…ET démocratique. Une belle arnaque !

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Editorial par Gilles Bellaïche – Israël Is Forever Toulouse

Je lis un peu partout que les pourfendeurs de la réforme judiciaire en cours en Israël, promeuvent Israël comme « Etat Juif ET démocratique ». Comment pourrait-on s’opposer à un tel slogan brandi à tout instant, et pourquoi le lancer à la figure des seuls gouvernants de droite ? Ces gouvernements seraient-il anti-démocratiques, même fraichement élus librement par la nation israélienne ?

Curieux ; alors décryptons un peu.

Tout d’abord analysons l’adjonction du mot « démocratique » (véritable totem occidental), aux mots : état Juif. Qui s’opposerait à une telle définition : Israël : Etat Juif ET démocratique ? Personne ; tout le monde ne peut qu’applaudir !

Sauf que……

Sauf que D. Ben Gourion lui-même avait dit lors de la déclaration d’indépendance en mai 1948, qu’Israël devait être l’Etat du peuple Juif, donc un Etat juif (sic) acceptant et accordant les mêmes droits aux minorités ethniques, religieuses, culturelles… D. Ben Gourion aurait-il été un horrible dictateur antidémocratique, lui qui était issu d’une longue tradition de la gauche socialiste ?

Alors pourquoi faudrait-il ajouter aujourd’hui le mot « démocratique » à la définition primordiale de Ben Gourion ? Israël serait-il devenu au fil du temps un état tyrannique et donc anti-démocratique ?

Et qui a fait cet ajout et surtout pourquoi ? Là est l’arnaque, la turpitude.

D’abord pourquoi un état qualifié simplement de juif ne serait-il pas automatiquement démocratique ? Pourquoi opposer le caractère juif avec la notion de démocratie ; un Etat basé culturellement (et non cultuellement) sur les valeurs du judaïsme serait-il automatiquement non démocratique, pour qu’il soit nécessaire de lui adjoindre l’adjectif démocratique ? Voyons un peu.

Qui a institué l’égalité universelle entre TOUS les Hommes ?

Qui a institué la liberté individuelle comme fondement d’une société civile avancée ?

Qui a institué le respect intangible de la vie comme valeur fondamentale ?

Qui a institué la juste assumation de ses actes et de leurs conséquences ?

Qui a institué la nécessité de l’apprentissage et de l’élévation culturelle comme valeur universelle ?

Qui a institué l’esprit critique comme fondement du progrès humain ?

Qui a institué et mis en œuvre la solidarité comme modèle de vie en commun ?

N’est-ce pas le judaïsme qui a fait tout cela et ce depuis des siècles ? Alors pourquoi vouloir nécessairement adjoindre le mot « démocratique » au mot Juif, alors que ce mot de démocratie est consubstantiel au mot Juif ?

J’ai longtemps essayé de comprendre et de chercher les réponses à ces questions. Et puis j’ai trouvé, et tout s’est éclairé. Effectivement en cherchant un peu, j’ai d’abord découvert que ce slogan date de la précédente réforme judiciaire de 92-95 initiée et voulue par l’ancien président de la Cour Suprême A. Barak, slogan qu’il a conçu et promu, et qui a ensuite été repris par tous les partis de gauche et les partis arabes, et qui est maintenant clamé par les manifestants du même bord, systématiquement opposés à Bibi, qu’il fût 1er ministre harcelé par les juges il a 2 ou 3 ans, ou à présent à la tête d’une coalition légitime, solide et décidée.

Et pourquoi A. Barak a-t-il fait cela ? Pour de multiples raisons. Tout d’abord en cherchant un peu, on trouve que A. Barak, dans ses déclarations de l’époque, a dit clairement qu’il fallait enfin atteler Israël à la notion de « Droits de l’Homme »,…. comme si cela n’était pas déjà le cas (cf. ci-dessus) ! Il dit ainsi en 1995 : il est temps qu’Israël adopte « Les droits de l’Homme » comme loi fondamentale. Ce qui fut fait.

