La Knesset s’apprête à examiner pour la première fois une proposition de loi hautement controversée portée par la députée Galit Distel-Atbaryan, visant à instaurer ce que ses promoteurs appellent une « loi sur l’identité juive ». Le texte doit être présenté en lecture préliminaire mercredi, dans un contexte politique déjà marqué par de vives tensions autour de la réforme du système judiciaire et du rôle de la religion dans la sphère publique israélienne.
Dès son annonce, cette proposition a suscité de fortes réactions, certains la qualifiant de tentative de coercition religieuse. Le projet entend renforcer la place de la loi juive dans la vie publique et institutionnelle, sans prévoir explicitement de séparation entre religion et État. Selon ses détracteurs, il introduirait un changement fondamental dans l’équilibre démocratique du pays, en transférant une partie de l’autorité normative du pouvoir civil vers des instances religieuses.
Parmi les dispositions les plus marquantes figure l’interdiction d’interrompre une prière se déroulant dans un espace public. Cette mesure s’appliquerait indépendamment du contexte ou de l’environnement, conférant un statut juridique renforcé aux pratiques religieuses dans l’espace commun. Le texte prévoit également que le rabbinat aurait compétence pour trancher les litiges relatifs au statut d’une communauté au sein d’une synagogue, renforçant ainsi son rôle d’arbitre officiel.
Autre point central : l’obligation d’installer des mezouzoth dans l’ensemble des lieux publics ainsi que dans toutes les institutions financées par des fonds publics. Cette exigence symbolique étendrait les marqueurs religieux bien au-delà des institutions confessionnelles, en les inscrivant dans le quotidien administratif et civique.
La réforme toucherait également directement le système judiciaire. Les juges seraient tenus de démontrer leur connaissance de règlements élaborés conjointement par le ministre de la Justice et le rabbinat. Ils devraient statuer sur les affaires relevant de cette loi conformément aux principes de la loi juive. Plus encore, aucun juge ne pourrait être nommé ou promu sans avoir réussi des examens définis par le ministère de la Justice en coordination avec les autorités religieuses compétentes.
Le texte prévoit en outre des sanctions administratives sévères. Tout fonctionnaire reconnu coupable d’avoir enfreint cette loi pourrait être licencié. Le ministre de la Justice se verrait attribuer un pouvoir élargi, lui permettant d’engager des poursuites pénales pour violation de la loi même en cas d’opposition du parquet général, une disposition qui a particulièrement alarmé plusieurs juristes et observateurs institutionnels.
Le Comité ministériel des affaires législatives a donné son feu vert à la présentation du texte, tout en précisant que son soutien était conditionné à d’éventuelles modifications ultérieures. Certaines clauses, notamment celles concernant les pouvoirs du ministre de la Justice et la certification des juges, pourraient être amendées ou supprimées lors des étapes suivantes. Néanmoins, dans sa forme actuelle, c’est bien ce texte qui sera soumis à la Knesset en lecture préliminaire.
Cette initiative s’inscrit dans une séquence parlementaire chargée. En parallèle, les députés examineront plusieurs projets de loi promus par la coalition, dont la « loi sur l’emploi », qui faciliterait la nomination de militants politiques dans les entreprises publiques, ainsi que d’autres textes liés à la réforme judiciaire, à l’exemption du service militaire ou encore à la régulation des médias.
L’examen de la loi sur l’identité juive marque ainsi une nouvelle étape dans le débat sur la nature de l’État d’Israël, le rôle de la religion dans ses institutions et les limites du pouvoir exécutif sur le système judiciaire.
Jforum.fr


























