La Junte aux abois – Deuxième partie

0
91

Par Jean-Pierre Lledo    

Agissant ou laissant faire, la malfaisance des Juges.

Cinq exemples récents.

 1 – Peine de mort pour les terroristes

En réaction à la recrudescence du terrorisme falestinien qui désormais se pratique à l’arme à feu, et qui en un mois a déjà fait une vingtaine de morts parmi les civils, le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir a appelé de ses vœux une loi visant à imposer la peine de mort pour les terroristes. La procureure générale Gali Baharav-Miara qui cherche à destituer le Premier Ministre (!) s’est aussitôt prononcé contre. Le projet de loi contredirait notamment la Loi fondamentale ‘’Dignité humaine et liberté’’ (introduite en 1992 par le juge Aaron Barak qui en 1995 deviendra son président), et serait donc inconstitutionnel, tant du point de vue des droits de l’homme que du droit international, a-t-elle cru devoir ajouter.

Ainsi les terroristes qui ne se considèrent pas comme des terroristes mais comme des guerriers, bras d’Allah punissant l’entité sioniste, et donc comme des justiciers dont le but est la destruction d’Israël, devraient être protégés au nom d’une loi israélienne proclamant la ‘’Dignité humaine et liberté’’. On croit rêver ! ‘’Dignité humaine et liberté’’ pour des guerriers qui tuent des civils sans défense ? Mais alors Tsahal ne devrait-elle pas aussi cesser de frapper les lanceurs de missiles ou d’éliminer les guerriers du Hamas ou du Djihad islamique, comme le lui recommande aujourd’hui les USA et l’Europe, puisque de surcroit malgré toutes les précautions des aviateurs, il y a toujours des victimes collatérales ? Et au nom de quelle vassalité, la ministre allemande des Affaires étrangères et l’Union européenne se permettent-elles de nous faire des ‘’recommandations’’ [1] ?

La Knesset vient d’approuver en première lecture ce projet de loi par 55 voix contre 9. Et en quoi cela dérogerait-il au droit international ? Gali Baharav-Miara aurait-elle aussi l’ambition de modifier le droit américain ? Ce à quoi fait sans doute allusion le ministre Itamar Ben-Gvir lorsqu’il affirme ‘’Ceux qui massacrent des civils devraient passer sur la chaise électrique.« … Notons que si la France a aboli la peine de mort, elle ne se prive pas d’ôter la nationalité à ses ressortissants d’origine étrangère qui ont commis des actes terroristes ? Déjà 22, une goutte d’eau pourtant…

2 – La GPA (Gestation pour autrui)

La GPA consiste à louer un utérus afin de mettre au monde un enfant qui sera livré en vertu d’un contrat par ‘’la mère porteuse’’ aux locataires homosexuels, lesquels s’ils sont des hommes, auront dû auparavant acheter un ovule auprès d’une banque.

La GPA a engendré un marché mondial de l’utérus où la concurrence qui bat son plein fait baisser les prix. En France et dans de très nombreux autres pays, elle est interdite en tant que pratique avilissante pour les femmes et source de psychose pour les enfants en raison d’une filiation dissimulée. Et de très nombreux psychiatres et psychanalystes y mènent un combat contre sa légalisation[2] et alertent pour la catastrophe qui s’abattra sur les générations futures.

Interdite aussi en Israël jusqu’au 14 Juillet 2021, la Cour suprême l’y a autorisée, sollicitée par le ministre de la Santé Nitzan Horowitz du parti postsioniste Meretz lorsque Lapid assuma durant une très courte période la fonction de premier ministre, juste avant que le gouvernement ne s’effondre… ‘’Une grande première’’ ose s’exclamer la chaîne israélienne I24, alors que vient de naitre une petite fille de ‘’parents’’ homosexuels masculins qui sera élevée dans le mensonge sur ses origines ![3] Excellente nouvelle pour les femmes vivant en dessous du seuil de pauvreté, et donc pour l’économie et la fierté : l’utérus anonyme sera désormais national.

Inutile de préciser que c’est encore en vertu de cette Loi fondamentale de 1992 ‘Dignité humaine et liberté’’ qu’un tel méfait a été légalisé, sans aucune discussion à la Knesset, et ce alors qu’il y va de la santé mentale de ses futurs citoyens.

3 – ‘’Parent 1, Parent 2’’

Cinq jours après le rejet en Octobre 2020 par la Knesset d’un projet de loi visant à remplacer les termes « Père » et « Mère » par « Parent 1 » et « Parent 2 », le ministre de la Justice Avi Nissenkorn annonçait sa décision d’appliquer cette mesure au sein de son administration par souci d’égalité entre couples ! Ainsi la protection des homosexuels se transmue en dictature de la minorité sur la majorité, puisque qu’ils ne doivent pas excéder 2 ou 3% de la population israélienne !

