Israël : une économie en panne de direction politique

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L’économie israélienne reste plutôt tonique en dépit de l’absence de direction politique et du gel des grands projets d’infrastructures.

Le FMI a révisé à la baisse les prévisions de croissance du PIB en Israël pour 2019 et 2020 de 3,3 % à 3,1 %. La Banque d’Israël a fait de même : pour 2020, elle programme 3 % au lieu des 3,5 % initialement envisagés.

Cette baisse de tonus est avant tout liée au ralentissement de la croissance mondiale, mais  le contexte politique a aussi sa part de responsabilité . Depuis la dissolution de la Knesseth en décembre 2018, le gouvernement a gelé tous les projets et cela semble devoir se poursuivre. Les négociations  pour un gouvernement d’union nationale n’avancent guère . Du coup, l’actuel imbroglio politique pourrait conduire à un troisième tour d’élections au premier trimestre 2020 avec la mise en place d’un gouvernement en avril voire en mai prochain. Le pays resterait sans cap économique clair pendant une durée totale de 18 mois !

Moteurs de croissance

Le monde des affaires aspire à un gouvernement d’union nationale. « Une large coalition dans laquelle aucun petit parti n’a le pouvoir d’imposer ses intérêts faciliterait une politique axée sur l’ensemble de la société », a déclaré Karnit Flug, ancienne présidente de la Banque d’Israël.

En attendant, « l’incertitude politique empêche le gouvernement de prendre des décisions qui seraient des moteurs de croissance, comme les projets d’infrastructures. Tout est gelé. Or, le pays a déjà pris beaucoup de retard, notamment dans les transports publics, qui sont largement sous-dimensionnés par rapport aux besoins », souligne Dan Catarivas, responsable des relations extérieures de l’Association des industriels israéliens.

Pas de budget 2020

Conséquence directe du blocage politique , aucun budget n’a été voté pour 2020. A défaut, à partir de janvier, le pays vivra chaque mois sur un douzième du budget 2019. Ce dernier avait été adopté exceptionnellement tôt, en mars 2018, afin d’éviter un éclatement de la coalition gouvernementale. Sans grand résultat, puisque cela l’avait juste différé de quelques mois.

Autre problème, le dérapage du déficit public. « Depuis 2 à 3 ans, le Premier ministre, Benjamin Netanyahou, a laissé filer les dépenses, essentiellement car le ministre des Finances, Moshe Kahlon, qui n’était pas membre du Likoud, avait besoin de se faire réélire et pour cela a fait des cadeaux fiscaux », explique Dan Catarivas. Le déficit a glissé à 3,8 % du PIB alors que l’objectif était de 2,9 % et pourrait déraper à 4,5 % si aucune mesure n’est prise pour l’endiguer.

Chômage limité

Au ministère des Finances, il est également suggéré d’augmenter l’âge de la retraite des femmes et de limiter le budget de la défense. Une fois en place, le gouvernement devra rapidement prendre des mesures pour ramener le déficit public à un niveau raisonnable, sachant qu’en Israël, « il n’y a pas de réelle différence entre la gauche et la droite sur le plan économique », comme le souligne le professeur d’économie Omar Moav.

Le shekel caracole

L’économie israélienne résiste cependant bien aux blocages politiques. Le chômage est très limité – à 3,7 % au troisième trimestre 2019 -, la balance commerciale reste positive,  les prix de l’immobilier flambent, notamment à Tel Aviv qui constitue le premier bassin d’emploi, les sociétés israéliennes de high-tech ont levé 2,24 milliards de dollars au troisième trimestre 2019, un record trimestriel depuis 2013… et surtout le shekel caracole.

La devise est même celle qui s’est le plus renforcée face au dollar ces 10 dernières années. Rien que pour cette année, la monnaie israélienne s’est renchérie de 6,6 % par rapport au dollar et 9 % face à l’euro. Le taux d’intérêt de la Banque d’Israël est à 0,25 % et elle n’a pas l’intention de le réduire davantage, ni d’intervenir sur les marchés malgré la pression des milieux d’affaires. Dan Catarivas conclut : « On a un shekel fort car on a une économie forte. Heureusement, le secteur privé, très dynamique, ne dépend pas de l’existence d’un gouvernement. »

Source www.lesechos.fr

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