Shmuel Trigano : les « Accords d’Abraham »: réflexions contrastées

Shmuel Trigano : les « Accords d’Abraham »: réflexions contrastées

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Illustration : les accords d’Avraham

Il est peut-être temps de prendre du recul pour réfléchir à la portée de la nouvelle donne considérable que représentent les Accords d’Abraham dans le paysage stratégique de l’Etat d’Israël. A la veille de la fin de l’ère Trump, l’évolution des choses y encourage, comme le montrent quelques développements récents: le Bahrein a repoussé une visite de Natanyahou à moins qu’il ne rende en même temps visite aux Emirats ; l’Arabie saoudite ne se décide toujours pas à reconnaître Israël car le roi Salman y serait opposé tant que la question palestinienne ne sera pas résolue tandis que l’héritier du Trône reste attentiste devant l’évolution probable de la position américaine et face au peu d’enthousiasme que soulève sa démarche dans son pays seulement où 30% de la population répond positivement à la possibilité d’échanges commerciaux avec Israël. On peut penser que ces pays souhaitent non pas faire marche arrière pour l’instant mais aller plus lentement dans la mise en œuvre de leur nouvelle politique.

Du point de vue israélien, il faut saluer tout d’abord le coup de maître tactique dont ces Accords sont le produit. Avec eux sont éliminés du jeu les Palestiniens et leur prise en otage du monde arabe, le front du refus arabe, l’Union européenne et son mantra assorti de menaces du « Deux peuples deux Etats »  tandis que la Gauche israélienne toujours prisonnière d’Oslo malgré son immense échec, se voit reléguée dans les marges.

Cependant, c’est uniquement avec la signature de l’Arabie saoudite que nous saurons si ces Accords sont un succès. Bahrein et les Emirats sont en fait les ballons d’essai que l’Arabie envoie pour jauger la situation. Ces Etats n’auraient jamais rien entrepris avec Israël sans son accord tacite. Mais déjà l’obtention de la bienveillance de l’Arabie saoudite, pays gardien des lieux saints de l’islam, constitue un développement très important. Entre temps, dans l’attente de cette signature, les Accords comportent une dimension stratégique très importante sur le plan régional: Israël a désormais des alliés militaires locaux face à l’impérialisme iranien et la guerre sainte menée par la théocratie iranienne en vue de l’exterination d’Israël est démentie.

La fin d’une configuration stratégique

L’existence de ces Accords s’inscrit dans la fin de l’ère soviétique et de la guerre opposant le monde libre au monde communiste. Le monde arabe avait été un des leviers les plus efficaces de l’agitation anti-occidentale, manigancée par le pouvoir soviétique sous le masque de l’ »anticolonialisme ». Les Etats arabes, créés de toutes pièces au lendemain de la décolonisation  se sont, sous la gouverne de l’URSS, rigidifiés en un seul bloc uni par la haine d’Israël et l’antisionisme.

La clef de voute de cette configuration fut l’identification à la cause palestinienne, construite de toutes pièces comme une cause « nationale » en lutte contre le colonialisme et non comme la guerre sainte qu’elle était. L’espion soviétique, passé à l’Ouest, Ian Pacépa, a révélé que c’est lors d’un congrès en Roumanie, en 1964, sous l’égide du KGB et de Ceausescu, que fut créée l’OLP, l’Organisation de Libération de la Palestine. Ce congrès décida d’un tournant stratégique: reconfigurer la cause palestinienne comme une cause « nationale » séduirait la gauche européenne du monde libre en proie à cette époque au tiers-mondisme et à l’anticolonialisme. Les Palestiniens devinrent le peuple élu de la gauche sous influence soviétique, incarnant ce que le Prolétariat mondial incarnait autrefois. C’est aujourd’hui l’islamogauchisme qui a hérité de cette fabrication.

L’effondrement du bloc soviétique provoqua en peu de temps l’effondrement du château de cartes des Etats arabes post-coloniaux et, avec eux, de cette stratégie. Les pseudo « printemps » arabes des années 2000 en donnèrent le spectacle qui ouvrit la voie à ue régression, au retour de l’islam politique et des Frères musulmans qui avaient prévalu, à l’époque pré-nationale (quand la oumma n’était pas comprise comme la nation mais comme la communauté islamique).

