Sans Papa-Maman

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On chahute.

« Vas-y David, fais un peu de bruit, pour attirer son attention !

– Avec quoi ?

 lion– Je ne sais pas… Choisis n’importe quoi dans le carton de jouets ! Ou pousse des rugissements, de lion. »

David éclate de rire. Moi aussi. Il prend une raquette et tape sur un des petits hochets de Sara.

Nous sommes censés dormir dans nos chambres, au premier étage. Yona lit tranquillement sur le fauteuil, en bas.

« Elle arrive ! Elle arrive ! Haha ! Tous à vos postes ! »

Yona s’approche des escaliers pour voir ce qui se passe. Nous nous retenons de rire. Nous attendons qu’elle monte quelques marches, et là, nous jetons dans sa direction des chaussures, un balai et des peluches !

Les soirs où Yona est là sont les plus amusants ! Dommage qu’ils soient si rares !

Cette fois-ci, Papa et Maman sont partis accompagner Méïr à l’hôpital. Il est tombé du lit. Même pas d’un lit superposé ! D’un lit simple ! A moins d’un mètre du sol ! Mais il est « mal tombé », dit Maman. Je ne savais pas qu’on pouvait « bien tomber » ou « mal tomber ». Là, il est tombé sur le coude, et apparemment, cela s’appelle « mal tomber ». Quoi qu’il en soit, aux urgences, les médecins ont dit à Papa et Maman : « Direction l’hôpital ! »

Une chance que Yona était disponible ! Qu’aurions-nous fait ?

Dès qu’elle est arrivée, elle nous a donné à manger ce que Maman avait préparé. Mais nous étions excités, et le repas a été une vraie débandade. Yona n’était pas très contente, mais elle est tellement gentille ! Elle ne dit rien. Elle essaye de nous calmer, nous raconte des histoires, sourit, et bien souvent, elle rit avec nous de nos bêtises… C’est notre baby-sitter préférée !

Le lendemain matin, c’est Esther qui me réveille.

« Yoël, Yoël ! Papa et Maman ne sont pas rentrés de la nuit ! Yona nous prépare le petit-déjeuner ! »

Jamais Yona n’est restée dormir à la maison ! Papa et Maman reviennent toujours dans la soirée !

ecoleCette fois-ci, c’est donc elle qui nous fait partir à l’école, malgré nos rires continuels ! Nous avons décidé d’échanger nos prénoms, David et moi. Quand Yona appelle David, c’est moi qui réponds ! Et lorsqu’elle me demande de mettre mes chaussures, David lui dit : « J’ai déjà mis mes chaussures ! » Yona finit par comprendre, et donne des ordres plus clairs, sans nommer, mais en montrant du doigt : « Toi, mets ton sandwich dans ton cartable ! »

Nous partons enfin, et Yona reste à la maison pour garder bébé-Sara jusqu’à l’arrivée de mes parents. Ils ne reviennent finalement qu’en après-midi, un peu après notre retour de l’école !

 

Retour d’hôpital

bras dans le platrePapa et Maman semblent très fatigués. Ils n’ont sûrement pas dormi de la nuit… Méïr a le bras dans le plâtre, et il part immédiatement se coucher dans son lit, sans dire un mot. Le pauvre…

« Je ne sais comment te remercier, Yona ! Tout s’est bien passé ?

– Oui, très bien !

– Les enfants n’ont pas été trop durs ? – Non ! Ils ont été parfaits ! »

Quoi que nous fassions, Yona dit toujours à Maman que nous avons été très gentils. C’est peut-être aussi pour cela qu’on l’aime beaucoup…

Quand elle repart chez elle, Maman me demande :

«  Yoël, vous avez été sages ?

– Euh… Presque  !

– Oh, non ! Vous avez fait les coquins ? La pauvre, elle est tellement sympathique…

– Oui, elle est très très gentille !

– Et encore plus que tu ne le crois, Yoël ! Sais-tu qu’on doit payer une baby-sitter ?

– Bien sûr !

– Eh bien elle a refusé que je la paye  !

– Ah bon ? Mais pourquoi ?

– Elle a dit que cela ne s’appelle pas faire du baby-sitting, parce que l’on n’est pas sortis s’amuser : on est partis à l’hôpital ! Cela s’appelle une urgence, et donc, de son côté, cela s’appelle nous rendre service et faire une mitswa ! D’ailleurs, lorsque je l’ai appelée hier pour savoir si elle était disponible, sa maman m’a dit qu’elle avait justement prévu de sortir… Pourtant, finalement, en apprenant que nous partions à l’hôpital avec Méïr, Yona a annulé sa soirée pour vous garder ! Ensuite, tu sais certainement que vers minuit, nous avons appris que Méïr devait être opéré, et nous avons demandé à Yona de rester dormir à la maison… Elle a accepté sans aucune hésitation… Je vais réfléchir avec Papa. Nous allons certainement lui offrir un petit cadeau… Elle le mérite, non ?

– Oh oui ! »

J’avais alors 7 ans… Aujourd’hui, j’en ai 12, et je m’en rappelle encore. A vrai dire, je repense à tout ce que nous avons fait à Yona ce soir-là. Je me revois en haut des escaliers, et je souris… mais je me sens aussi honteux. Pendant que Yona avait amassé des mitswoth, nous n’avions pas arrêté de la rendre folle…

Entre temps, Yona s’est mariée. Elle est partie à l’étranger. Je n’ai jamais eu le temps de lui demander pardon… Et de lui dire Merci. Alors Yona, si tu me lis, pardonne-nous nos enfantillages et nos petites rébellions… Merci d’avoir toujours dit du bien de nous, d’avoir ri avec nous,  d’avoir été présente lorsqu’on avait besoin de toi… Merci pour ces soirées de baby-sitting qui restent pour Esther, David et moi, des souvenirs inoubliables ! Je voulais que tu le saches…

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