L’espion du Hezbollah devenu cultivateur ‘harédi

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L’histoire de Sinai a commencé il y a 36 ans, alors qu’il était éleveur de bétail âgé de 19 ans, Ibrahim Yassin, qui avait une femme enceinte nommée Diba. Ibrahim était absent de la maison en train de faire paître son bétail lorsque Diba a accouché sans lui.

Avraham Sinai et son ancien chef des FDI, Tzahi Bareket (Photo: Aviahu Shapira) (Photo: Avihu Shapira)

Avraham Sinai et son ancien responsable au sein de Tsahal, Tza’hi Bareket (Photo: Aviahu Shapira)

En l’absence de sage-femme ou d’hôpital, la famille Yassin s’est tournée vers les forces de Tsahal qui occupaient le sud du Liban, pour obtenir de l’aide. Tzachi Bareket, officier de l’unité de renseignement de l’armée israélienne et lui-même agriculteur, a conduit ses forces dans le village pour apporter son aide, enfreignant plusieurs règlements de l’armée.

Ni Tza’hi ni Ibrahim n’imaginaient que ce serait le début d’une longue amitié.

Même maintenant, Bareket reste attentif à ne pas révéler les détails des opérations passées. Il a accouché le bébé ce jour-là en 1983, puis a organisé le transfert de la mère et de l’enfant à l’hôpital en Israël.

“Je suis rentré à la maison”, se souvient Sinaï, “et on m’a dit que ma femme venait d’accoucher. Deux jours plus tard, mon frère, qui faisait partie de l’armée sud-libanaise soutenue par Israël, l’a ramenée à la maison”.

Bareket et Sinaï ne s’étaient pas encore rencontrés, mais l’officier du renseignement de Tsahal était toujours à la recherche de Libanais qui pourraient aider les Israéliens dans leur combat.

“Un jour, j’ai aperçu un éleveur de bétail”, explique Bareket. “Dans ce domaine, nous avons appris à repérer les personnes avec lesquelles nous pourrions travailler. Je savais qu’il pourrait bien convenir à ce rôle. Au cours de notre conversation, il a réalisé que j’étais l’Israélien qui avait mis son fils au monde. “

Sinaï – qui détestait les militants palestiniens du sud du Liban – a commencé à travailler pour l’armée israélienne.

“Les Palestiniens contrôlaient la région et ils nous terrorisaient”, dit-il. “Une fois, ils ont allumé un feu dans la cour de quelqu’un, l’ont brûlé vif et l’ont mangé devant mes yeux. Ils amenaient des hommes dans des villages pour tourmenter des femmes. Ils ont tué une fille en l’attachant à deux voitures et en les conduisant dans des directions opposées.”

Ibrahim Yassin, le jeune homme qui deviendrait Avraham Sinai (Photo: Orot)

Ibrahim Yassin, le jeune homme qui allait devenir Avraham Sinai (Photo: Orot)

Sinaï a déclaré que sa décision de travailler pour Israël était en fait sa manière de s’aider lui-même et de délivrer sa communauté.

“Quand j’ai appelé Tza’hi pour lui parler de terroristes, je savais qu’ils seraient chassés de mon village et cela me convenait parfaitement”, dit-il.

“Je considérais que Tza’hi et moi étions des partenaires. Je lui ai donné des informations précieuses et il m’a donné du carburant pour ma voiture et un document afin que je ne sois pas arrêté aux points de contrôle. Il m’a remis un fusil saisi aux Palestiniens. Chaque fois que quelque chose me dérangeait, j’avais quelqu’un vers qui me tourner. “

Après deux ans et demi en tant qu’officier-traitant, chargé des liaisons avec Yassin, Bareket a été réaffecté dans une autre unité, mais les liens entre Sinaï et Israël n’ont pas échappé à l’attention des groupes terroristes au Liban, y compris le Hezbollah.

En 1985, Sinaï a été enlevé à son domicile par des agents d’organisations terroristes. Il a été relâché des mois plus tard, mais pas avant que son fils âgé de 8 mois ait été brûlé vif sous ses yeux.

À ce jour, il ne peut pas oublier les interrogatoires sous la torture menés par Imad Mughniyah, un haut responsable du Hezbollah soutenu par l’Iran et liquidé – apparemment lors d’une opération commune entre la CIA observatrice et le Mossad acteur de l’explosion qui lui a emporté la tête – le 12 février 2008, dans le quartier très surveillé de l’Ambassade d’Iran à Damas, après avoir fêté la révolution de ce régime sanguinaire.

“Le jour où mon fils a été brûlé vif, j’avais perdu connaissance à la suite des coups reçus, pour me réveiller ensuite et voir le feu”, explique Sinaï.

Imad Mughniyah, célèbre responsable du Hezbollah

Imad Mughniyah, célèbre responsable du Hezbollah

Il dit que sa femme lui a dit de ne plus parler du bébé. “‘La porte est fermée, m’a-t-elle dit.”

Pendant des mois, Sinaï s’enfonça dans une profonde dépression et c’est son père qui l’a lentement ramené à la vie.

Un désir de vengeance a incité Sinaï à appeler Tza’hi, son ancien responsable au sein de Tsahal.

“Ma femme est venue me voir”, dit Bareket, “et m’a dit que Sinaï voulait continuer à travailler avec nous. Il n’a pas pu me contacter directement à ce moment-là.”

