Les trois pays européens en première ligne contre Israël

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Ces dernières semaines, un mouvement diplomatique intense s’est formé au sein de l’Union européenne autour des critiques adressées à Israël concernant la guerre à Gaza. Si plusieurs États ont exprimé des positions fermes, trois pays se distinguent par leur rôle moteur : la France, l’Espagne et l’Irlande. Chacun agit pour des raisons mêlant considérations intérieures, héritage historique et calculs politiques.

L’Espagne et l’Irlande, les plus virulentes

L’Espagne et l’Irlande affichent la ligne la plus dure à l’égard d’Israël au sein de l’UE. Madrid a multiplié les gestes symboliques et politiques : sanctions contre des colons, reconnaissance d’un État palestinien, rappel de son ambassadeur, participation au recours de l’Afrique du Sud devant la Cour internationale de Justice, et prise de position de Pedro Sanchez qualifiant Israël d’« État génocidaire ».

Pour le professeur Tal Sade, cette orientation s’explique d’abord par la situation politique interne. Le gouvernement espagnol, minoritaire, s’appuie sur des alliances fragiles et fait face à des pressions judiciaires. Selon lui, Sanchez cherche à consolider sa base en affichant une position morale intransigeante, même au prix de tensions diplomatiques. Il ajoute que la mémoire de la guerre civile espagnole nourrit également une lecture critique des actions israéliennes, par analogie avec le régime autoritaire d’autrefois.

L’Irlande, quant à elle, s’est positionnée depuis deux ans comme le pays le plus critique d’Israël dans l’UE. Elle a reconnu rapidement un État palestinien, soutenu l’action juridique de l’Afrique du Sud et annoncé qu’elle arrêterait le Premier ministre israélien s’il venait sur son sol. Cette attitude a conduit Israël à fermer son ambassade à Dublin. Pour Sade, l’hostilité irlandaise découle d’une combinaison d’identification historique avec la cause palestinienne, de liens anciens entre mouvements nationalistes irlandais et organisations palestiniennes, et d’un antisémitisme persistant dans une partie de l’opinion.

La France, un rôle central et stratégique
Contrairement à l’Espagne et à l’Irlande, la France est traditionnellement perçue comme un pays ami d’Israël. Mais sa position dans l’UE et son influence diplomatique l’ont placée à la tête des initiatives récentes. Le déclencheur a été l’annonce, fin juillet, par Emmanuel Macron, de la reconnaissance d’un État palestinien, suivie d’une série de critiques appuyées envers Israël.

La France a usé de son poids politique pour inciter d’autres pays à s’aligner sur cette ligne. Selon Michal Hatuel-Radoshitsky, du programme international de MIND Israël, les motivations françaises tiennent à la fois aux impératifs internes et à la volonté de se positionner comme puissance autonome sur la scène internationale. Face à des tensions intérieures et à une importante population musulmane, Macron cherche à affirmer une politique étrangère visible, tout en évitant d’apparaître comme aligné sur les États-Unis.

Calculs politiques et perception internationale
Les analystes s’accordent pour dire que, derrière ces prises de position, les dirigeants cherchent à répondre à des attentes internes, à mobiliser certaines franges de leur électorat et à se positionner sur la scène mondiale. Pour la France, l’enjeu est aussi d’affirmer son indépendance diplomatique ; pour l’Espagne et l’Irlande, il s’agit de consolider une image morale et militante en lien avec leur histoire et leurs références politiques.

Hatuel-Radoshitsky rappelle qu’Israël, qui se définit comme un État démocratique occidental, est particulièrement vulnérable aux accusations mettant en doute la cohérence entre ses valeurs affichées et ses actions. C’est sur ce terrain que ses détracteurs européens concentrent aujourd’hui leurs critiques, cherchant à influencer non seulement l’opinion publique, mais aussi l’orientation des politiques de l’Union européenne.

Jforum.fr

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