Autour de la table de Chabbath, n° 501 ‘Ekev
Pour le mérite du Birkath Hamazon !
Notre paracha enseigne une très belle Mitsva qui revient jour après jour, repas après repas : c’est le Birkath Hamazon. Nous savons en effet qu’un homme ou une femme qui mange du pain, au moins une tranche au cours d’un repas, se voit gratifier d’une très belle et longue bénédiction : la « bénédiction sur la nourriture ». On l’apprend des versets de notre paracha : « Tu mangeras, tu te rassasieras et tu BÉNIRAS ton D’ ».
D’une manière générale toutes les bénédictions que l’on fait avant de manger comme le « Chéhakol » ou le « Boré Péri Haéts » sont des bénédictions imposées par les Sages, la seule bénédiction dictée par la Tora étant notre Birkath.
Cette bénédiction est composée de quatre sous-bénédictions.
La première, c’est sur la nourriture elle-même ; cette Bera’ha a été instituée par Moché Rabbénou sur la Manne qui tombait dans le désert.
La deuxième traite de la Terre sainte et de la Tora : ce passage a été écrit par Yehochoua à son entrée en Erets.
La troisième bénédiction concerne le Temple de Jérusalem : elle a été instituée par les rois David et Chelomo, son fils.
Et la quatrième a trait à toutes les bontés de Hachem et en particulier à l’époque de la prise de la ville de Bétar (Tour 187).
Quiconque mange du pain et en est rassasié est redevable de faire ce Birkath (d’après la Tora). Cependant selon les Sages, même si on ne mange que le volume d’un seul Cazait, une tranche de pain, il faudra quand bien même faire la bénédiction. Les enfants sont aussi tenus de faire le Birkath pour les habituer à la Mitsva.
Qu’en est-il d’un jeune garçon qui, la veille de sa Bar-Mitsva, a fait un bon repas (et bien sûr a fait le Birkath) ; cependant le soir de sa 13ème année, a encore le sentiment de satiété du repas de la veille. Devra-t-il refaire le Birkath à la tombée de la nuit ou non ? La question paraît incongrue car il a déjà fait la Bera’ha la veille ! Cependant comme on l’a expliqué, l’homme doit être rassasié pour être redevable par la Tora de la bénédiction. De plus il existe une autre Halakha : tout le temps où l’homme a le sentiment d’être rassasié par son repas il pourra faire la bénédiction finale. A priori on doit, dès la fin du repas, faire cette belle Mitsva. Après le temps de digestion, en moyenne de 72 minutes, l’homme ne pourra plus bénir car son Birkath ne se rapporte plus à son repas. Donc la question sur la Bar-Mitsva garde toute son acuité puisque lorsqu’il a fait son Birkath cela ne lui était pas imposé par la Tora uniquement par les Sages, et le soir de ses 13 ans, alors qu’il est devenu adulte, il est encore rassasié par sa nourriture. Normalement il devra donc refaire son Birkath ! Cette question est posée par rabbi Akiva Eiger (dans le Choul’han ‘Aroukh). Il évoque les deux possibilités : soit de considérer que le Birkath est une bénédiction qui repose sur le sentiment de satiété, soit qu’il s’agit d’un remerciement sur le profit « dégustatif » au moment du repas. Si l’on admet la 2ème possibilité, alors il va de soi que notre Bar-Mitsva du jour n’aura pas à refaire son Birkath car la raison de sa bénédiction repose sur l’acte de manger. Or à l’époque (la veille) il avait un statut « d’enfant » et même après qu’il devienne adulte (durant la nuit) il n’a pas eu de nouvelles obligations (par rapport à son Birkath). Tandis que si on considère la 1ère possibilité comme juste, c’est-à-dire que le Birkath repose sur le bien-être et la satiété qui suit le repas, donc il se peut bien que notre jeune adulte doive refaire son Birkath même s’il n’a rien mis dans la bouche depuis la tombée de la nuit. Après avoir notifié ces deux éventualités, rabbi Akiva Eiger reste sur sa question et ne tranche pas !
La question de la grandeur de rabbi Akiva Eiguer : elle n’est pas à démontrer ! (A 7 ans il connaissait déjà une bonne partie du Talmud !) et sans fausse modestie nous n’atteignons pas la dimension de l’aile d’une mouche face à la grandeur d’un aigle majestueux ! Seulement on évoquera deux points (déjà marqués dans les Poskim).
