L’hypocrisie du monde face à la conduite russe

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Editorial du Yated Nééman, 28 mars

 

Le monde occidental n’est plus prêt à se taire face aux délits du Président russe, Poutin. Tant qu’il ne faisait, avec Assad, que de tuer femmes et enfants en Syrie, sous le couvert d’une lutte contre le terrorisme, le monde s’est tu. Tant que les avions syriens, sous la protection des appareils du grand frère de Moscou, ont lancé des tonneaux pleins de produits chimiques et ont provoqué la mort de milliers de citoyens innocents, le monde a juste cliqué de sa langue, l’ONU s’est tue, et son « Conseil des Droits de l’Homme » en a fait de même, lui qui est occupé depuis des années à condamner Israël pour ses « crimes » envers les Palestiniens, et n’a pas le temps visiblement de traiter de la mise à mort d’un demi million de citoyens syriens. Ne parlons pas du Conseil de sécurité de l’ONU où toute tentative de condamner la Syrie – et non la Russie – reçoit un veto stricte de la part de la Russie, et parfois aussi de la Chine.

Mais quand les envoyés russes ont osé empoisonner l’espion russe en terre britannique, là le monde éclairé a accepté de se lever de sa couche. Il n’est pas admissible que la main de la Russie puisse être lancée en direction de la royauté britannique – alors que cette main fait tout ce qu’elle entend au Moyen Orient. Il faut réagir. Il n’est pas évident que Poutin ait estimé à sa juste mesure les réactions qu’allaient entrainer l’empoisonnement de l’espion double et de sa fille. Il se peut qu’il espérait que la part qu’a prise son pays dans cette tentative de meurtre reste ignorée, ou qu’au pire, si elle était dévoilée, cela n’amènerait pas les pays occidentaux à se brouiller à la suite de l’assassinat d’un quelconque espion russe.

Il a fait erreur. Thereza May, la cheffe du gouvernement britannique, a réagi avec une virulence exceptionnelle face à cet acte russe. Cela a commencé par l’expulsion d’espions russes se faisant passer pour des diplomates, puis par l’ajout d’autres nations occidentales qui se sont alignées sur la réaction anglaise. Le premier à le faire a été le Président des Etats Unis, Trump, qui a annoncé l’expulsion de 60 diplomates russes.

N’oublions pas que voici quelques jours ce dernier a béni Poutin pour son « succès » aux élections, contrairement aux conseils de son entourage. Trump savait déjà alors que la Russie s’est rendue coupable de cet acte, mais cela ne l’a pas empêché de lui envoyer ses félicitations pour ces « fake-élections ». Que s’est-il passé chez Trump ? On veut dire que, derrière cette critique, se cache la volonté du Président de faire oublier les soupçons qui planent sur lui quant à une intervention russe en sa faveur lors des récentes élections, quand l’enquête bat son plein actuellement. Trump pense qu’une brouille avec Poutin lui servira à écarter tout doute à cet égard.

Quelle qu’en soit la raison, cela ne changera pas le fait que le régime américain, avec de nombreuses autres nations du monde occidentale, condamnent avec force cette intervention russe. Elle est grave pour deux raisons : d’abord parce qu’elle représente une tentative de crime d’une personne qui bénéficie de la protection du pays dans lequel il se trouve, puis l’utilisation d’un gaz mortel, que seule la Russie possède. En Occident, on comprend qu’il est interdit de se taire face à un tel acte, car il ouvre devant tous les groupes de terroristes la possibilité d’utiliser de tels moyens, lesquels peuvent provoquer la mort de grandes masses de gens.

 

Israël n’a pas pris part à cette « fête ». Sa réaction était mineure, ne comportant même pas la mention de l’intervention russe dans cette affaire. De plus, Moscou a félicité le gouvernement israélien pour sa réaction, et cela a irrité les anglais…

Inutile de s’en émouvoir : les votes britanniques à l’ONU et au Conseil de sécurité dans les différentes décisions contre Israël ne sont pas moins énervants.

Le Ministère des Affaires étrangères israélien a bien certainement fait de ne pas prendre part à cette chorale : il est probable que la raison essentielle en est les relations proches entre Netaniahou et Poutin, qui ont une très grande importance dans notre secteur, du fait de la présence massive des forces russes en Syrie. Netaniahou a besoin d’entretenir de bonnes relations avec Poutin aux heures de crise, et cela aurait été dommage de se brouiller avec lui à cause de cet espion double.

Mais il y a à cela une seconde raison, qui ne tombe pas en importance par rapport à la première : quand les Anglais se brouillent avec les Russes, il n’y a pas lieu de craindre que les citoyens anglais vivant en Russie soient inquiétés. Quand Trump renvoie les diplomates russes, il n’a pas besoin de prendre en compte le sort des Américains résidant en Russie, car personne n’établira de relation entre la conduite du gouvernement américain ou anglais, et les citoyens de ces origines se trouvant sur la terre de Russie. En revanche, si le gouvernement israélien se brouille avec la Russie, il y a lieu de craindre pour la sécurité des communautés juives se trouvant dans ce pays.

C’est ainsi que le monde se conduit depuis toujours : un mauvais acte commis par un Juif esseulé a toujours rejailli sur l’ensemble de la communauté juive, même si elle n’a aucun rapport avec ce méfait. De même, du fait de la conduite de l’Etat d’Israël, les Juifs du monde entier peuvent être inquiétés, même sans y avoir été le moindre du monde impliqué. Cette responsabilité collective, réelle depuis que le peuple juif a été créé, a ses implications politiques également, pour le bien et pour le pire. Cette responsabilité collective force chaque Juif, là où il se trouve, de penser aux autres frères juifs et à s’occuper d’eux matériellement et spirituellement, en particulier en cette veille de Pessa’h, la fête de la sortie du peuple du joug de chair et d’os, pour se lancer dans le service de l’Eternel, qu’Il soit béni !

 

 

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