Entrevue avec Guy Milliere : la présidence Trump et le bilan de celle d’Obama

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Q : Êtes-vous surpris de la victoire de Donald Trump lors des présidentielles du 4 novembre dernier?

R : Dès que Donald Trump s’est présenté, en un moment où nombre de gens le prenaient pour un clown, j’ai compris qu’il entendait aller jusqu’au bout et que sa candidature était très sérieuse. C’est pour cela que je lui ai consacré une part importante de mon livre Après Obama, Trump? Je n’ai donc pas été surpris qu’il soit le candidat républicain. En voyant les foules qui se pressaient à ses rencontres publiques et l’enthousiasme qu’il suscitait, j’ai pense qu’il avait de grandes chances. Les sondages, qui, pour la quasi totalité d’entre eux, le donnaient battu, m’ont fait douté et m’ont rendu pessimiste au cours des dernières semaines qui ont précédé l’élection. Le soir du 8 novembre, j’étais très anxieux, car je comprenais les enjeux. Avec Hillary Clinton, cela aurait été la poursuite des années Obama et le glissement des États-Unis vers un déclin peut-être irréversible. Avec Donald Trump, c’était une possibilité de redressement et de renouveau. Le redressement et le renouveau l’ont emporté. Je prépare une réédition de mon livre, en enlevant le point d’interrogation.

Q : Comment expliquez-vous le triomphe du candidat républicain, Hillary Clinton était pourtant favorite pour l’emporter selon les sondages?

R : Les sondeurs, à l’évidence, se sont lourdement trompés. Ils ont sous-estimé le nombre de gens qui entendaient voter Trump, mais ne le disaient pas, tant ils avaient peur d’être critiqués et fustigés. Ils souhaitaient vraisemblablement la victoire de Hillary Clinton et ont pris leurs désirs pour des réalités. Hillary Clinton a perdu parce qu’elle était une mauvaise candidate, parce qu’elle n’a suscité aucun enthousiasme, et, aussi, parce qu’elle était une candidate abominable. D’une part, elle est l’incarnation du mensonge. Elle n’a cessé de mentir sur tous les sujets. D’autre part, elle porte la responsabilité de crimes divers qui ont jalonné sa carrière depuis plus de trente ans, en commençant par l’affaire Whitewater et en continuant jusqu’à l’attaque du consulat américain de Benghazi et jusqu’à l’utilisation d’un serveur internet non sécurisé par lequel ont transité des secrets d’Etat que des puissances ennemies des États Unis ont pu capter. En troisième lieu, elle est l’incarnation même de la corruption, et la Fondation Clinton a été une arme de corruption massive. Des électeurs démocrates imprégnés encore de valeurs éthiques se sont très vraisemblablement abstenus. Il reste néanmoins inquiétant que tant d’électeurs se soient portés sur une pareille candidate.

Donald Trump a gagné car il a incarné la colère et le désespoir de millions d’Américains de toutes catégories sociales et de toutes origines, ainsi que leur aspiration à voir les États Unis retrouver leur puissance, leur dignité, et le sens de leurs valeurs. Nombre d’Américains ont pensé que c’était une forme de dernière chance, et ils ont saisi cette dernière chance.

Q : Donald Trump a nommé Stephen Bannon comme conseiller stratégique. Les médias et la gauche ont dénoncé cette nomination. Ces derniers affirment qu’il est un idéologue d’extrême-droite. Qui est Stephen Bannon?

R : Les grands médias et la gauche détestent tout particulièrement Stephen Bannon car il a été, avec Kellyanne Conway, la directrice de campagne de Donald Trump, le stratège qui a conduit Donald Trump à la victoire et donc celui qui a brisé leur rêve de voir Hillary Clinton accéder à la Maison Blanche. Ils détestent aussi Stephen Bannon parce qu’il incarne un conservatisme sans concession et sans tiédeur. Plutôt que critiquer des idées de manière rationnelle et argumenter, les grands médias et la gauche diffament et jettent des anathèmes, ce qui montre chez eux une dimension totalitaire. Tenter d’invalider moralement et de briser un adversaire politique n’est pas du tout un procédé démocratique. Stephen Bannon a été banquier, entrepreneur, producteur à Hollywood. Il dirige le magazine en ligne breitbart.com, depuis le décès d’Andrew Breitbart en 2012. Il a été au coeur de la campagne victorieuse de Donald Trump, et il va jouer un rôle majeur dans l’administration Trump. Il a été associé par la gauche à un mouvement que la gauche a appelé la droite alternative, mouvement qui n’a jamais existé que dans la tête des gens de gauche qui l’ont décrit. Ces gens de gauche reprochent à ce qu’ils appellent droite alternative d’être islamophobe, antiféministe, raciste et antisémite. Breitbart.com est effectivement très critique envers l’islam, très critique envers le féminisme (ce qui ne signifie pas du tout très critique envers les femmes), défenseur des valeurs de la civilisation occidentale (ce qui n’est pas raciste des lors que la civilisation occidentale n’est pas une race), et en aucun cas antisémite.

