Dor Yecharim

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Dor Yecharim « Génération de gens droits », ou plutôt, comment éviter à sa descendance de souffrir de maladies génétiques. Voilà en effet la question que s’est posée un ‘hassid américain, le rav Eckstein, après avoir perdu quatre enfants touchés par la maladie génétique de Tay Sachs – il en perdra encore un cinquième par la suite. Le progrès scientifique moderne ne permet-il pas d’éviter la formation de couples à risque ? C’est ainsi qu’il en est arrivé, en 1983, à fonder cette association, qui va jusqu’à ce jour révolutionner la conduite dans le milieu orthodoxe.

Dans des milieux où le chidoukh est moins pratiqué, comme le cadre mizra’hi, à un certain stade où des jeunes veulent former un couple, on procédera à cette vérification, mais de manière moins courante que dans le milieu religieux, dans lequel, de nos jours, on ne peut plus concevoir de mariage sans passer par Dor Yecharim.

Dans un contexte non pratiquant, il ne reste plus grand-chose à faire, si ce n’est, a posteriori, de vérifier la compatibilité du couple, ce qui se fait en général sur la demande du gynécologue – donc fort tardivement… Précisons ici que Dor Yecharim n’est pas le seul à promouvoir ces analyses : le Ministre de la Santé israélienne en propose également, surtout dans des cas de familles à risque. Toutefois, Dor Yecharim a l’avantage d’avoir permis leur réalisation de manière systématique, dans tout le milieu orthodoxe. C’est en effet sans aucun doute dans cette dernière communauté que cette association peut le mieux œuvrer : les jeunes ne se rencontrent que dans le cadre de présentations, « chidoukhim », et de nos jours on n’acceptera de se rencontrer qu’en fonction des résultats de Dor Yecharim.

Dans la pratique, si les deux jeunes sont déjà inscrits, la réponse est donnée le jour même, ou dans les jours suivants. Sinon, cela dure quelques semaines (avec un supplément, on peut obtenir le résultat plus rapidement). Outre ses très intenses efforts de sensibilisation du public, cette association organise dans le le cadre des grandes enceintes pédagogiques, chez les garçons comme chez les jeunes filles, des invitations bi-annuelles (avant Pessa’h et Souccoth) à effectuer à prix assez modique (les caisses de maladie participent au paiement) une prise de sang en vue de tester l’état de santé de chacun pour le bien du public.

Peut-être du fait de sa source géographique achkenaze, cette organisation n’est pas tellement usitée dans le milieu sefarade. Pourtant, les spécificités de cette communauté sont parfaitement connues de Dor Yecharim et, au contraire, son formulaire d’inscription comprend des questions très précises quant à l’origine des candidats : en effet, chaque groupe communautaire a ses maladies génétiques propres – notamment chez les Juifs marocains.

Toutefois, l’interrogatoire n’apporte pas toujours de réponses exactes. Les candidats ne savent pas forcément tout sur leur famille, en particulier quand une grand-mère, contrairement au reste de la famille, provenait du Kurdistan et non point du Yémen…

Dans les faits, si pour les Juifs achkenazes, on effectue dix vérifications, pour les sefarades, on en fait seize, du fait de la quantité et la diversité des communautés de cette origine !

Dans le cas d’origines « mixtes », entre membres de communautés différentes, l’analyse des données personnelles comprendra l’ensemble des options envisageables.

Qu’en sera-t-il d’un converti ? Cela ne change pas réellement les données, car ces possibles défauts génétiques ne sont tout de même pas tous spécifiques au peuple juif ! Le problème concerne le monde entier. Simplement, le mariage intracommunautaire augmente quelque peu les risques de trouver comme conjoint une personne au bagage génétique potentiellement problématique, si l’autre composante du couple présente les mêmes défauts génétiques. Il faut en tout cas demander conseil à Dor Yecharim en précisant cette donnée.

Enfin, si l’un des membres sait qu’il a un problème génétique, là, ce n’est plus à Dor Yecharim d’intervenir. Il convient dans ce cas de consulter des spécialistes en matière de génétique.

Ce principe de vérification systématique a été chapoté à son départ par deux grands rabbanim : le rav Moché Feinstein et le rav Chemouel Wozhner zatsal.

A dire vrai, avant la création de cet organisme, le rav Feinstein avait émis un avis différent : il avait conclu que l’on n’est pas obligé de vérifier la compatibilité. Puis, une fois l’initiative du rav Eckstein lancée, il l’a acceptée, et a même donné nombre d’indications pour la bonne marche de Dor Yecharim.