Cela ne gêne en aucune manière la Cour suprême censée protéger la ‘’dignité et la liberté’’ des citoyens et sans doute est-il dans ses intentions de désavouer la Knesset, alors que même dans les pays européens qui ont adopté cette loi, ce le fut toujours par les Parlements, et après un long débat. [4]

 4 – L’idéologie du genre

Partie des USA, elle déferle sur l’Europe… et sur Israël. Elle consiste à proclamer que chaque individu a la liberté de s’identifier à un homme ou une femme quel que soit son sexe d’origine, lequel ne relèverait plus de la biologie mais du libre choix ! Cette absurdité frôle la démence !

5 – L’accord gazier scélérat avec le Liban

Alors que son gouvernement allait s’effondrer, donc quelques jours avant les nouvelles élections législatives du 1er Novembre 2022, Lapid, son chef durant quatre mois, s’empressa de signer un accord avec le gouvernement libanais, sous la menace du Hizbollah et les bons offices du médiateur américain, qui revint à céder une partie de la souveraineté maritime d’Israël et de ses gisements à son ennemi déclaré ! Et ce, sans la moindre objection de la Cour suprême !

A ces cinq exemples de malfaisance de la Cour suprême pourraient s’en ajouter bien d’autres, notamment ceux en faveur des Arabes israéliens réclamant des droits sans pour autant accepter les devoirs qui leur incombent, à commencer par le service militaire, refusant même de se considérer comme des Israéliens, et au nom de leur falestinité, brandissant drapeaux, profanant les symboles de l’Etat juif d’Israël, distribuant bonbons et faisant la fête après chaque assassinat de citoyens juifs, alors que de tels actes devraient leur valoir le retrait immédiat de la nationalité et si récidive, l’expulsion pure et simple…

Cette crise, un salutaire révélateur !

La réforme judiciaire, sa contestation et la crise qu’elle génère, une des plus spectaculaires depuis 1948, ont l’immense mérite de nous livrer une sorte d’IRM, qui par résonance magnétique permet d’obtenir des images de l’intérieur du corps en trois dimensions. Du pain béni pour les générations actuelles et futures de sociologues et de médiologues.

En tous cas, elle rend visible à tous une radiographie que par exemple le politologue Yoram Hazony avait déjà esquissée, il y a 23 ans. En effet son livre « L’Etat juif, sionisme, postsionisme, et destins d’Israël », au travers d’exemples concrets, de prises de position publiques, montrait que la société israélienne catalysait de plus en plus deux courants qui s’opposaient plutôt sur des questions identitaires, philosophiques et idéologiques que sur des questions économiques ou même politiques, où, hormis le conflit israélo-falestinien, règne un certain consensus.

Et si l’on me permet un raccourci qui mériterait bien sûr d’être nuancé, je dirais que le courant minoritaire regroupe des élites ayant l’hégémonie sur les appareils idéologiques d’Etat ou privés (écoles, universités, arts, médias) et donc sur la production et la diffusion des idées.

Extrêmement dynamique compte tenu de cette position hégémonique, il prône de façon ouverte la fin de l’Etat juif, l’abandon de son symbole, le Mont du Temple, l’étouffement de la société orthodoxe, une pax américana avec les falestiniens quel qu’en soit le prix et quels que soient les échecs passés, et une ouverture totale au monde des ‘’valeurs’’ du wokisme et du transhumanisme dont il faudrait désormais se prévaloir pour être accepté par le monde ‘’démocratique’’ et ce afin qu’Israël devienne un pays ‘’comme les autres’’ qui puisse s’offrir entièrement à la post-modernité dont Tel Aviv, devenue la capitale mondiale de l’homosexualité, serait la vitrine, les drapeaux multicolores rivalisant presqu’avec les drapeaux bleus et blancs.

Face à ce courant liquidateur (du projet sioniste et de sa miraculeuse réalisation, Israël) dont le quotidien Haaretz est le porte-drapeau et l’ambassadeur, se dresse le courant populaire très majoritaire, qui de par son dynamisme démographique le sera de plus en plus, mais qui, quasi dépourvu d’organes d’expression, n’a plus que la Knesset pour le représenter et faire entendre ses voix. Des voix qui s’opposent point par point aux revendications liquidatrices des post-sionistes : maintien et renforcement de l’Etat juif et de ses symboles, refus d’accepter à ses côtés un Etat falestinien tant que ses représentants organisent la culture de l’anéantissement d’Israël et le terrorisme anti-juif, réintroduction dans les Ecoles et à l’Université de l’enseignement de l’histoire juive et du judaïsme, refus de la dictature des minorités, défense des homosexuels mais refus du mouvement international LGBT[6] qui est devenu le cheval de Troie de toutes les idéologies modernes dont l’objectif à peine dissimulé est la destruction de la civilisation judéo-chrétienne, de l’héritage biblique, et des fondements biologique, sociologique et symbolique de l’humain.