Les accusations portées contre lui sont répugnantes, tout particulièrement l’accusation d’antisémitisme. Le rédacteur en chef de Breitbart.com choisi par Stephen Bannon s’appelle Joel Pollak. Il est juif. C’est un grand défenseur d’Israël, comme Stephen Bannon. Les accusations d’antisémitisme envers Stephen Bannon ont été rejetées avec indignation par des penseurs juifs qui vont de David Horowitz au rabbin Shmuley Boteach et à Alan Dershowitz. Les grands médias et la gauche américaine parlent à hauteur de caniveau.

 Q : Selon vous, quelles seront les principales priorités du nouveau président?

R : Il a énoncé ses priorités dans un texte appelé Contrat avec l’électeur américain (https://www.donaldjtrump.com/contract/) et je pense qu’il respectera ses priorités. Sur le plan intérieur, il entend lutter contre l’immigration illégale, rétablir la sécurité, revaloriser la fonction de policier, renforcer l’armée, lutter contre la corruption et le trafic d’influence, remplacer la loi dite “Obamacare” par un retour à la concurrence entre assureurs, permettre à l’économie américaine de retrouver une croissance forte grâce à une déréglementation et à une forte baisse des impôts, tout particulièrement les impôts sur les entreprises. Il entend également permettre aux États Unis d’utiliser pleinement leurs ressources énergétiques. Sur un plan extérieur, il entend se donner pour priorité une lutte efficace contre l’islam radical, en commençant par l’élimination de l’État islamique. Il entend également rompre avec l’accord passé en juillet 2015 avec le régime des mollahs a Téhéran, renégocier tous les accords commerciaux entre les États-Unis et les autres pays et régions du monde, faire sortir les États-Unis des accords sur la lutte contre le “changement climatique”, car il pense, à juste titre qu’il n’y a pas de changement climatique dû aux activités humaines. Contrairement à ce qui se dit ici ou là, je pense utile de souligner qu’il n’est pas en faveur du protectionnisme: renégocier des contrats n’est pas être protectionniste, et l’évocation de taxes sur les produits importés par les États Unis est un argument de négociation dans le cadre d’une recherche du meilleur contrat. Trump est un entrepreneur. Je pense utile de souligner qu’il n’est pas non plus isolationniste, mais en faveur d’une Amérique forte à même de frapper vite et efficacement si nécessaire.

Q : Qui nommera-il dans son cabinet?

R : Trump choisira ceux qui lui ont été fidèles depuis le début, et y ajoutera peut-être quelques ralliés. Nul ne peut savoir qui il choisira et pour quelles positions. Rudy Giuliani jouera sans aucun doute un rôle majeur, le général Michael Flynn aussi. Ben Carson a renoncé à être ministre, sans quoi il aurait lui aussi joué un rôle majeur. Newt Gingrich aura une position importante, sauf s’il décide lui aussi de renoncer. Pour le reste et pour davantage de précisions, tant de rumeurs circulent que mieux vaut attendre des certitudes. Quoi qu’il en soit, les décisions essentielles seront prises par Donald Trump lui-même.

 Q : Quel bilan faites-vous de la présidence de Barack Obama

R : J’ai publié, au début du second mandat de Barack Obama un livre appelé Le désastre Obama. Depuis, le désastre s’est accentué. Dans mon livre Après Obama, Trump?, avant de passer à l’analyse de ce qui a porté Donald Trump, je procède à un bilan des années Obama. Ce bilan est accablant. Sous Obama, une minorité de gens très riches est devenue bien plus riche, celle constituée par les gens de la finance et de grandes multinationales, le nombre de pauvres et de chômeurs s’est considérablement accru, quoi que disent les statistiques officielles. Les classes moyennes se sont effritées. La croissance a été asthénique. Les tensions entre noirs et blancs, et entre noirs et policiers se sont exacerbées. Sur un plan international, les États Unis ont perdu pied au Proche-Orient et contribué par des erreurs stratégiques majeures et, pour partie, par une volonté délibérée, à la création de l’Etat islamique, à l’avancée de l’Iran vers l’hégémonie régionale, au renforcement des positions de la Russie. Ils ont également permis à la Chine d’asseoir ses propres ambitions hégémoniques en Asie. Ils ont une lourde responsabilité dans le déferlement des vagues de migrants qui ont déstabilisé l’Europe. Le bilan de la présidence Obama est accablant, oui. Il est infiniment regrettable que ce bilan ne soit pas analyse comme il devrait l’être dans les grands médias, qui ne font plus du tout leur travail d’information et d’analyse.

 

Source http://princearthurherald.com/fr/international/entrevue-avec-guy-milliere-la-presidence-trump-et-le-bilan-de-celle-dobama

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