Le crime de Christophe Colomb et le siècle de la déraison

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La chronique de Michèle MAZEL

Dans le cadre du mouvement de protestation «Black Lives Matter – Les vies noires comptent» des manifestants en colère ont fait tomber dimanche de son piédestal l’imposante statue de Christophe Colomb, érigée dans la ville de Baltimore, et l’ont précipitée dans les eaux du port. Un peu partout à travers les États-Unis des monuments en son honneur avaient déjà subi le même sort.  Pourtant l’intrépide navigateur n’a jamais eu d’esclaves et n’a jamais, que l’on sache, exprimé d’opinion négative sur les populations d’Afrique. Quel crime lui est-donc imputé ?

Et bien la découverte de l’Amérique justement. Dans un raisonnement qui aurait ravi les sophistes, de nombreux membres du mouvement soutiennent que c’est cette découverte qui a ouvert la voie à l’arrivée de l’homme blanc – nous y voilà – avec à la clé le début d’une entreprise colonisatrice qui a entraîné le massacre des tribus indiennes indigènes et quelques siècles plus tard, institué un esclavagisme reposant sur le sinistre commerce d’Africains arrachés à leurs familles et transportés de force vers le nouveau monde. En un raccourci saisissant, on pourrait même soutenir que c’est grâce à Christophe Colomb que Donald Trump est à la Maison Blanche car si les blancs n’étaient pas arrivés…

Inutile de répliquer que si ce n’avait pas été lui, c’en aurait été un autre, ou même que si le continent s’appelle Amérique c’est parce qu’un certain Amerigo Vespucci en avait déjà découvert les côtes avant Christophe Colomb. Inutile surtout de souligner que ni l’un ni l’autre ne peuvent être jugés responsables de ce qui a pu arriver par la suite. Avec des «si» on mettrait Paris dans une bouteille, dit-on. Tandis qu’une partie de l’Amérique brûle ce qu’elle a adoré – les héros de son indépendance, comme Georges Washington et les artisans de l’émancipation des noirs comme Abraham Lincoln et le général Grant qui a battu les forces de la Confédération, le révisionnisme historique fait aussi des ravages en France. Voltaire, dont la verve caustique ne respectait rien, ne serait plus digne d’avoir un lycée en son nom ; il en serait de même pour Jules Ferry, père de l’école publique gratuite et laïque, mais hélas artisan de la grande aventure coloniale de la France.

Ce tableau d’une «bienpensance» dévoyée ne serait pas complet sans mentionner deux récents développements. D’une part les efforts du BDS pour impliquer Israël en soutenant, sans aucun fondement, que les polices américaines mettraient en application des techniques apprises de la police israélienne.  De l’autre, l’entreprise de récupération du mouvement Black Lives pour l’associer au conflit israélo-arabe.

Curieuse mansuétude de ces descendants d’esclaves qui semblent vouloir ignorer – à moins qu’ils ne l’ignorent vraiment – le rôle joué par ce qu’on appelait alors les négriers arabes dans la traite des noirs dont ils étaient les véritables artisans en Afrique.

D’ailleurs des marchés aux esclaves se tiennent encore en Libye, comme l’ont révélé au monde les images captées par la chaine CNN  en 2017 ; les malheureux paradés sur ces marchés n’étant autres que des Africains fuyant la misère de leur pays et tentant de gagner l’Europe, tombés aux mains de passeurs sans scrupules.

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