Par la suite, la question s’est posée de savoir s’il fallait développer le spectre des analyses. Le rav Ségal, de Manchester, a tranché que si déjà on peut le faire, autant introduire d’autres analyses également – tout en tenant compte de la probabilité : une maladie par trop rare ne fera pas l’objet d’une analyse, sauf exception.

On le constate : il n’y a pas de raison pour que le monde sefarade ne prenne pas des précautions de cet ordre. De fait, voici quelque temps déjà, les grands rabbanim sefarades ont eux aussi lancé un grand appel invitant leur public à ne pas conclure de chidoukhim sans avoir au préalable effectué ces analyses.

« Sachez que l’association Dor Yecharim œuvre depuis plusieurs décennies, lit-on dans la lettre signée par la plupart des autorités rabbaniques sefarades actuelles, à des vérifications génétiques destinées à éviter, dès le départ, des cas terribles de tragédies douloureuses de naissance d’enfants frappés de maladies génétiques incurables. Ces situations entraînent une peine incommensurable aux parents, et des difficultés à fendre le cœur pour les enfants.

« Dans les années passées, un a-priori s’est mis en place, selon lequel les Sefarades n’ont pas besoin d’effectuer ces vérifications proposées par Dor Yecharim. Or, récemment, avec le développement des techniques, l’existence de maladies génétiques graves et douloureuses s’est fait connaître, avec une occurrence forte dans les communautés sefarades, en parallèle à celles existant chez les achkenazes.

« Dor Yecharim propose les analyses les plus avancées au monde sur le plan médical, en conservant avec une très grande attention l’anonymat et le respect des personnes, selon les indications de leurs rabbanim.

« En conséquence, afin d’éviter des souffrances si dures et superflues, nous conjurons ici avec tout amour pour nos frères et nos disciples de prendre sur eux d’effectuer ces analyses. Ayez pitié de vos âmes et de celles de votre descendance. Faites ces vérifications avant tout chose… »

Cet appel a eu un grand écho dans le public sefarade. Il est dès lors de plus en plus courant chez eux d’attendre, avant de décider de fiançailles, les résultats de la vérification de la situation sur ce plan-là également.

Les rabbanim mettent en relief les précautions prises par cet organisme sur le plan personnel : en effet, Dor Yecharim refuse absolument de livrer à quiconque les résultats des analyses, même aux personnes concernées ! Elles n’ont pas besoin de savoir, par exemple, qu’elles sont porteuses d’un gène déficient, car normalement une telle situation ne pose problème que si l’autre conjoint en est également porteur. En conséquence, quand le bureau met en correspondance les résultats des analyses des deux candidats, et que seul l’un d’entre eux pose problème, on peut être certain qu’il n’y aura pas de problème à l’avenir. Inutile, donc, d’en parler. Si on le faisait, on risquerait de mettre mal à l’aise le porteur, alors qu’en effet, son « défaut » n’a pas d’incidence.

De plus, les analyses ne portent pas le nom du candidat, mais uniquement un numéro (avec, en complément, une date de naissance et un numéro de téléphone). La personne intéressée à recevoir une réponse devra livrer son numéro, ainsi que celui de son conjoint potentiel, et la réponse, positive ou négative, ne sera livrée qu’au cours d’une communication téléphonique aux numéros livrés au moment de l’analyse.

ANALYSE-MEDICALE-1Dor Yecharim envoie de nos jours les analyses à des laboratoires en Erets Israël – et l’organisme travaille avec les plus compétents d’entre eux. On n’hésite pas non plus à effectuer des contrôles, et à faire des recherches dans d’autres laboratoires, afin d’être bien sûr des réponses.

Il en va de même pour la maison-mère aux Etats-Unis, où les éprouvettes sont également envoyées d’Angleterre.

En France ? Tout est encore à faire, et c’est visiblement une mission urgente !

4 Commentaires

    • Mais que dire si tous les rabbanim ont appuyé cette initiative, et que l’écrasante majorité des gens du public orthodoxe, concerné par votre question, s’y prêtent ? Nous ne sommes pas d’un niveau nous permettant de nous en remettre à la Main de D’, mais devons dans de nombreux domaines faire notre hishtadlouth. Au fait, le Rambam était médecin ! Mais, il est vrai, médecin de la cour, donc aussi des non-Juifs… Question de hichtadlout de sa part, pour avoir de quoi vivre, sans nul doute.

    • Dans la région parisienne, il y a une possibilité de le faire avec Mme Edelman de Brunoy pour l’instant. Ses coordonnées : 00.33 169 39 47 57 et portable : 06 11 52 06 75.

      Il serait toutefois plus qu’important, pour éviter des drames à l’avenir, que d’autres volontaires se fassent connaitre…

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