1° La Tora a dit : « Tu mangeras et tu te rassasieras… » C’est-à-dire que pour être redevable du Birkath il faut MANGER, donc le passage dans notre bouche de l’aliment et son avalement ! (Dans le cas où à D’ ne plaise l’homme est rassasié par une sonde, c’est certain qu’il est exempt du Birkath car il n’a pas fait l’acte de manger). Un autre point intéressant, c’est que lorsqu’un homme sort de son repas sans avoir fait son Birkath, il doit revenir sur place et faire la bénédiction. Or si on considère que le fait d’être rassasié est la cause de notre bénédiction, on ne devrait pas revenir sur place : uniquement bénir à l’endroit où on se rappelle ne pas avoir encore fait la bénédiction ! Donc de ces deux points on remarque que c’est l’acte de manger qui est la cause de notre formidable bénédiction !
La 2ème réflexion que même si l’on soutient qu’il est redevable (le jeune Bar-Mitsva) du Birkath à nouveau le soir, il convient de savoir que lorsqu’il a fait son Birkath l’après-midi il est probable qu’il se soit AUSSI rendu quitte de la Mitsva (de la Tora) du Birkath ! En effet, le Maguen Avraham (167.2) rapporte un Mordekhaï qui enseigne qu’un homme qui fait le Kidouch du vendredi soir longtemps avant la tombée de la nuit (durant le temps de la Tosséfeth du Chabbath alors que ce n’est pas véritablement le Chabbath d’après la Tora) s’est rendu quitte de la Mitsva du Kidouch du soir qui est lui : Min Hatora ! C’est-à-dire que lorsque l’on se rend quitte d’une Mitsva des Sages, automatiquement on sera quitte de la Mitsva de la Tora. Donc notre jeune Bar-Mitsva qui fait son Birkath « derabanan » (en journée) a dû se rendre quitte de la Mitsva de la Tora de la tombée de la nuit !
Le Birkat qui a sauvé la vie !
Cette semaine on vous propose un très beau sippour directement lié avec le Birkath. Il s’agit d’un homme âgé de Jérusalem qui faisait depuis toujours particulièrement attention de bien faire son Birkath, avec beaucoup d’attention. Fréquemment il ne mangeait pas de pain car il savait qu’il n’avait pas le temps de faire un beau Birkath. Une fois, il raconta son histoire véridique très époustouflante. Il était alors un jeune garçon quelque part en Europe centrale juste avant la guerre lorsque le rav Méir Schapira, le Roch Yechiva de Hakhmé Lublin (l‘instigateur du Daf Hayomi), est venu visiter son école. Il prit tous les enfants et leur dit : « Connaissez-vous une lettre de l’Aleph-Bet qui n’apparait pas dans tout le Birkath ? Les enfants écoutèrent avec beaucoup d’attention. C’est la lettre Pé finale ! Car, continua le rav, celui qui dit avec beaucoup d’attention son Birkat se verra protégé de la colère (Chétsef) du dommage (Quétsef et ‘Haron Af). (C’est le Ba’h qui rapporte cet enseignement) ; de plus sachez, mes chers enfants, que celui qui fait bien le Birkath est assuré d’une subsistance TOUS LES JOURS DE SA VIE (Séfer Ha’Hinoukh). Le rav conclut : « Voyez ce que l’on peut gagner à faire une belle bénédiction ! » Ces paroles ont touché notre jeune garçon et depuis il devint très attentif à faire la Mitsva.
