Otages : compromis ou nouveau bras de fer

0
14
La Douzième chaîne a rapporté qu’un document jugé « spectaculaire » aurait atterri sur le bureau de Benjamin Netanyahou, émanant d’une source impliquée dans les pourparlers. Le texte, selon la chaîne, attesterait d’une disposition du Hamas à envisager un schéma partiel. Ce signal ne suffit toutefois pas à infléchir la position officielle de Jérusalem : dans un communiqué diffusé samedi soir, le bureau du Premier ministre a rappelé ses lignes rouges. Israël n’entérinera un accord qu’à la condition expresse que tous les otages soient libérés en une seule phase, et que soient réunies les conditions fixées pour la fin du conflit : désarmement du Hamas, démilitarisation de Gaza, maintien d’un contrôle sécuritaire israélien, et mise en place d’un organe de gouvernance ni affilié au Hamas ni palestinien.

Ce cadrage, maximaliste par construction, vise à empêcher que des étapes intermédiaires deviennent des points de blocage permanents. Pour ses partisans, c’est l’unique manière d’éviter des cycles d’échanges partiels suivis de ruptures. Pour ses détracteurs, il rend toute percée plus difficile en exigeant d’emblée la totalité des concessions.

Pendant que les capitales auscultent les signaux faibles, la pression populaire s’intensifie en Israël. Les familles d’otages et de soldats tombés ont appelé à une « grève nationale » ce dimanche, à l’occasion des 680 jours écoulés depuis l’enlèvement d’une cinquantaine d’Israéliens lors de l’attaque du 7 octobre 2023, qui a fait 1 200 morts. Le programme prévoit un rassemblement matinal sur la place des Otages à Tel-Aviv, suivi d’une conférence de presse, d’actions visibles aux grands carrefours et d’un meeting de masse à 20 heures. Objectif : maintenir les projecteurs sur l’urgence humanitaire et rappeler au gouvernement que le temps, pour les familles, est un adversaire de plus.

Dans ce contexte, parler d’« accord partiel » n’est pas neutre. Un tel format pourrait, par exemple, concerner des catégories d’otages prioritaires (malades, femmes, personnes âgées) contre des mesures limitées de détente — sans aller jusqu’au cessez-le-feu permanent réclamé par le Hamas. Mais chaque hypothèse se heurte au verrou israélien : la libération doit être globale et immédiate. De l’autre côté, l’organisation islamiste voit dans un arrangement par étapes un levier pour conserver de l’influence politique et sécuritaire à Gaza, au moins transitoirement.

Le cœur du bras de fer se situe là : comment articuler la nécessité humanitaire (ramener les captifs) avec l’exigence stratégique (empêcher la reconstitution d’une menace armée) ? Les médiateurs tentent de bâtir un pont entre ces deux rives. Mais la séquence actuelle rappelle que la technique des « petits pas » a ses limites lorsque les parties assignent au premier accord une portée quasi finale : pour Israël, une libération intégrale et des garanties sécuritaires robustes ; pour le Hamas, l’arrêt durable des hostilités et la préservation d’un rôle politique.

Sur le terrain politique intérieur, la marge de manœuvre du gouvernement se joue aussi dans la rue. Plus les rassemblements grossissent, plus l’exécutif est sommé de produire un résultat tangible. À l’inverse, un durcissement public du cadrage officiel peut consolider son socle et contenir les pressions pour des concessions jugées prématurées. Entre ces deux pôles, les familles d’otages, qui refusent de voir leurs proches devenir des variables d’ajustement, imposent leur calendrier moral.

Rien n’indique, à ce stade, que l’un des camps soit prêt à céder sur l’essentiel. Pourtant, l’apparition d’une fenêtre partielle dans le discours du Hamas, même étroite, crée une dynamique que les médiateurs chercheront à exploiter. La question est de savoir si cette brèche peut être élargie sans fracturer les impératifs posés par Israël. Les heures et les jours à venir, rythmés par la mobilisation citoyenne et les signaux envoyés en coulisses, diront si l’hypothèse d’un dégel s’installe — ou si l’on en reste à un nouveau cycle d’attente et de défiance.

Jforum.fr

Aucun commentaire

Laisser un commentaire