Sauf que dans l’esprit « malin » de Barak, il n’entendait pas les Droits de l’Homme dans son assertion classique, mais dans celle d’un néo-mondialisme ; ainsi sa définition des droits de l’Homme voulait dire, le droit de chaque individu dans sa spécificité, et non pas de l’Homme inclus dans la cité. Et c’est à partir de là, que le droit de chaque individu a commencé à primer sur le droit de la collectivité ; c’était donc la porte ouverte à l’intérêt de chacun, de chaque minorité, au détriment de celui de la majorité. On a donc vu les minorités arabes, sexuelles, politiques, immigrés, religieuses… obtenir des droits que la majorité n’approuvait pas et qui pouvaient même parfois mettre en péril cette majorité. Bref, on en est venu en Israël, comme dans le reste de l’Occident d’ailleurs (les mêmes causes produisant les mêmes effets), à une véritable tyrannie des minorités, comme on le voit avec plus ou moins d’acuité, un peu partout en Occident. Et là était aussi l’objectif de Barak : faire d’Israël un pays qui entre dans les standards occidentaux, donc fatalement soumis à tous les lobbys de minorités.

Or, tout comme on a remplacé en Occident la référence au judéo-christianisme par la nouvelle religion droits-de-l’hommiste et son dérivatif la laïcité exacerbée, faire d’Israël une copie des pays occidentaux, conduit à vouloir lui faire perdre son caractère purement juif ; et c’est en cela que résidait le second objectif (caché) de A. Barak : déjudaïser Israël pour en faire un pays quasi-laïc, tout comme l’Occident s’est déchristianisé depuis 50 ans. Au passage, notons que la nature ayant horreur du vide, cette déchristianisation s’est accompagnée en occident d’une islamisation des pays, leurs racines judéo-chrétiennes étant ringardisées et marginalisées.

Alors pourquoi vouloir une telle désacralisation culturelle d’Israël ?

D’abord parce que les adeptes de cette démarche sont des laïcs, incultes du fait religieux, qu’ils considèrent comme archaïque, irréel, inutile, voire dangereux et liberticide. On comprend alors mieux les liens étroits qui existent entre les différents opposants à la réforme judiciaire, qu’ils se posent en défenseurs de la Démocratie façon Droits de l’Homme et laïcité (à la mode Barak), ou que ce soit ceux pour qui le fait religieux relève du mysticisme, et qui se déclarent laïcs et hostiles au monde religieux et à ses représentants.

Malheureusement pour tous ces progressistes, et contrairement au reste de l’Occident, il en va autrement en Israël ; en effet, la désacralisation du pays n’a fort heureusement pas atteint le niveau atteint en Europe. Le judaïsme est encore très vivace en Israël, et la majorité des israéliens n’est pas prête à abandonner son attachement au moins à ses valeurs si ce n’est à ses rites traditionnels.

Ainsi, tout comme l’a fort bien noté Pierre Lurçat, cette confrontation va bien au-delà d’une simple opposition à une réforme circonstancielle ; c’est à un véritable choix de civilisation qu’est confronté aujourd’hui Israël : veut-il glisser inexorablement vers sa disparition en tant qu’Etat juif, et se fondre dans le magma des pays occidentaux qui courent à leur perte civilisationnelle s’ils ne réagissent pas fortement et rapidement, ou veut-il conserver ses attaches culturelles aux valeurs du judaïsme, quitte à faire une place à ceux qui portent de façon parfois envahissante cette parole ? Enjeu profondément civilisationnel s’il en est ! Pour ma part, il me semble que les dérives inquiétantes du monde occidental, vers sa déconstruction systémique étant principalement dû à sa déchristianisation, il est fondamental qu’Israël conserve son attachement au judaïsme, pour sauvegarder son identité et son avenir, comme il a su le faire durant ses 2000 ans d’exil, montrant ainsi aux autres nations le chemin de la lumière….

Gilles BELLAICHE Israël Is Forever – Toulouse Mars 2023

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