La montre du Tsadik

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L’histoire méconnue d’un héritage obtenu par Baba Élazar, dont l’anniversaire de deuil tombe aujourd’hui, de son père, le Baba Méir. Pourquoi Rabbi Élazar a-t-il transmis la montre ? Et comment est-elle parvenue aux mains d’un grand bienfaiteur du monde de la Tora ?

Tout le monde a vraisemblablement entendu parler de Baba Méir, décédé le 17 Nissan 1983, un homme saint et pieux, fils aîné de rabbi Israël Abou’hatséra, Baba Salé, qui était tenu en haute estime par tout le monde, autant par les Ashkenazes que par les Sefarades ; la piété et la sainteté de Baba Méir, sa maîtrise de toutes les parties de la Tora, ainsi que les prodiges intervenus dans le sillage de ses Berakhoth, étaient bien connus du peuple. Baba Méir portait une montre au poignet, d’aspect simple, mais qui lui servait à mesurer chaque seconde de son emploi du temps chargé, une montre consultée par ses yeux purs en cas de besoin, jour et nuit, une montre d’une valeur inestimable, que les puissants du monde auraient désiré s’approprier, et qu’un grand nombre de personnes désiraient porter. Le ‘Hatam Sofer écrit que «la tenue des Tsadikim est empreinte de sainteté lorsqu’on la revêt » (Beréchit, Toldot). De même, le Ben Ich ‘Haï (Shené Eliyahou) affirme que les vêtements et les objets de culte du Tsadik sont porteurs de sainteté.

Or, une telle montre, dans une telle famille, n’est pas mise en vente ; dès la disparition du Baba Méir, son fils aîné, le célèbre rabbi Élazar Abou’hatséra, surnommé Baba Élazar, en hérita ; il résidait à Beer Chéva jusqu’au 27 Tamouz 2011, où il quitta ce monde.

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Cette histoire se déroule quelques années avant le décès de rabbi Élazar : l’ange préposé à ‘Essav (les non-Juifs) voulut porter atteinte à la « cuisse de Ya’akov » (c’est-à-dire aux Juifs), alors que des forces malfaisantes menaçaient de lui porter atteinte, rabbi Élazar, qui avait endossé les malheurs de la collectivité et ceux de l’individu, se retrouva dans une situation douloureuse : des personnes éloignées de la Tora l’accablèrent et tentèrent de le terroriser, par divers moyens étranges.

À cette époque où rabbi Élazar était livré à ces forces néfastes et mécréantes, il continua sa réception du public et n’en dit mot à personne, en dissimulant sa douleur et son affliction. Une personne ressentit l’obligation de révéler les faits et d’agir, la grande sœur de rabbi Élazar, la rabbanith Zhari Pinto, épouse de rabbi ‘Haïm Pinto chlita, rav d’Ashdod, fille bien-aimée de Baba Méir. Elle s’était occupée de lui dans sa vieillesse, depuis qu’il était devenu veuf et qu’elle était restée orpheline, lui demandant de s’occuper de ses frères orphelins.

Alors que de longues années s’étaient écoulées depuis cette époque, lorsqu’elle apprit le désarroi de son frère, rabbi Élazar, elle ressentit l’obligation d’appliquer le testament de son illustre père stipulant qu’elle devait s’occuper de chacun de ses frères. Touchée par sa détresse, elle fit appel à son fils aîné, l’Admour rabbi Yochiyahou Pinto chlita, afin qu’il lui vienne en aide et fasse marcher ses nombreux contacts en Israël et à l’étranger, pour sauver l’homme accablé par ses oppresseurs, et préserver l’honneur en Tora de son frère pieux, qui souffrait en silence de ses poursuivants.

Il semblait que ce fût une demande difficile à exécuter, mais l’ordre et l’obligation de Kiboud Em, l’obligation de respecter sa mère, ainsi que le respect de la volonté de son illustre grand-père, Baba Méir, ainsi que la douleur de l’oncle, conduisirent rabbi Yochiyahou à se rallier à cette cause de toutes ses forces. Pendant une longue période qui dura plus de deux ans, il investit une bonne partie de ses forces et de ses moyens pour combattre ces poursuivants malintentionnés ; la relation entre ces Tsadikim avait lieu sur une base quotidienne, à raison de plusieurs échanges par jour, alors que le rav Pinto ressentait l’obligation d’investir des efforts avec un réel dévouement, uniquement dans le but d’aider son célèbre oncle tsadik. Il témoigna qu’un tel effort n’avait été rendu possible que par la force de l’importante Mitsva de respect accordé à la mère, et celle de son prestigieux grand-père, qui se tint à ses côtés pour aider l’oncle saint.

À l’approche du décès de rabbi Élazar zatsal, à la même période où il avait réussi à atteindre son but, les résidents d’Ashdod s’émurent de voir Baba Salé, qui ne sortait pratiquement jamais de chez lui, se rendre au domicile du rav Pinto à Ashdod, où ils s’isolèrent pour tenir une conversation affectueuse entre Tsadikim et hommes saints pendant de longues heures. Lors de cette rencontre, rabbi Élazar souhaita exprimer ses remerciements à rabbi Yochiyahou de manière originale. Il sortit de sa poche la montre de Baba Méir en poussant rabbi Yochiyahou à l’accepter en disant : « Je te l’offre en cadeau, tu m’as réjoui ici dans ce monde-ci et tu as réjoui mon père et ton grand-père dans le Monde supérieur, et personne ne mérite plus que toi de recevoir cette montre…»

Cette relation étroite dura jusqu’au jour du décès de rabbi Élazar ; même le jour de sa disparition, ces deux Tsadikim conversèrent au téléphone, et l’on entendit lors du Hespèd (oraison funèbre) émouvant la relation profonde qui liait ces deux Tsadikim.

Les jours passèrent et un jour, lorsque le rav Pinto se trouvait dans son Beth Hamidrach aux Etats-Unis, l’un de ses disciples vint lui rendre visite, M. Jay Shottenstein, connu de tous les élèves des maisons d’étude, pour son célèbre Shass édité par Artscroll, étudié par des centaines de milliers de Juifs dans le monde entier. Jay, qui a acquis son monde futur grâce à sa contribution à cet extraordinaire Chass, était à l’écoute de la demande du rav d’aider les élèves en Tora et contribuait généreusement à diverses œuvres, dont une majeure partie était donnée en secret et dans la discrétion. Le rav Pinto était au fait de la vaste contribution de l’aide et de l’action en faveur du monde de la Tora. Au terme du cours du rav, le rav Pinto s’adressa subitement à Jay tout en mettant la main dans la poche en lui tendant la montre, en lui expliquant quelle montre il tenait en main.

«Jay », relata l’une des personnes présentes, « est un habile homme d’affaires, et il sait reconnaître une bonne marchandise. On pouvait deviner son enthousiasme et son choc à la vision de la montre, lorsqu’il quitta la pièce, ému, la montre en main. «  Je ne souhaite pas utiliser ce cadeau pour mon action pour la gloire de mon illustre grand-père et l’honneur de la Mitsva du respect accordé à la mère », déclara le rav Pinto, « et il est tout naturel qu’un homme comme toi, Jay, un si grand philanthrope du monde de la Tora, hérite de la montre extraordinaire de Baba Méir…»

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