C’est dans cet arrière plan qu’il faut comprendre la disparition de l’élément palestinien dans la nouvelle configuration. Elle n’est pas forcément le résultat d’une politique délibérée mais l’effet de la constitution d’un nouveau paysage stratégique. Il est remarquable à ce propos que l’Union Européenne est aujourd’hui la seule puissance qui en soit restée à soutenir de façon quasi religieuse la cause palestinienne. Cela confirme la thèse du dissident soviétique Vladimir Boukovski. Devenu libre, il avait rejoint l’Europe à l’époque de son unification et découvert que l’UE, qui se constituait sous ses yeux, avait beaucoup de ressemblances avec ce que fut l’URSS, sur le plan de la nature du pouvoir et de la politique mais aussi de l’idéologie. Il inventa le cigle EUSSR à l’occasion d’un livre célèbre « EUSSR les racines soviétiques de l’intégration européenne » (2004)…

Les faiblesses des Accords

Ceci dit, il ne faut pas ignorer les faiblesses de ces Accords qui risquent, dans certaines circonstances non maitrisables mais de l’ordre du possible, de connaître une crise profonde. Les Etats arabes concernés sont faibles bien que riches: ils n’ont aucune profondeur stratégique et la population qui les peuple est étrangère (88,5 étrangers non citoyens dans les EAU; 54 % d’étrangers non citoyens, en majorité chiites, soutiens de l’Iran et hostiles aux Accords avec Israël au Bahreïn). Nul ne sait quel pourra être l’avenir de ces Etats: révolutions de palais, invasion, rébellion des étrangers locaux? L’Iran en ferait une bouchée. Faut-il aussi envisager la possibilité d’un retournement dans des circonstances particulières ? La culture de la Taqqia est ainsi à prendre aussi en considération. C’est une dimension culturelle permanente que toute stratégie réaliste doit prendre en compte et intégrer dans les scénarios du possible.

Mais il y a aussi des faiblesses du côté israélien. Le fossé gigantesque entre l’immense succès diplomatique de Netanyahou et la chasse aux sorcières dont il est l’objet dans son propre pays pose question sur la capacité des Israéliens à prendre la mesure de la réalité et de la hiérarchie des enjeux. Car la haine anti Netanyahou au sein même d’Israël sape objectivement la crédibilité de ces accords aux yeux mêmes des partenaires arabes. Le comportement de l’extrême gauche anarchiste (les « drapeaux noirs ») en la matière franchit une limite. Ce travail de sape du négociateur en chef de ces Accords, affaiblit considérablement le pays dans l’arène internationale, auprès de ses ennemis comme de ses « amis » occidentaux, ravagés, eux mêmes, par leur démission civilisationnelle et qui n’ont de cesse d’entrainer Israël dans leur déclin. La fin de la présidence Trump joue autant sur ce destin car le retour à la politique d’Obama qu’elle annonce promet des catastrophes au Moyen Orient. Il ne faut pas cependant négliger le coup de maître de Trump qui a assorti ces Accords historiques d’une vente  d’avions à ces pays et à l’Arabie saoudite pour des sommes considérables. Le business n’était pas absent de son opération. Ce qui veut dire aussi que si Trump avait conservé le pouvoir il n’aurait pas été impossible qu’il y ait une crise avec son partenaire israélien, notamment sur le plan de la politique en Judée Samarie comme on l’a constaté à un moment de la négociation.

La principale défaillance israélienne concerne justement cette vente d’avions furtifs qui fait peser une menace sur le capacité d’Israël à faire face à une guerre surprise dans laquelle il aura perdu la supériorité aérienne (qui seule peut compenser sa faible profondeur stratégique) ou dans laquelle une tierce partie se serait emparée de ces avions. Le débat public ne nous a pas dit si effectivement Netanyahou a accepté cette transaction comme prix à payer pour la reconnaissance d’Israël. En quel cas cela pourrait être un marché de dupes.

