Mémorial des déportations de Marseille : polémique autour de l’absence de noms de déportés

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Une inauguration et déjà des polémiques ! Après sept ans de fermeture pour des raisons de travaux et de sécurité, l’ancien Mémorial des camps de la mort, installé dans un blockhaus sanitaire allemand à l’entrée du Vieux-Port de Marseille (Bouches-du-Rhône), a enfin rouvert ses portes jeudi sous le nom de « Mémorial des déportations ».

Sur trois étages, il propose un parcours mémoriel gratuit sur les traces des Marseillais victimes du nazisme, avec photos, vidéos, panneaux explicatifs et dix-neuf « parcours de déportation » choisis par un comité scientifique composé d’historiens. En janvier, il devrait être complété par un mur portant les noms des Marseillais déportés en Allemagne, dont la majorité ne sont pas revenus. Une première liste, provisoire, a déjà été placardée à l’intérieur du blockhaus.

« Il y a mon nom et celui des membres de ma famille », témoigne Denise Toros-Mater, arrêtée comme juive à 16 ans dans le garage familial en avril 1944 par la police française et déportée à Auschwitz avec son frère ainsi que sa grand-mère, sa mère et son père ancien combattant de 14-18 qui n’en reviendront pas. « Pour la mémoire et pour que cela n’arrive plus, ce type de musée est essentiel », dit-elle.

Les déportés au camp de Fréjus «oubliés»

La liste de noms de déportés, revendiquée comme incomplète, n’est pas exhaustive et pourra évoluer. Mais des survivants et descendants de la rafle du Vieux-Port du 24 janvier 1943, au cœur des vieux quartiers de la petite Naples, qui seront dynamités par les nazis avec le soutien de Vichy – ce qui a été reconnu comme « crime contre l’Humanité » par la justice française au printemps dernier –, estiment que « la souffrance des 12 000 habitants envoyés dans un camp de Fréjus n’est pas assez mise en avant » et demandent « la reconnaissance de leur déportation ».

« Je suis en colère ! Je me suis aperçu que mon père n’était pas dans la liste alors qu’il est mort au camp de Sachsenhausen-Orianenburg, enrage Josette Chobet-Lombardi, 87 ans, dont le père Marius avait été envoyé du camp de Fréjus en Allemagne, dénoncé par un voisin collaborateur qu’il avait frappé peu de temps auparavant alors qu’il lui proposait de le payer pour dénoncer des Juifs. J’ai réussi à le faire inscrire in extremis, mais c’est scandaleux. Si on n’avait pas mis son nom, cela aurait été comme si on l’avait tué une seconde fois. Je pense aussi aux huit cents autres habitants des vieux quartiers déportés en Allemagne. »

« J’ai connu le travail forcé Ludwigshafen pendant plus de deux ans, témoigne Albert Corrieri, 97 ans. J’ai été arrêté le 13 mars 1943 à proximité du Vieux-Port, à 21 ans, et je regrette que mon nom ne soit pas dans le Mémorial et au-delà les victimes du STO. Je me considère comme un ancien déporté vivant. »

La distinction entre déportés et internés

L’association « Saint-Jean 24 janvier 1943 » qui regroupe les victimes de cette rafle et leurs descendants a écrit une lettre de protestation au directeur du Musée d’histoire de Marseille ainsi qu’au maire Jean-Claude Gaudin, sans réponse depuis un mois.

« On ne peut pas mettre au même niveau les déportés vers les camps de concentration et d’extermination et les évacués et internés, même si ce qu’ils ont connu était très dur », justifie l’historien et membre du comité scientifique Robert Mencherini. « La logique de ces déportations est très différente. La majorité des évacués sont rentrés à Marseille ensuite alors qu’on ne revenait pas des camps. »

Source www.leparisien.fr

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