Sinaï: “Sous la protection des Israéliens et en pleine connaissance de cause de leur côté, je suis entré dans les rangs du Hezbollah. J’ai vécu dans une ville qui appartenait pratiquement au Hezbollah (mais) ils ne connaissaient pas mes liens avec Israël. Mon responsable à l’époque était Yoav ‘Poli’ Mordechai, qui deviendra plus tard le porte-parole de Tsahal. “

Ses relations avec Mordechai s’étendent également au-delà de leur mission. “Poli m’a beaucoup aidé”, dit Sinaï. “Quand ma fille est morte peu de temps après sa naissance, Poli a envoyé à ma femme des injections pour que la prochaine grossesse se passe bien.”

Sinaï se souvient avoir été emprisonné en Syrie en 1989 et avoir passé un an en prison pour activité suspecte. “J’ai été détenu dans une prison d’État afin que mes parents puissent venir me rendre visite”, dit-il. “Mais la torture était tout aussi grave.”

Après sa libération, Sinaï a continué d’espionner le Hezbollah pour le compte d’Israël pendant encore sept ans. Il affirme avoir fourni des informations qui ont conduit à l’assassinat de l’ancien dirigeant du Hezbollah, Abbas Musawi.

Abbas Musawi, prédécesseur d’Hassan Nasrallah

Ibrahim Yassin, espion israélien

Ibrahim Yassin, espion israélien

Après un grand nombre d’éliminations de ses principales personnalités, le Hezbollah a commencé à traquer des espions et, en 1997, Sinaï et sa famille ont été exfiltrés clandestinement du Liban.

Les expériences de vie de Sinaï le rapprochent de la religion. Au cours de son séjour au Hezbollah, il s’est intéressé au Coran et, lorsqu’il est arrivé en Israël, il s’est rendu à la synagogue proche de chez lui. En 2001, il a décidé de se convertir au judaïsme.

Sinaï vit depuis deux ans séparément de son épouse, Ziva. Ellese nommait encore Diba quand elle l’a suivi hors du Liban, laissant sa famille derrière elle, et elle a changé son prénom lorsqu’elle a également choisi de se convertir au judaïsme.

Aujourd’hui, seuls son fils aîné, ‘Haim, et sa plus jeune fille, Sara, sont orthodoxes. ‘Haim, né Mohammed, avait 14 ans quand ils sont arrivés en Israël. Le reste de ses sept enfants ont tous une vie laïque.

Sinaï vit maintenant d’une pension de l’armée israélienne et donne des conférences sur sa vie d’espion du Hezbollah au service des renseignements israéliens. C’est un ami proche du grand rabbin de Safed, rav Shemuel Eliyahu. Il y a quatre ans, il a même présenté sa candidature (sans succès) pour siéger au conseil municipal.

Avraham Sinai avec son ami proche Safed, le grand rabbin Shmuel Eliyahu (Photo: Orot)

Avraham Sinai avec son ami proche à Safed, le grand rabbin Shemuel Eliyahu (Photo: Orot)

L’histoire de la vie de Sinaï a attiré l’attention du réalisateur israélien Itamar Chen, qui l’a convaincu de filmer son étonnante légende. Le documentaire ” Le rabbin du Hezbollah ” est présenté cette semaine au festival DocAviv de Tel Aviv.

“Avraham a certaines caractéristiques de Forrest Gump”, a déclaré Chen. “C’est un homme sensible qui a traversé des situations inimaginables.”

Dans la caravane qu’il appelle maintenant sa maison, Sinaï affirme que son histoire ne se résume pas à ce qu’il avait précédemment révélé, notamment dans le documentaire de Chen.

“Mes enfants ne savent pas tout de moi”, dit-il. “Mes fils me respectent à cause de mon travail avec l’armée ; ils ont également servi dans Tsahal. Il y a beaucoup de choses dans le film dont ils ne savaient rien. Même ma femme n’a jamais su les détails de ce que j’avais fait.”

Bareket opine de la tête, alors qu’il regarde une vieille photo de leur période ensemble au Liban. “Sinaï a fait des choses que les combattants des unités militaires d’élite ne font pas”, dit-il.

Les deux hommes ont renoué leur amitié peu de temps après l’arrivée de Sinaï en Israël en 1997.

“J’essayais de le contacter, mais je savais seulement qu’il s’appelait Tza’hi”, dit Sinaï. “Puis, lors d’une fête musulmane, il m’a appelé pour me souhaiter de bonnes fêtes.”

Avraham Sinai aujourd'hui (Photo: Haim Sinai)

Avraham Sinai aujourd’hui (Photo: Haim Sinai)

Bareket : “Nous ne sommes pas amis, nous sommes frères. Quand il donne des conférences dans tout le pays, je viens pour faire une brève introduction. Seulement à ce moment-là, il entre avec sa tenue orthodoxe et tout le monde est choqué. Il donne des conférences à la communauté du renseignement et il ne parle librement que lorsqu’il s’adresse à une unité classifiée. “

L’ancien espion est un personnage insolite, plein de contradictions. Il est à la fois très sociable et aime errer dans le désert pour chercher la solitude et la prière.

En ce moment, il construit des ruches et un élevage de chèvres et de poulets.

Etty Abramov | Publié: 05.31.19, 18:51

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