Le prix à payer est effectivement très lourd de conséquences: le gel de toute décision concernant les territoires de Judée Samarie, présentée par Netanyahou avant les élections comme « l’annexion », fait peser un nuage noir sur l’avenir des 500 000 Juifs installés dans ces territoires et implique l’hypothèse de la constitution d’un Etat palestinien irrédentiste et revanchard qui embrasera la région. A ce propos, il y avait par ailleurs quelque chose de désolant à entendre le premier ministre annoncer de façon lancinante l’annexion à venir sans jamais la mettre en œuvre et jusqu’à ne plus en parler. Pourquoi alors l’avoir annoncée? Il valait mieux se taire et éviter que le monde ne se ligue contre Israël pour aucun résultat.  Quelque chose d’autre relève de ce que je définirais comme une faiblesse interne: revendiquer la souveraineté sur ces territoires parce que les Etats Unis avaient donner le feu vert, en quelque sorte sous leur « procuration », n’est pas l’expression d’une souveraineté authentique qui implique une forte conviction personnelle et  qui n’a pas besoin d’autorisation d’une tierce partie pour s’énoncer et s’affirmer sur le terrain. Est-il vrai que Netanyahou a renoncé à toute évolution de la Judée-Samarie qui n’aille pas dans le sens de l’OLP? En tel cas, ces accords auraient consacré une terrible défaite, lourde d’ennuis à venir quand il faudra passer à un règlement.

Les vrais défis

Il y a une autre dimension qui est en jeu, de façon moins immédiate, mais à laquelle personne ne songe. La télévision israélienne et même Netanyahou nous présentent une vision « consumériste » des Accords: des milliers d’Israéliens attendraient de se rendre à Dubaï en touristes et d’autres d’y aller faire des affaires.  La communauté juive locale composée d’expatriés est l’objet de nombreux reportages… Bientôt on entendra parler des Israéliens qui veulent rejoindre le contingent d’étrangers pour y vivre et y faire des affaires… Dubaï comme Luna Park! C’est très affligeant d’aborder cet événement dans un tel esprit qui n’est pas à la hauteur de l’événement. Les choses sont en effet autrement plus complexes et lourdes à porter. J’évoquerais 3 problèmes capitaux impliqués par ces Accords qui bouleversent notre vision des choses et la stratégie de survie nationale d’Israël.

1) Comment gérer, dans une optique militaire et même spirituelle, le fait qu’Israël s’allie à des Etats arabo-musulmans dans une confrontation avec d’autres pays musulmans (l’Iran notamment), une confrontation qui n’est pas seulement politique et militaire mais aussi religieuse, sunnites contre chiites. Israël dans le camp chiite ? Quel impact pour la stratégie de l’existence juive nationale ? Qu’est ce que cela signifie sur le plan des finalités ultimes ? Quel impact sur le rapport à l’UE et aux Etats Unis ? Israël quittera-t-il le camp occidental ?

Quel impact rétrospectif sur les pays sunnites eux même dans leur rapport aux textes coraniques sur le statut des non musulmans, ce que restent les Juifs aux yeux du monde musulman?

2) Israël, désormais en paix avec ces pays, il est inévitable que Jérusalem et la mosquée El Aksa devienne une station du pèlerinage islamique. La Mecque n’est pas très loin géographiquement de Jérusalem (1200 km à vol d’oiseau, 1500 km par la route). Ce serait un développement cataclysmique par ses conséquences. Il est clair qu’Israël abandonnerait par la même toute ambition de retour sur le Mont du Temple et que Jérusalem deviendrait la destination d’immenses populations musulmanes qui voudront faire le pèlerinage au troisième lieu saint de l’islam après avoir fait leurs dévotions à La Mecque et Médine.

Comment Israël s’en sortira-t-il pour gérer ces flux de population considérables dont le plus grand nombre d’entre elles ne sont pas les « amies « d’Israël. Le statut de Jérusalem comme capitale d’Israël en serait – dans l’état des choses actuelles- profondément ébranlé. Cela rappelle  le tableau de ce qu’un écrivain égyptien des années 1970, Mouhamad Said Ahmad[1] définit comme la « stratégie de l’assimilation de l’entité sioniste dans l’espace arabo-oriental », la paix programmerait selon lui la fin d’Israël, étouffé dans l’étreinte mortelle d’un monde arabe devenu pacifique.

