En écoutant attentivement les voix qui appellent à mettre fin prématurément à la guerre, y compris les sondages présentés de manière trompeuse, les commentaires des analystes et les déclarations des politiciens, le Hamas parie qu’Israël est suffisamment « épuisé » pour accepter un cessez-le-feu sans obtenir la libération des otages.
Le Hamas estime avoir trouvé un point de pression au sein de la société israélienne et s’efforce de l’exploiter pour obtenir le plus de concessions possible lors des négociations de cessez-le-feu.
Il s’agit d’un nouveau pari risqué qui pourrait coûter cher à l’organisation terroriste, compte tenu notamment du décalage entre l’opinion publique israélienne et le discours médiatique.
Il semble néanmoins que la mauvaise interprétation de la situation par le Hamas soit une fois de plus à l’origine de sa stratégie.
Au sein de la direction du Hamas, les appels à un arrêt complet de la guerre avant une issue décisive suscitent une attention soutenue, notamment à travers des sondages, des analyses et des déclarations politiques trompeuses.
Mais au-delà de ce climat de morosité, l’organisation terroriste s’inspire également de l’instabilité politique en Israël, notamment du refus des politiciens orthodoxes de transiger sur la conscription militaire.
La question clé qui préoccupe les hauts responsables du Hamas semble être : pourquoi se précipiter pour conclure un accord sur la libération des otages alors qu’Israël semble « épuisé » et pourrait offrir un cessez-le-feu gratuitement ?
Ce calcul a conduit le Hamas à adopter une stratégie consistant à faire traîner les négociations tout en refusant de céder sur les exigences qui lui permettraient de reconstruire ses capacités militaires.
Dans le cadre de cette approche, l’organisation a signalé dans des vidéos de propagande son intention d’intensifier les attaques contre les troupes israéliennes et de tenter de nouveaux enlèvements.
Du point de vue du Hamas, plus Israël subit de pertes, ou même craint de subir des pertes, plus la dynamique en faveur d’un cessez-le-feu à tout prix se renforcera en Israël. C’est ce que le Hamas appelle une « guerre d’usure ».
Le Hamas prévoit également de semer la démoralisation en divulguant des informations sur la manière dont il aurait trompé les services de sécurité israéliens avant le massacre du 7 octobre.
Récemment, Abou Obeida, pseudonyme du porte-parole de la branche armée, Hudayfa Samir Abdallah al-Kahlout, a menacé de publier des documents supplémentaires « au moment opportun » pour démontrer comment l’organisation terroriste a trompé les services de renseignement israéliens pendant des années. Saper la confiance du public dans les services de sécurité reste l’un des principaux objectifs du Hamas.
Parallèlement, le Hamas mène une campagne pour exercer une pression internationale face à la grave crise humanitaire qui frappe Gaza, notamment la famine généralisée et un bilan estimé à environ 60 000 morts palestiniens. Ses porte-parole ont accusé le monde arabe d’indifférence et ont appelé les citoyens à descendre dans la rue dans des villes comme Ramallah et Amman pour inciter leurs gouvernements à agir.
Dimanche, les factions terroristes basées à Gaza ont appelé « tous les Palestiniens du monde entier, les nations arabes et islamiques, et les défenseurs de la liberté du monde entier » à intensifier leurs efforts publics, diplomatiques et médiatiques pour parvenir à un cessez-le-feu inconditionnel.
Exploiter la dévastation
En d’autres termes, le Hamas tente toujours d’exploiter la destruction qu’il a infligée à Gaza de ses propres mains pour assurer sa survie et remettre les pendules à l’heure jusqu’à la prochaine guerre.
L’incendie pourrait être éteint instantanément, tous les otages libérés et les rares dirigeants survivants du Hamas autorisés à quitter Gaza. En bref, capituler. Mais le Hamas et ses alliés ne sont pas disposés à agir ainsi pour mettre fin aux souffrances des civils de Gaza.
