écrit, qu’il franchi les limites de la rationalité, en direction de la mégalomanie.

Les mêmes analyses jugent que Donald Trump en se faisant très menaçant a fait le jeu de Kim Jong Un. Ils regrettent visiblement les années pendant lesquelles Obama s’est fait le complice docile et complaisant du dictateur nord-coréen, et ont une mentalité digne de celle de Daladier et Chamberlain lorsqu’ils se sont rendus à Munich pour rencontrer Adolf Hitler en 1938.

Donald Trump ne pouvait pas faire moins que se faire très menaçant, et qu’assurer le dictateur nord-coréen que s’il porte atteinte à l’intégrité physique d’un Américain ou d’un ami des Etats-Unis, il aura pour conséquence la destruction totale de la Corée du Nord.

Tout en étant très menaçant, Donald Trump a utilisé les pressions sur la Chine aux fins que celle-ci fasse pression sur la Corée du Nord, comme je l’ai expliqué voici peu. Donald Trump doit constater que les pressions chinoises sur la Corée du Nord sont inopérantes et qu’après avoir entretenu le monstre Kim Jong-Un, la Chine doit constater que le monstre lui échappe des mains.

Il reste dès lors aux Etats-Unis peu d’options.

L’ultime option non violente est celle qui vient d’être présentée aux Nations Unies par Nikki Haley: exiger des partenaires économiques de la Corée du Nord (essentiellement la Chine) une interruption totale des livraisons de matières premières énergétiques. Les partenaires économiques de la Corée du Nord (essentiellement la Chine) savent qu’une telle interruption asphyxierait presque totalement le régime, pourrait conduire à une révolution de palais (peu probable), voire à une chute du régime.

La Chine veut bien une révolution de palais, mais ne veut pas une chute du régime, qui conduirait vraisemblablement à une réunification de la Corée et à un afflux de réfugiés nord coréens vers la Corée du Sud et vers la Chine.

Les Etats Unis ont un argument de poids pour obtenir que la Chine accepte l’interruption totale des livraisons de matières premières énergétiques: interrompre toute relation commerciale et financière avec les partenaires économiques de la Corée du Nord (essentiellement la Chine). Une telle interruption aurait à court terme des conséquences économiques lourdes pour les Etats-Unis, principal importateur de produits fabriqués en Chine sur la planète, mais elle aurait des conséquences économiques – et financières – plus lourdes encore pour la Chine.

Aux fins de ne pas perdre la face, la Chine pourrait enrober la décision attendue d’elle avec son propre vocabulaire.

Si l’ultime option non violente ne fonctionne pas, et si la Chine reste inerte, il deviendra très difficile de ne pas avoir à envisager une option militaire, aussi difficile et aussi délicate celle-ci puisse être.

Nul ne peut savoir ce que sera celle-ci ni quand elle aura lieu. Elle impliquera que soient renforcées les protections anti-missiles du Japon et de la Corée du Sud.

Elle sera porteuse de risques immense pour la population sud-coréenne. Et ces risques devront être minimises à l’extrême.

Elle pourra impliquer une frappe sur les installations nucléaires et sur d’autres installations militaires du régime, sans nécessairement viser le coeur du régime lui-même. Ce qui reste de rationalité à Kim Jong-Un pourrait le pousser à ne pas se suicider dans une apocalypse sanglante, mais nul ne peut savoir combien de rationalité il reste à Kim Jong Un.

Si Kim Jong-Un choisit le suicide, il choisira l’annihilation totale de son régime.

L’une des questions en suspens sera celle de savoir s’il reste à la Chine un minimum d’influence sur Kim Jong-Un pour le pousser a ne pas choisir le suicide.

Il n’y a pas de troisième option. Sinon le cataclysme. Donald Trump le sait.

Si Kim Jong-Un continue sur sa lancée, une prolifération nucléaire s’enclenchera qui ira du Japon et de la Corée du Sud à l’Egypte, à la Turquie, à l’Arabie Saoudite, à divers groupes terroriste islamiques sans doute, et, bien sûr, à l’Iran. Les Etats-Unis seront à la merci de n’importe quel chantage nord-coréen et perdront toute crédibilité vis-à-vis de leurs alliés en Asie et au Proche-Orient, un danger clair et imminent prendra forme pour Israël. La Chine pratiquera vraisemblablement l’apaisement vis-à-vis de la Corée du Nord aux fins de continuer à l’utiliser aux fins de poursuivre ses tentatives d’imposer son hégémonie sur l’Asie et sur le monde. L’Europe ne sera plus sous le parapluie de la défense américaine, mais sous la menace directe de la Corée du Nord, de la Chine et de l’Iran, et les dirigeants européens se conduiront, bien sûr, comme Daladier et Chamberlain à Munich en 1938, sous les applaudissements des analystes francophones.

Le monde voit la crise la plus grave qu’il ait connu depuis la crise des missiles installés à Cuba sous John Kennedy en octobre 1962.

Ce qui est en jeu est l’ordre et la sécurité du monde.

Les conséquences des années Obama ne cessent de se révéler chaque jour plus effroyables.

Je me souviens encore du jour de l’élection de Barack Obama en novembre 2008. Je vivais encore en France à l’époque. J’étais au milieu d’un cénacle de journalistes, tous débordants de joie. J’étais le seul à être inquiet. Je savais ce qui allait résulter.

Ceux qui m’entouraient me semblaient être des abrutis inconscients. Je crains que pour la plupart, ils n’aient pas changé.

© Guy Millière pour Dreuz.info

PS. Voir à la télévision française une “spécialiste” de la Corée du nord évoquer l’amour du peuple nord-coréen pour Kim Jong-Un fait reculer les limites de l’obscénité. Voir que pas une seule personne sur le plateau ne dénonce cette obscénité fait reculer en moi les limites du dégoût. La population nord-coréenne vit dans la terreur et la famine, dans un grand camp de concentration. Ne pas le dire est se faire complice, se vautrer aux pieds du gardien du camp de concentration est se faire adjoint du gardien du camp de concentration.

L’adjointe du gardien du camp de concentration s’appelle Juliette Morillot. Si j’étais sur le même plateau de télévision qu’elle, j’aurais envie de lui cracher au visage. J’ai en moi des valeurs éthiques. C’est pour cela que je ne suis plus invité par les chaînes de télévision française. C’est aussi pour cela que je suis très bien à dix mille kilomètres de la France, sur les hauteurs du désert Mohave où l’air est plus pur.

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