On sait par ailleurs (mais très peu) que le Mont du Temple est sous influence de la Turquie qui investit beaucoup en argent et en pèlerins et en orientation du Mufti. La Turquie a ainsi marginalisé la Jordanie qui était le « gardien des lieux saints musulmans » du temps qu’elle occupait (illégalement) la « Cisjordanie ». Israël souhaite mettre sur les rangs de l’administration du Wakf l’Arabie saoudite qui, seule, pourra rivaliser avec la Turquie sur le plan de l’argent et de la religion. On dit même que ce serait là le prix à payer pour la reconnaissance d’Israël par l’Arabie saoudite. Israël non seulement se retrouvera mêlé aux conflits intermusulmans sur l’autorité religieuse ultime mais encore il renoncera de facto à toute présence sur le Mont du Temple. Est-ce son combat ? Et surtout Israël est-il préparé à cela ? Je ne vois aucun début de réflexion sur ces sujets.

3) Le destin des territoires de Judée Samarie est la troisième inconnue de ces Accords. S’il est vrai que les assurances obtenues par les Emiratis, selon lesquelles un Etat palestinien sera créé et qu’il n’y aura aucune annexion israélienne, quelle sera la conséquence pour la survie stratégique et la continuité d’Israël (14 km de profondeur stratégique en son centre névralgique qui rend impossible la création d’un troisième Etat dans la Palestine mandataire, le deuxième Etat étant la Jordanie). Que deviendra surtout son lien à l’histoire et à l’identité juives et l’assomption pleine et entière de son destin et de sa vocation juives en rapport avec ces territoires historiques. Les Accords engagent-ils Israël à renoncer à son envergure souveraine et à n’être en définitive qu’un Etat refuge pour Juifs persécutés, et pas le surgeon de l’Israël éternel ? Condamné à ne pas porter les habits de son historicité ? Par ces Accords Israël se retrouvera sous une épée de Damoclès permanente. Quand cela se jouera, on saura alors seulement si ces Accords ont été ou non pour lui un avantage…

4)Le business potentiel attaché à ces Accords chasse leur enjeu historique et identitaire. A lire l’interview[2] de l’adjointe au maire de Jérusalem, Fleur Hassan Nahum, on est quelque peu abasourdi quant à l’impact politique de ses projets: « En tant qu’adjointe au maire de Jérusalem, je vois un immense potentiel de coopération dans le domaine du tourisme et surtout dans le domaine de la technologie. De plus, comme Jérusalem compte 40% d’Arabes parmi sa population, nous veillons à intégrer nos citoyens arabes dans le processus de normalisation. Ils ont un rôle clé à y jouer comme passerelle entre Israël et les pays du Golfe sur le plan du rapprochement culturel et de la langue. En raison des diverses facettes culturelles de notre ville, Jérusalem-Est pourrait ainsi devenir le carrefour économique du Moyen-Orient ».

En somme cela reviendrait à rediviser Jérusalem (redevenue « Jérusalem Est ») et à confier à sa population palestinienne, qui conteste la légitimité d’Israël sur toute la ligne, le soin de ses rapports avec les Emirats, sans compter que ces 40%  de la population de Jérusalem, dotés de cette vocation l’emporteraient sur le reste de la capitale, plutôt endormie économiquement : Jérusalem-Est deviendra le » carrefour économique du Moyen Orient », une ville en soi !

On voit incidemment que cette nouvelle configuration aura un impact sur la population arabe d’Israël. Leurs partis, dès le départ, ont tous refusé la paix avec les Emirats et l’ont condamnée pour trahison. Cependant il faut prévoir ce que sera l’importance des investissements émiratis probables  dans le secteur arabe israélien. Ils auront pour effet sans doute de créer une plus grande perméabilité de ce secteur de population aux influences venues du monde arabe.. Elle est déjà à l’œuvre avec la Turquie…

Une révolution mentale de l’islam ?

