
Le Congrès sioniste s’enflamme à Jérusalem
Le 39ᵉ Congrès sioniste mondial devait incarner le retour à l’unité après deux années de tempêtes politiques et sécuritaires. Plus de mille délégués venus de dizaines de pays se sont retrouvés à Jérusalem pour trancher budgets, orientations et nominations des « institutions nationales » — au premier rang desquelles l’Organisation sioniste mondiale (WZO) et le KKL-JNF. Mais une annonce du Likoud a retourné l’hémicycle : la proposition de nommer Yair Netanyahu, fils du Premier ministre, à la tête du département de la diplomatie publique (hasbara) de la WZO, un poste doté d’attributions et d’avantages comparables à ceux d’un ministre.
La suite a été fulgurante. Les blocs de centre-gauche et de centre-droit, qui venaient d’acter un partage du pouvoir inédit, ont gelé leur accord. Les votes de nomination ont été suspendus et le Congrès a décidé de prolonger ses travaux de deux semaines pour tenter de retisser un compromis acceptable. Dans les travées, l’indignation a réuni des opposants politiques rarement alignés, et même des voix à droite ont dénoncé une décision jugée inopportune et déstabilisatrice pour des institutions censées dépasser la mêlée partisane.
Au-delà de la querelle de personnes, l’enjeu est stratégique. La WZO, le KKL-JNF et l’Agence juive pèsent plus d’un milliard de dollars par an et irriguent des politiques concrètes : éducation, implantation, lien Israël-diasporas, projets d’infrastructure. Confier la hasbara à une personnalité clivante reviendrait, selon les détracteurs, à brouiller le message international d’Israël et à transformer un levier de rassemblement en champ de bataille idéologique. À l’inverse, les partisans de la nomination défendent l’idée d’un leadership offensif face à une guerre d’opinion mondialisée, et voient dans la crise actuelle une épreuve de force classique avant un nouvel équilibre.
Dans cette optique, plusieurs figures publiques ont proposé des alternatives plus consensuelles pour la diplomatie publique. L’opposition a poussé des personnalités devenues, depuis le 7 octobre, des porte-voix respectés à l’étranger, comme Ruby Chen, engagé au sein du quartier général des familles d’otages. Le message sous-jacent est limpide : pour être audible et rassembler, la hasbara doit être portée par des profils à la fois compétents, crédibles et fédérateurs — pas par une nomination perçue comme un « arrangement » partisan.
Le contexte extérieur a fini de tendre l’atmosphère : la journée de clôture a été bousculée par une mobilisation ‘harédite massive contre la conscription, qui a paralysé une partie de Jérusalem et contraint le Congrès à remanier son agenda. La juxtaposition de ces crises — querelle institutionnelle dedans, tensions sociales dehors — a offert un miroir sans fard de la période : Israël et le mouvement sioniste affrontent simultanément bataille d’images, défis de gouvernance et clivages profonds.
Pour sortir par le haut, la priorité doit rester l’intérêt national : une diplomatie publique efficace, appuyée sur le mérite et la responsabilité ; des institutions exemplaires, capables de rassembler Israël et les diasporas ; une gouvernance qui protège les citoyens et renforce la résilience du pays. Le Congrès a deux semaines pour réparer la confiance. Choisir la compétence plutôt que la polémique, c’est servir Israël — et donner au sionisme, à l’horizon 2048, le visage de l’unité et de la dignité.
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