Une tribu oubliée rejoint Israël

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Présentée par le Premier ministre Binyamin Netanyahou et le ministre de l’Alya et de l’Intégration Ofir Sofer, avec l’appui du ministre des Finances Betsalel Smotrich et du ministre Zeev Elkin, la décision prévoit une première phase chiffrée à environ 90 millions de shekels. Ce budget doit couvrir l’organisation des vols, le processus de conversion, l’hébergement en centres d’intégration, les allocations de départ, l’apprentissage de l’hébreu et l’accompagnement vers les études et l’emploi. Une seconde étape, programmée jusqu’en 2030, finalisera l’arrivée de plusieurs milliers d’autres membres de la communauté.

Les Bné Menaché vivent principalement dans les États du Mizoram et du Manipur, au nord-est de l’Inde. Ils appartiennent aux tribus Kuki-Chin et Mizo et portent un récit identitaire singulier : selon leur tradition, ils descendraient d’une des « tribus perdues » d’Israël, exilée il y a plus de 2 700 ans. À partir des années 1970, une partie de ces groupes a progressivement adopté le judaïsme, abandonnant les pratiques chrétiennes ou animistes qui dominaient jusque-là, et se tournant résolument vers Sion. On estime aujourd’hui la communauté à environ 10 000 personnes, réparties à peu près pour moitié entre Israël et l’Inde.

Depuis plus de vingt ans, près de 4 000 Bené Menaché ont déjà immigré en Israël dans le cadre de décisions gouvernementales successives et grâce au travail d’organisations spécialisées. Installés dans plusieurs villes de la périphérie – notamment en Galilée, dans la vallée de Jezréel ou encore à Sderot et Kiryat Shmona – ils se sont progressivement intégrés au tissu social israélien. Certains servent aujourd’hui dans l’armée, d’autres travaillent dans l’éducation, les services ou l’industrie, tout en préservant des traditions culturelles propres, mélange de coutumes locales indiennes et de vie juive.

La nouvelle décision entend aller au bout de ce processus. Conformément aux règles adoptées en 2007 pour l’accueil de groupes venant en Israël en vue de leur conversion et de leur naturalisation, une première délégation officielle doit partir en Inde dans les jours à venir. Elle comprendra des représentants du Grand Rabbinat, des services de conversion, du ministère de l’Immigration, de l’Autorité de la population et de l’immigration, du ministère des Affaires étrangères et de l’Agence juive. Leur mission : vérifier l’éligibilité religieuse et administrative des candidats, établir les listes finalisées, puis organiser leur arrivée avec un visa spécifique, avant le processus de conversion en Israël.

L’implantation des nouveaux arrivants se fera principalement à Nof HaGalil et dans d’autres villes du nord du pays, dans le cadre d’un plan plus large de renforcement de la Galilée. Le nord d’Israël, longtemps considéré comme une périphérie à la fois sociale et sécuritaire, devient ainsi un laboratoire d’intégration : y cohabitent populations juives venues du monde entier, minorités arabes israéliennes, nouveaux immigrants et familles installées depuis plusieurs générations. Le maire de Nof HaGalil, associé de près au projet, voit dans l’arrivée des Bené Menaché une opportunité démographique, économique et symbolique pour sa ville.

En toile de fond, la situation dans le Manipur et le Mizoram pèse lourd. Depuis 2023, la région a été secouée par des violences interethniques, forçant des centaines de familles Bnei Menashé à fuir leurs maisons et à chercher refuge dans des zones plus sûres. Ces tensions locales ont renforcé le sentiment d’urgence au sein de la communauté et chez ses soutiens en Israël, qui plaident depuis longtemps pour une accélération de l’aliya. Pour les familles déjà installées en Israël, ce plan gouvernemental est d’abord une promesse de réunification : parents, enfants et grands-parents parfois séparés depuis des années peuvent espérer se retrouver, cette fois de manière durable.

Le défi, désormais, sera de transformer cette décision en réussite concrète sur le terrain : offrir un accompagnement sérieux à des immigrants venus d’une région rurale, maîtrisant parfois mal l’anglais, et encore moins l’hébreu ; leur permettre d’accéder à un logement digne, à des emplois stables et à un système éducatif adapté. Mais pour Jérusalem, l’enjeu dépasse la seule question sociale : en complétant l’aliya des Bené Menaché, l’État d’Israël réaffirme sa volonté d’accueillir des communautés éloignées géographiquement, mais profondément attachées à l’idée de « retour » sur la terre de leurs ancêtres.

Jforum.fr

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