‘’Courant populaire’’ disais-je, mais dont fait partie une intelligentsia (telle ces 120 académiciens qui viennent de soutenir le Projet de Réforme judiciaire[7]), généralement diabolisée par les média, censurée ou même menacée lorsqu’elle veut porter la contradiction par exemple dans les universités, écartée des festivals, ostracisée comme « extrême droite »…

Mettre fin à cette dictature de la bien-pensance israélienne et au totalitarisme médiatique est de la première urgence.

Comment sortir de la crise actuelle ?

Sera-ce par le « compromis » comme y invite le Président Herzog ? Je ne le crois pas. Quel compromis peut-il y avoir entre deux projets de société si opposés ? Face à la logique du coup d’Etat vers laquelle poussent les leaders de la contestation actuelle, mais qui est vouée à l’échec compte tenu des traditions de loyalisme de Tsahal qui s’est toujours soumise à l’autorité politique ?

Quelle autre alternative reste-t-il qui puisse restaurer la paix civile, hormis le respect du verdict des dernières élections et le rééquilibrage des pouvoirs entre la Knesset et la Cour Suprême ? Respect des normes de la démocratie qui commence par le respect des choix politiques de la majorité du Parlement, la mission de la Cour suprême étant de contrôler la constitutionalité des lois et non de légiférer à sa place, puisque l’alternance permet à la minorité de devenir majorité, si tel est le désir du peuple.

Avant l’arrivée du juge Aaron Barak à la tête de la Cour Suprême et l’adoption des deux nouvelles lois fondamentales sur « la dignité et la liberté humaines » et sur « la liberté professionnelle » en 1992, qu’il qualifiera lui-même de « Révolution constitutionnelle », et qu’il vaudrait mieux requalifier de « Contre-Révolution constitutionnelle », Israël, qui fonctionna durant plus de 30 ans avec 9 autres lois fondamentales, fut-elle pour autant, comme le sous-entendent les contestataires, une dictature alors que la Cour suprême n’invalida qu’une seule loi ?

Un peu de modestie M. Barak, surtout lorsque vous avouez ne pas avoir recouru au droit hébraïque uniquement par ignorance[8], ce qui à votre poste et dans un pays qui s’appelle Israël, est pour le moins déshonorant et scandaleux. Car d’où viendrait cette profonde culture démocratique de l’écoute et du débat chez ces ‘olim[9] qui arrivèrent principalement d’Europe de l’est et du monde arabe, dont – c’est le moins que l’on puisse dire – ce n’était pas la caractéristique déterminante, sinon de leur patrimoine tanakhique et talmudique ?

A contrario, n’est-ce pas plutôt votre conception du droit qui est totalitaire, comme il serait légitime de le penser en lisant votre Crédo[10] :

« A mes yeux, le monde est empli de droit. Tout comportement humain est soumis à une norme légale. Même lorsqu’un certain type d’activité – comme par exemple l’amitié ou les pensées subjectives – est régi par l’autonomie de la volonté, cette autonomie n’existe que parce qu’elle est reconnue par la loi… Il n’existe aucun domaine de la vie qui échappe au droit. ».

Ce n’est plus du Droit mais du Droit « divin » et le Tribunal Suprême (de l’Inquisition) n’est plus très loin. Aussi n’est-il pas étonnant que vos affidés se considèrent supérieurs aux représentants du peuple, et trouvent normal que cette Junte auto-cooptée, intervienne dans le domaine politique. N’aviez-vous pas aussi proclamé : « Tout est justiciable ! » ?

Il était donc temps de remettre en cause votre férule, dans le sens propre et figuré de ce mot. C’est ce à quoi s’emploie cette modeste Réforme judiciaire proposée par le ministre de la justice Yariv Lévin[11] : mettre fin au népotisme et démocratiser la commission de nomination des Juges/ diversifier leur panel/ mettre fin à l’argument d’autorité de ‘’raisonnabilité’’ qui ne s’appuie sur aucune loi/mettre fin à la tutelle des conseillers juridiques sur les ministres, sans quoi ces derniers ne sont que des pantins déresponsabilisés/ Prééminence du Parlement si la Cour suprême tentait d’annuler une loi pour des motifs politiques.