Il y a aussi un développement dont est grosse la logique des Accords d’Abraham et auquel personne ne pense mais qui pointe déjà dans les accusations de trahison qui fusent de plusieurs endroits du monde musulman à l’égard des deux Etats du Golfe signataires. Les retombées sur l’islam de ces évolutions seront en effet considérables. La reconnaissance d’Israël par les signataires arabes a objectivement (même si ce n’est pas subjectivement) des retombées théologiques considérables pour l’islam. Elle implique la caducité du statut de dhimmi auquel l’islam et la Chari’a assignent les non musulmans, une exclusion sociale qui a également une dimension territoriale et politique dans la mesure ou l’islam est, dans son propre enseignement, la seule légitimité sur terre, une légitimité qui a une traduction géographique et politique qui distingue entre « territoires de l’épée », champ de la guerre du Djihad, « territoires de l’islam », où règne la paix sous la gouverne de l’islam, et « territoires de l’armistice (temporaire) », ou le djihad est suspendu du fait d’un rapport de forces qui lui est défavorable. Or, Israël est un Etat souverain, soit le contraire d’une « oumma » dhimmie, le reconnaitre ne peut se faire selon la Chari’a que dans le registre de l’armistice ponctuel…  Cependant, si l’impact théologique se développe en résistant aux accusations de trahison de l’islam, c’est une véritable révolution culturelle et  politique qui s’annoncerait. Le tout dépendra bien sûr de la signature de ces Accords par l’Arabie saoudite, sanctuaire de l’islam, et donc engageant la religion dans cet acte politique.

On reste cependant très dubitatif devant la possibilité d’une telle évolution. L’islam pourra-t-il renoncer à cette doctrine politique et territoriale qui voue toute la planète à l’islamisation? Comment vont s’en sortir les Emiratis qui sont de manifestes représentants de l’islam? Il faut remarquer qu’il existe dans le Coran lui même la possibilité d’une deuxième version, moins négative, du rapport aux Juifs, ou plutôt à « Israël » par le biais de certains verset ambivalents. Je suis en la matière la thèse de l’orientaliste israélien Eliezer Cherki[3]. Le verset 2 du Coran de la sourate « Le voyage nocturne », 104, déclare en effet: « Nous (Allah) dîmes aux Enfants d’Israël : ‘Habitez cette terre puis lorsque la promesse dernière se réalisera, (la fin des temps), nous vous ramènerons en foule mélangée’». La sourate 5 de la table servie, verset 21: « Ô mon peuple (Israël), entrez dans la Terre sainte qu’Allah vous a prescrite ». Et sur le judaïsme: « Et nous avons donné à Moise le livre dont nous avions fait le guide pour les Enfants d’Israël. Ne prenez pas de protecteur en dehors de moi ». Puis dans la Sourate 2, La Vache, verset 47 « Ô Enfants d’Israël rappelez vous mon bienfait dont je vous ai comblés, vous que j’ai préférés à tous les peuples ».

Cela reviendrait à dire que la thèse de la vocation de toute la terre et de toute l’humanité à devenir musulmanes, qui fait corps avec le droit islamique, s’arrêterait aux frontières d’Israël?  Quoique les esprits en islam contemporain s’accordent à dire que les « Enfants d’Israël » en question ne sont pas les Juifs, devenus une religion partagée par des origines diverses qui professent le judaïsme, religion délégitimée sur le plan des finalités ultimes de sorte que la prescription du Coran en faveur d’ « Israël » ne serait plus valide pour les Juifs. Quoiqu’il en soit, il semble clair que cette doctrine concernant Israël constitue un problème pour les musulmans contemporains parmi lesquels le discours antisémite et antisioniste contemporain prospère. Si les Saoudiens en viennent à reconnaître Israël, les théologiens de la couronne franchiront-ils le pas de la porte de cette reconnaissance théologique ? Je reste pour l’instant très perplexe. Sans doute sera-ce « à la fin des temps » comme le dit la Sourate. Entre temps, que se passera-t-il ?

En conclusion, je dirais que l’Etat d’Israël n’a pas encore entamé une réflexion sur le plan stratégique, intellectuel et mental nécessaire pour se confronter à ce nouveau et bouleversant paysage. Si la gauche israélienne en est à ses drapeaux noirs et à son leurre d’un Etat palestinien, la droite libérale est absente aux défis contemporains, toute à ses rêves touristiques et financiers. Or ce qui est en jeu avec les Accords d’Abraham est grave et demande une réflexion nationale de grande ampleur.

Par Shmuel Trigano

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