Derrière cette mécanique de « frappe-réponse », un constat stratégique s’impose : Israël entend empêcher le Hezbollah de reconstituer dépôts, postes d’observation et chaînes d’acheminement vers le Sud-Liban, en particulier après les coups portés à ses structures depuis un an. Côté libanais, les autorités politiques évoquent un processus de désarmement progressif au sud du Litani, placé sous l’égide de l’armée, mais sans confrontation ouverte avec le Parti de D’ — une ligne rouge pour éviter un embrasement intérieur. Or, les réalités du terrain démentent ce calendrier : les reconstructions clandestines se multiplient, et des émissaires iraniens sont régulièrement cités par les médias comme superviseurs de ces « remises en état ».
La partie se joue aussi dans les salles de réunion. Washington et Paris poursuivent leurs efforts pour ancrer une architecture post-crise : mécanisme de surveillance des violations, rôle accru de la FINUL, et surtout responsabilisation explicite de l’armée libanaise. À ce titre, l’activisme américain s’est intensifié : l’émissaire Morgan Ortagus multiplie les allers-retours entre Beyrouth, Jérusalem et les capitales régionales pour consolider le cessez-le-feu, prévenir le réarmement au Sud-Liban et pousser un plan libanais de « monopole des armes » par l’État. Objectif affiché : tarir l’accès du Hezbollah à des plateformes de tir proches de la frontière et réduire l’attrition quotidienne qui use les populations des deux côtés.
Trois paramètres détermineront la suite :
1) Le tempo des frappes ciblées. Tant que celles-ci restent chirurgicales et centrées sur des acteurs ou infrastructures à haute valeur, l’escalade peut demeurer contenue. Mais une bavure majeure ou une frappe symbolique (cadre très haut placé, site « sanctuarisé ») peut faire basculer la logique vers une campagne plus large.
3) L’alignement transatlantique. L’Europe et les États-Unis craignent l’ouverture d’un nouveau front, mais leur message se durcit : le Hezbollah doit s’éloigner de la frontière et renoncer à la reconstitution immédiate de ses capacités. À défaut, un « coup de torchon » israélien deviendrait plausible, avec tous les risques de débordement régional que cela implique.
La priorité d’Israël est claire : empêcher un Hezbollah réarmé de menacer durablement sa population du Nord. Dans ce cadre, des frappes de précision au service d’une dissuasion crédible, combinées à une pression diplomatique pour faire respecter le désarmement au sud du Litani, répondent à un impératif de sécurité légitime. La solution la plus responsable passe par une application stricte des engagements : retrait des moyens offensifs du Hezbollah de la frontière, contrôle effectif du terrain par l’État libanais, et liberté d’action d’Israël contre toute menace imminente. C’est la condition pour éviter une guerre ouverte — et créer, enfin, un espace de stabilité au Nord.



