Les années passèrent, la guerre se déclencha et la catastrophe s’abattit sur tout le monde juif européen. Notre jeune s’est retrouvé dans un des camps de la mort : Auschwitz. A l’entrée du camp il y avait une longue queue de pauvres Juifs qui devaient passer devant un ange de la mort… Le nazi indiquait de son doigt soit la droite vers les camps de travail, soit la gauche vers les chambres à gaz et les crématoires. A ce moment terrible notre jeune s’est rappelé des paroles du rav Schapira : celui qui dit le Birkath avec ATTENTION sera sauvé de la colère divine ! Il fera alors une prière silencieuse : « Ribono chel ‘olam, j’ai l’assurance signée par les grands de notre peuple qu’il n’existe pas de colère sur moi grâce à mon Birkath ! » Sa prière fut acceptée et le nazi tournera sa main vers la droite ! Seulement la peur continua car il y avait une 2ème sélection : cette fois, vers quel métier les captifs seront-ils affectés ? Qui parmi la foule se destinera au travail de forgerons, mécanos, etc., afin de fournir la main d’œuvre gratuite aux grandes usines allemandes installées pas loin du terrible camp ? Seulement notre jeune ne savait RIEN faire dans la vie ! Il avait très peur mais comme il existe un Ribono chel ‘olam (même à Auschwitz), son voisin derrière lui tapota dans le dos en lui disant : « Tu diras que tu es mon aide-cuistot ! » Or notre jeune ne connaissait pas du tout le métier, seulement son voisin le rassurera en lui disant qu’il l’aiderait à la tâche. C’est ainsi qu’il dira au nazi qu’il est cuisinier de métier. L’Allemand acquiesça et l’envoya dans les cuisines d’Auschwitz. C’est ainsi qu’il passera toutes les années dans la cuisine du camp le plus terrible qui ait pu exister sur la surface la planète (construit et agencé par le peuple le plus civilisé au monde !). Alors que tous ses frères étaient en sous-nutrition chronique, notre garçon sera nourri tous les jours. L’histoire n’est pas finie ! Vers les derniers temps des camps, juste avant que les Alliés ne le délivrent, notre jeune s’est fait prendre par deux nazis qui s’étonnèrent de voir un Juif bien portant déambuler dans le campement ! Leur jalousie et leur haine étaient sans limites. Ils lui dirent : « On te donne deux heures pour creuser une fosse de 2 mètres sur un mètre, profonde d’un mètre avec comme ustensile cette petite cuillère. Dans le cas où tu ne réussis pas, tu rejoindras tes frères au Ciel ! » La peur s’empara de lui et il essaya de commencer à creuser dans la caillasse. La situation était incongrue : un prisonnier juif creusant sans aucun motif ! Cependant, un camion amenant des ouvriers captifs polonais gentils qui virent le spectacle furent amusés par cette scène : voir un Juif en train de creuser le sol avec une cuillère ! Alors ils lui lancèrent toutes sortes de vieilles carottes, pommes de terre et laitues en signe de moquerie. Notre Juif était dans l’expectative devant le camion qui s’éloignait. Rapidement vint des usines un groupe d’esclaves juifs qui finissaient leur journée de travail exténuant. C’est alors qu’ils virent l’amoncellement de carottes et autres victuailles, et demandèrent à notre homme s’ils pouvaient les prendre en contrepartie d’un travail quelconque. Le jeune répondit immédiatement : « Oui ! Aidez-moi à creuser ce trou ! » Alors le groupe se mit à l’œuvre et rapidement la fosse fut terminée. Le groupe repartit avec les légumes tandis que les nazis arrivèrent avec leurs revolvers, prêts à en finir avec notre Juif « à la cuillère ». C’est alors qu’ils s’approchèrent et virent l’incroyable : le trou était fini ! Les nazis dirent : « Tu es un vrai ange pour avoir réalisé ce travail ! On te laisse en vie ! » Fin de l’histoire véritable : qui voudra commencer à faire un beau Birkath ?
Coin Halakha : On peut recevoir le Chabbath longtemps à l’avance, à partir du Plag Hamin’ha (1h15 avant le coucher du soleil). Dans le cas où l’on a prié la Tefila du Chabbath (après le Plag) alors automatiquement on a fait « entrer » le Chabbath et tous les travaux seront interdits. Dans le cas où la majorité de notre communauté a déjà reçu le Chabbath, alors les autres fidèles (la minorité) devront s’abstenir d’entreprendre des travaux au même moment (bien qu’il ne soit pas dans la synagogue). Un homme (par exemple un touriste) qui arrive dans une ville où la communauté a reçu le Chabbath doit tout de suite prendre le Chabbath (Choul’han ‘Aroukh 263.11)
Shabbat Chalom
à la semaine prochaine, si D. le veut.
David Gold soffer écriture ashkenaze et sefarade.
Tél : 00972 55 677 87 47
E-mail : dbgo36@gold1.fr