Le nouvel ordre mondial selon Trump

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Un tournant diplomatique majeur au Moyen-Orient
La photographie prise en Arabie saoudite, montrant Donald Trump aux côtés du président syrien Ahmed al-Charaa, cristallise un changement profond dans l’approche diplomatique des États-Unis. Ce cliché n’est pas seulement symbolique : il reflète la fin d’une ère d’interventionnisme et la naissance d’un ordre mondial multipolaire, dans lequel Washington redéfinit ses priorités géopolitiques.

Jusqu’à récemment, al-Charaa figurait sur la liste noire américaine, avec une récompense de 10 millions de dollars promise pour toute information menant à sa capture. Accusé de liens anciens avec des groupes extrémistes, il avait été emprisonné dans un centre de détention américain en Irak dans les années 2000. Sa trajectoire, allant du statut de combattant recherché à celui d’interlocuteur diplomatique, illustre un revirement stratégique inattendu mais assumé de la part des États-Unis.

En décembre 2024, les forces dirigées par al-Charaa prenaient le contrôle de Damas. À peine cinq mois plus tard, il était reçu par Trump lors d’une rencontre officielle organisée en marge d’une visite en Arabie saoudite. Cet échange a lieu dans un contexte de rapprochement progressif entre la Syrie et plusieurs pays occidentaux, la France ayant été la première à rétablir des contacts officiels avec le nouveau pouvoir syrien.

Une politique américaine transformée
Ce geste fort de Donald Trump marque une rupture avec la doctrine de « nation building » portée par ses prédécesseurs, notamment après les attentats du 11 septembre 2001. Sous George W. Bush, les États-Unis ont lancé une guerre mondiale contre le terrorisme, mobilisant troupes et ressources en Afghanistan, en Irak, et en Syrie. Aujourd’hui, la rencontre Trump–al-Charaa symbolise la fin de ce cycle.

Trump adopte une ligne pragmatique : il ne cherche plus à reconstruire les États étrangers selon un modèle occidental, mais à reconnaître les réalités sur le terrain. Selon lui, ce sont désormais les peuples du Moyen-Orient qui bâtissent leur avenir. Il rejette la responsabilité des échecs passés sur les « interventionnistes » occidentaux et les « bâtisseurs de nations », qu’il accuse d’avoir aggravé le chaos au lieu d’y mettre fin.

La politique « America First » portée par Trump prend ici toute sa mesure. Le président américain ne se présente plus en donneur de leçons. Il mise sur la souveraineté des États et sur une approche plus réaliste des relations internationales. Dans cette logique, la levée progressive des sanctions contre la Syrie apparaît comme un levier diplomatique en faveur de la stabilité régionale.

Un repositionnement stratégique
Ce changement ne s’inscrit pas uniquement dans la relation bilatérale entre Washington et Damas. Il reflète un repositionnement géopolitique plus vaste. Les États-Unis déplacent leur centre d’intérêt vers l’Asie et le Moyen-Orient, tandis que les alliances traditionnelles avec l’Europe occidentale perdent en centralité. Le choix de l’Arabie saoudite comme point de départ pour ce dialogue illustre cette bascule.

D’autres puissances régionales, comme l’Iran et le Pakistan, resserrent leurs liens avec la Chine. Ces pays cherchent à rejoindre des organisations comme les BRICS ou l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), qui défient la domination occidentale sur l’ordre économique mondial. Face à cette nouvelle donne, les États-Unis ajustent leur stratégie en cherchant des accords plus souples et moins idéologiques.

Le cas de la Syrie est emblématique : de paria diplomatique, le régime d’al-Charaa devient un acteur avec lequel il faut composer. La rencontre avec Mazloum Abdi, chef des Forces démocratiques syriennes soutenues par les États-Unis, suggère même un début de réintégration territoriale de l’est syrien sous contrôle de Damas.

Une opposition israélienne ignorée
Ce tournant n’est pas sans susciter des tensions. Selon des sources citées par Israel Hayom, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou aurait expressément demandé à Donald Trump de ne pas lever les sanctions contre la Syrie, craignant une nouvelle flambée de violence, à l’image des attaques du 7 octobre. Malgré ces réticences, Trump aurait maintenu sa décision, encouragé par ses alliés régionaux, notamment l’Arabie saoudite et la Turquie.

En refusant, Trump confirme sa volonté de réécrire les règles du jeu diplomatique. Il mise sur un rééquilibrage durable des relations avec les puissances du Moyen-Orient, quitte à heurter certains partenaires historiques.

La rencontre entre Donald Trump et Ahmed al-Charaa marque une évolution marquante dans les relations internationales : elle montre que l’ancien monde, fondé sur la domination unilatérale des puissances occidentales, cède la place à une nouvelle réalité multipolaire. Un monde dans lequel l’ancienne ligne de fracture entre « alliés » et « ennemis » est redessinée selon les rapports de force et les intérêts mutuels.

Jforum.fr

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