On pense qu’une grande partie de cette stratégie est dirigée par Izz al-Din al-Haddad, l’un des rares hauts commandants du Hamas encore à Gaza et désormais à la tête de sa branche militaire après l’élimination de ses prédécesseurs.
Bien qu’il ait perdu de nombreux commandants clés sur le terrain ces derniers mois, des milliers d’agents seraient toujours sous son commandement. Il est soutenu par Raed Saad et Muhammad Awawdeh, qui dirigent les divisions de production et de renseignement du Hamas.
Al-Haddad parle hébreu et est directement en phase avec le discours public israélien. À l’instar de Yahya Sinwar, le chef du Hamas tué plus tôt cette année, al-Haddad prendrait en compte le sentiment israélien dans ses analyses stratégiques. L’armée israélienne a récemment révélé qu’il avait modifié son apparence pour éviter d’être repéré : il se teignait les cheveux en noir, se taillait la barbe et portait des vêtements civils, un geste interprété comme un signe que ses jours pourraient être comptés.
Sur le plan diplomatique, les négociations sont en grande partie supervisées par les membres du conseil de direction du Hamas basés au Qatar. Au début de la guerre, Khaled Mashaal a provoqué la colère des gouvernements arabes en s’ingérant dans leurs affaires intérieures et en appelant à des manifestations de masse, une pratique qu’il semble avoir reprise aujourd’hui. Parallèlement, Zahar Jabarin, qui supervise les activités terroristes en Judée-Samarie, aurait ordonné une multiplication des tentatives d’attentats dans la région ces derniers mois. D’autres membres du conseil – Muhammad Darwish, Khalil al-Hayya et Nizar Awadallah – mènent les négociations par l’intermédiaire de médiateurs internationaux.
Il est important de noter que la stratégie du Hamas ne signifie pas qu’Israël doive « renverser la situation » et refuser tout accord concernant les otages. Mais les responsables doivent être attentifs à l’influence de leurs propos sur les calculs du Hamas. Surtout, les responsables politiques doivent dissiper le brouillard et faire comprendre à l’ennemi: des élections israéliennes ou un changement de gouvernement ne suffiront pas à instaurer un cessez-le-feu à Gaza ; seule la libération des otages le fera.
Ultimatum américain au Hamas : accord imminent ou intervention militaire israélienne
L’envoyé américain Adam Buehler a exprimé un optimisme prudent quant à l’accord de désengagement entre Israël et le Hamas. Il a affirmé qu’il existait une « vraie opportunité », mais que le Hamas s’obstinait. Les responsables israéliens évoquent une dynamique positive, mais la balle est dans le camp du Hamas.
Adam Buehler, l’envoyé américain pour la libération des otages, a évoqué hier les négociations en cours entre Israël et le Hamas, et a exprimé un optimisme prudent quant aux chances de parvenir à un accord. Dans une interview accordée à CNN, Buhler a souligné qu’il existait une « réelle opportunité » de conclure un accord , dans le cadre duquel les otages israéliens seraient libérés. « Je suis plus optimiste aujourd’hui qu’avant. Il y a du mouvement, et il existe une opportunité politique qu’il faut exploiter », a-t-il déclaré.
Il a toutefois clairement indiqué que le Hamas « se comporte avec beaucoup d’entêtement » et n’est pas prêt à céder sur les questions clés pour le moment. Il a ajouté que l’administration Trump participait activement aux négociations et a averti qu’en l’absence d’avancée politique rapide, Israël pourrait revenir à l’option militaire. « Si le Hamas ne répond pas aux efforts déployés, Israël ne pourra pas attendre indéfiniment. L’action militaire reste indéniablement à l’ordre du jour », a-t-il déclaré.
Les responsables israéliens saluent l’implication américaine et évoquent une dynamique positive dans les négociations, mais soulignent que « la balle est dans le camp du Hamas » et précisent que « si le Hamas agit comme si le temps jouait en sa faveur et ne coopère pas comme prévu, les chances d’un accord diminueront ».