Rabbi Moché ben Na’hman – LE RAMBAN

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Le Ramban : 1194 (Gérone) – 11 nissan 1270 (Acco)

La présente hiloula nous amène à la période la plus importante du judaïsme espagnol, et à l’un des maîtres les plus marquants du judaïsme médiéval. Le Ramban est un important commentateur de la Guemara, tant dans son commentaire que dans ses notes répondant à celles du Ba’al hamaor sur le Rif, et son ouvrage sur le ‘Houmach est incontournable. Il est également l’un des maîtres de la Kabbale, voire le premier et le plus important maitre en la matière, et il rapporte, en de nombreux endroits de son commentaire sur le ‘Houmach, des sources prises dans le Zohar.

Il est connu des auteurs non-juifs sous le nom de Na’hmanide, fils de Na’hman, ou encore Bonastruc ça Porta en catalan.

Le Ramban est né à Gérone, au nord-est de l’Espagne, dans une illustre famille de rabbanim : il est lui-même petit-fils de rabbi Yits’haq ben Reouven de Barcelone et le cousin de rabbénou Yona. Il s’illustre, et publie ses premiers ouvrages à 16 ans. Ses ouvrages sur la Guemara sont profondément influencés par l’école française des Tossafistes – on rapporte en son nom cette affirmation : « Les Rabbanim de France ont rallié la plupart des Juifs à leur approche. Ils sont nos maîtres en Talmud, et c’est vers eux que nous devons aller pour nous instruire. »

Grand admirateur du Rambam, il se met néanmoins en porte-à-faux des philosophes juifs de son temps. Le Guide peut expliquer les récits bibliques et prophétiques comme des allégories et les miracles comme des phénomènes naturels, alors que le Ramban prescrit de les lire dans leur sens simple.

Dans les controverses autour du Rambam, il proposa une voie de compromis : casser le bannissement portant sur ce grand maître, mais maintenir, voire renforcer, celui sur ses œuvres.

C’est son commentaire de la Tora qui est son œuvre principale. Il l’a rédigée en Espagne mais l’a complétée à Acco, au terme de sa vie. Rapportant et critiquant les divers auteurs qui l’ont précédé, surtout Rachi et le Ibn ‘Ezra, ainsi que le Rambam, son commentaire est à première vue construit comme un super-commentaire de Rachi, permettant une compréhension en profondeur du texte de la Tora, ajoutant souvent une dimension kabbalistique aux notions qui y sont apparentes – bien que le Ramban fasse tout pour éviter de dévoiler par trop des connaissances de cette source.

Son commentaire est considéré comme étant fondamental pour qui veut connaître la voie de la Tora.

Il est rav de Gérone, ensuite chef spirituel de la communauté juive de Catalogne, et prend une place importante dans la vie politique de sa province. La quiétude dont il jouit est toutefois brisée lorsque, en 1263, il est choisi pour une disputation en présence du roi avec Pablo Christiani, Juif renégat, devenu frère dominicain (et responsable d’inventions telles que la rouelle), déjà connu pour avoir tenté de convertir la communauté juive de Provence.

La démarche de Christiani consiste à utiliser les sources talmudiques afin de prouver la vérité de la foi et du message chrétien. Mais le Ramban remit les choses dans leur contexte, prouvant que si les rabbanim ne s’étaient pas convertis, c’est qu’ils n’avaient pas accepté la conception chrétienne.

La disputation fut abrégée à la demande pressante des Juifs de Barcelone craignant d’exciter le ressentiment des Dominicains, et se termina sur la victoire éclatante de leur rav, le roi allant jusqu’à lui faire don de 300 maravedis en signe de respect. Cependant, le clergé dominicain prétendit avoir remporté la rencontre. Le Ramban fut obligé de relater la dispute par écrit. Pablo Christiani s’en servit et sélectionna des passages jugés blasphématoires envers la chrétienté et entraînera la mise en accusation du maître. Les Dominicains obtinrent que ses livres soient brûlés et qu’il soit exilé pour deux ans, ce qui se commua rapidement en bannissement à perpétuité.

Le rav quitta donc le Royaume d’Aragon et séjourna trois ans quelque part en Castille ou dans le Sud de la France. En 1267, cherchant refuge dans les pays musulmans contre les persécutions des chrétiens, il émigra en Erets Israël, accomplissant là un souhait très profond.

Il s’installa tout d’abord à Jérusalem, où il établit dans la vieille ville une synagogue qui existe encore de nos jours et qui est connue sous le nom de la synagogue du Ramban – restaurée récemment. Son passage revivifia la vie communautaire juive à Jérusalem, que la répression des Croisés et les incursions mongoles avaient interrompue. Il passa ensuite à Acco, où il exerça une grande activité dans la diffusion des études juives. Il réunit autour de lui un cercle d’élèves, et des foules venaient l’entendre, même depuis Babel.

Au cours de son séjour de trois ans en Terre sainte, le Ramban maintint une correspondance avec sa famille. On a de lui une lettre destinée à son fils Na’hman, dans laquelle il décrivait la désolation de la ville sainte, où il n’y avait plus, selon lui, que deux habitants juifs – deux frères, teinturiers de leur état. Dans une lettre ultérieure écrite à Acco, et qui nous est restée comme l’Épitre du Ramban, il conseille à son fils de cultiver l’humilité, qu’il considère comme la première des vertus.

Il mourut en 1270 après avoir dépassé l’âge de soixante-seize ans. Il y a désaccord quant au lieu réel de sa sépulture. Certains disent que ses restes ont été enterrés à Haïfa, près de la tombe de rabbi Ye’hiel de Paris – qui a lui aussi défendu le Talmud, dans le procès intenté par Louis IX. Ce site nous est malheureusement inconnu. D’autres disent qu’ils se trouvent à ‘Hévron, comme il l’avait lui-même demandé, à côté du bâtiment abritant les sépultures des patriarches et des matriarches.

Le Rachba et le Rea font partie de ses élèves, lesquels donneront à son enseignement une grande place. Le Rachba écrit à son égard qu’on n’a pas trouvé une personnalité lui équivalant en matière de sagesse et de crainte de la faute. Le Rivach rapporte que les Juifs de Catalogne suivent ses instructions comme celles de Moché rabbénou.

Il a eu plusieurs fils dont les noms sont connus, et quelques filles.

Par Ya’aqov Manela

Kountrass numero 174 

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