Un crime médiéval en Angleterre éclaire l’histoire juive dans ce pays

Un crime médiéval en Angleterre éclaire l’histoire juive dans ce pays

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Les analyses génétiques visant à résoudre des crimes historiques n’ont pas très bonne réputation dans le monde académique, mais un cold case récent apporte de nouvelles informations sur l’histoire de la communauté juive ashkénaze.

Tout démarre en 2004, lors de la construction d’un immense centre commercial à Norwich, grande cité de l’est de l’Angleterre quand les pelleteuses découvrent des squelettes humains, une fouille d’urgence est entreprise. Réalisés rapidement, les relevés des premiers archéologues et les analyses des corps offrent déjà des indices troublants. Au moins dix-sept personnes semblent avoir été jetées là, six adultes et onze enfants.

Aucune trace de maladie, lèpre, peste ou tuberculose. En outre, le puits se situe en bordure du quartier juif médiéval. Enfin, une analyse au carbone 14 date approximativement les corps de la fin du XIIe, début du XIIIe siècle. «  Cela croisait des épisodes connus de violence antisémite, rappelle Ian Barnes et nous avons conclu par triangulation qu’ils pouvaient témoigner d’un des crimes collectifs subis par les Juifs anglais. »

La communauté juive britannique en a connu plusieurs. Venue de Rouen, à partir de 1066 avec Guillaume le Conquérant, elle s’est établie majoritairement à Londres, mais Norwich était la deuxième plus grande communauté . Protégés par le roi, profitant du monopole de l’usure imposé par l’Eglise, les Juifs concentrent une partie de la colère du peuple comme de la noblesse locale. En 1144, la découverte du corps poignardé d’un apprenti tailleur de 12 ans, William, un jour de Vendredi saint, provoque les premières accusations de meurtres rituels, mais, c’est en 1190, après le départ de Richard Cœur de Lion pour la troisième croisade, que se déchaînent à travers le royaume les pires violences.

La preuve n’est pas encore tout à fait apportée qu’il s’agit bien de cet épisode historique. Mais les indices semblent solides. Aussi les ossements sont inhumés, en 2013, selon le rituel juif, mais « entre-temps, les techniques de recherche de l’ADN ancien s’étaient améliorées, j’ai demandé si nous pourrions procéder à de nouveaux prélèvements , explique Ian Barnes.  

D’abord, les scientifiques ont précisé la fourchette temporelle de la datation : entre 1161 et 1216. Le pogrom de 1190 tombe au milieu. De plus, l’analyse détaillée de leurs génomes et la comparaison avec les populations actuelles attestent que c’est bien des Juifs ashkénazes d’aujourd’hui qu’ils sont les plus proches.

Comme pour d’autres minorités, ces particularités génétiques proviennent de ce que les spécialistes nomment un goulet d’étranglement, à savoir un moment où une population s’est trouvée brutalement réduite. La théorie dominante voulait que, chez les Juifs ashkénazes, celui-ci soit intervenu il y a entre cinq cents et sept cents ans. « Nos résultats montrent que c’est antérieur » , conclut Mark Thomas. Quand ? Où ? L’étude reste très prudente. La période court de la destruction du second temple de Jérusalem, en 70 de l’ère chrétienne, au XIIe siècle, indique-t-elle.

Le généticien se découvre: « Je pense qu’il s’agit sans doute d’un effet lié à la fondation de la population ashkénaze, vers l’an 700 ou 800, dans le nord de la France ou l’ouest de l’Allemagne. » D’autres cold cases permettront peut-être de confirmer son pronostic.

Source : Le Monde (résumé par Israël Valley)

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