La décision du président Emmanuel Macron d’annoncer à l’Assemblée générale des Nations unies, en septembre prochain, la reconnaissance officielle d’un État palestinien constitue une rupture majeure sur la scène internationale. Dans une lettre rendue publique, le chef de l’État français explique vouloir « rester fidèle à l’engagement historique de la France pour une paix juste et durable au Moyen‑Orient ». Il promet de prononcer cet acte solennel au siège de l’ONU afin de « contribuer à relancer la solution à deux États ». Paris, qui abrite les plus importantes communautés juive et musulmane d’Europe, deviendrait alors le premier pays membre permanent du Conseil de sécurité et du G7 à franchir ce pas. Cette initiative, qui vise également à inciter d’autres alliés à suivre, s’inscrit dans une tentative de créer un effet d’entraînement après la reconnaissance de la Palestine par la Norvège, l’Irlande, l’Espagne, la Slovénie et, récemment, l’Arménie.
Face à cette annonce, Jérusalem discute activement de mesures de rétorsion. Selon des médias israéliens, plusieurs options sont à l’étude : l’extension de la souveraineté israélienne à certaines parties de la Cisjordanie – annexion soutenue par une majorité des députés de la Knesset –, la fermeture du consulat général de France à Jérusalem, qui assure des services consulaires aux Palestiniens, et le rappel de l’ambassadeur d’Israël en France. Les dirigeants israéliens cherchent également à coordonner leur stratégie avec Washington pour éviter que d’autres pays ne rejoignent l’initiative française. Certains suggèrent d’agir rapidement pour envoyer un signal dissuasif, quand d’autres préconisent d’attendre l’officialisation de la reconnaissance en septembre.
Les appels à une réaction ferme proviennent notamment des partis de droite. Le ministre de la Justice, Yariv Levin, et le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, ont plaidé pour l’imposition de la souveraineté israélienne sur tout le bassin du Jourdain. Le conseil des colons, qui représente les implantations de Judée Samarie, demande que la déclaration non contraignante votée par la Knesset – rejetant toute souveraineté palestinienne à l’ouest du Jourdain – soit traduite en actes. Des députés du Likoud appellent à la fermeture immédiate du consulat français à Jérusalem, considéré comme un « ambassade de facto du gouvernement palestinien ». D’autres responsables encouragent les Juifs de France à émigrer en Israël, voyant dans la position de Paris la preuve que leur avenir est ailleurs. En parallèle, des commentateurs proches de la droite suggèrent d’autres sanctions : suspendre le transfert des taxes collectées pour l’Autorité palestinienne, ou mettre fin à la coopération sécuritaire avec elle.
L’Élysée n’est pas parvenu à convaincre ses partenaires européens et nord‑américains de se joindre à son projet initial, élaboré avec Riyad : une reconnaissance concertée par la France, le Royaume‑Uni et le Canada, adossée à une pression diplomatique sur les États arabes pour qu’ils adoptent une attitude plus conciliante envers Israël. Les Britanniques et les Canadiens, soucieux de ne pas s’aliéner l’administration américaine, ont décliné l’invitation. Faute d’alliés, Emmanuel Macron a décidé d’avancer seul, tout en espérant rallier d’autres États d’ici septembre. Dans sa lettre au président palestinien Mahmoud Abbas, il souligne que la reconnaissance doit s’accompagner de garanties : démilitarisation de l’État palestinien, reconnaissance pleine et entière d’Israël et sécurité régionale. Ces conditions visent à rassurer l’opinion israélienne et les pays occidentaux qui craignent de conforter le Hamas.
Jforum.fr