La pertinence de cette Réforme est d’ailleurs reconnue par Lawrence Summers, ancien secrétaire américain au Trésor qui a fait partie du cabinet de l’ancien président américain Bill Clinton, qui fut directeur du Conseil économique national sous l’ancien président américain Barack Obama et doyen de Harvard : « Il existe de solides arguments en faveur d’une réforme judiciaire en Israël… Il est inhabituel, selon les normes internationales, que les juges soient choisis par des juges actuellement en fonction. Il est inhabituel que les tribunaux soient en mesure d’écarter une loi simplement en jugeant qu’elle est déraisonnable sans avoir une Constitution à laquelle se référer. » [12] Il aurait même pu ajouter qu’aux USA les Juges sont choisis par le Président puis adoubés par le Sénat !

Cette Réforme qui fera transiter le pouvoir d’une Junte vers le Parlement redonnera toute sa force à la vie politique car les dés ne seront plus pipés d’avance, l’essentiel étant que les vaincus d’une élection aient la possibilité d’être les vainqueurs de la suivante. Que chacun défende son programme et le peuple jugera. Et s’il est clair que le peuple peut se tromper ou être trompé, faute de pouvoir changer de peuple, il revient en démocratie à chaque parti d’opposition de l’éclairer et de le convaincre, et de ce point de vue avec sa trentaine de partis Israël n’est pas la plus mal lotie.

La présidente actuelle de la Cour suprême Esther Hayout fut particulièrement mal inspirée lorsqu’à Berlin il y a environ une année, elle défendit l’idée devant ses pairs que face à une Cour suprême forte, Hitler n’aurait pu devenir chancelier, oubliant le contexte historique (Traité de Versailles, division des partis d’opposition, trahison des clercs et de la bourgeoisie, humus culturel ancestral antisémite, etc…) et la terreur au quotidien exercée dès 1921 par les S.A (Sections d’assaut) cette organisation paramilitaire du parti nazi. Sans parler de l’indécence (« suprême ») du non-dit : nazifier la droite politique israélienne… à Berlin !

Quant aux minorités qui ont leurs députés et leurs ONG pour les défendre n’est-il pas plus immoral qu’elles dictent leurs volontés à des majorités que l’inverse ? L’hégémonie de la ‘’goche’’ minoritaire dans l’électorat israélien et outrageusement dominante dans les média est particulièrement scandaleuse, surtout lorsque l’on sait leur importance dans la formation du jugement des citoyens. Il est urgent aussi d’y mettre fin en imposant un pluralisme à tous les organes de la presse écrite et plus encore audio-visuelle, dont une Haute autorité à créer devrait être le garant.

« Chacun son métier et les vaches seront bien gardées » dit le proverbe, là est sans doute le meilleur « compromis » et la seule issue acceptable…

Plus vite les partis contestataires le comprendront, moins gravissime sera leur dégringolade lors des futures élections.

Plus vite l’Europe et les USA cesseront de s’ingérer dans nos affaires intérieures, moins rapidement s’effritera leur influence, et ce dans une géopolitique en constante recomposition où les « valeurs », surtout quand elles sont hypocrites, ont tendance à s’effacer face aux « intérêts »…

Fin

[1] https://francais.rt.com/international/104525-berlin-plaide-contre-projet-israelien-instaurer-peine-mort-contre-terroristes

[2] En France, notamment Monette Vacquin, François Braunstein, Sylviane Agacinski, Céline Masson, Caroline Eliachev, Dominique Folscheid, et bien d’autres…

[3] https://www.i24news.tv/fr/actu/israel/1677073198-israel-une-petite-fille-nait-avec-deux-peres-grace-a-une-gpa-une-premiere

[4] https://www.lefigaro.fr/vox/societe/2019/02/14/31003-20190214ARTFIG00262-parent-1-parent-2-le-deni-de-la-realite-pere-mere-conduit-a-l-absurde.php

[5] VID-2022-09-19-Genre a l Ecole en Israel.mp4

[6] LGBT qui à l’origine regroupait Lesbiennes, Gays, Bisexuelles, Trans, s’est agrégé de nouvelles identités Queers et Intersexes, etc… Ce qui donne des acronymes de plus en plus cocasses du type LGBTQIA+, voire même 2ELGBTQQIA+ au Canada francophone !

[7] https://lphinfo.com/120-academiciens-publient-une-lettre-de-soutien-a-la-reforme-judicaire/

[8] Interview accordée le 13 février sur la chaine Kan au journaliste Roni Kuban.

[9] Immigrants juifs.

[10] Revue Lyouné Mishpat, 1993, citée par l’avocat Pierre Lurçat dans Comment la Cour suprême est devenue le principal outil de déjudaïsation de l’Etat juif, P.I. Lurçat (archive.org)

 

[11] Hormis les explications du ministre, les francophones écouteront avec profit celles de l’avocat Joel Burstin : https://www.youtube.com/watch?v=pDGuZkyo8so

[12] Newsletter Israel Valley (organe de la Chambre de commerce franco-israélienne)

Aucun commentaire

Laisser un commentaire