Rav ‘Hayim Vital à Tsfat

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Le’ilouï nichmat rav Chalom zatsa’’l, rav Avraham zatsa’’l, tous nos disparus et en particulier ceux pour lesquels personne n’étudie ni ne prie. A nos frères exterminés, de tous lieux et toutes époques, des plus anciens aux tout récents, que Hachem venge leur sang. Une guérison rapide et complète pour tous nos malades et blessés. Que nos frères et sœurs prisonniers rentrent en paix. Que nos soldats et soldates qui combattent pour notre protection reviennent en bonne santé. Que ceux et celles tombés au combat pour notre sécurité intercèdent en notre faveur.

Nous reproduisons ici partiellement, en l’adaptant au sujet du jour, le texte du 15 décembre 2021. Ces lignes sont de nouveau spécialement dédiées à celle dont chaque pore transpirait un amour inconditionnel et débordant pour son peuple, Marcelle bath Louana za’l, ma chère grand-mère.

Rav ‘Hayim Vital vécut à une époque et un lieu incroyable : Tsfat, 500 ans en arrière. On pouvait y croiser rabbi Yossef Caro, rav Moché Cordovéro, rav Moché Alchikh ou rav Chelomo Elkabets. La Kedoucha et le niveau en Tora y étaient indescriptibles.

Vers l’âge de 27 ans, il rencontra le Ari zal et devint le seul habilité à mettre par écrit ses paroles. Au vu de la quantité d’enseignements phénoménale, rav ‘Hayim oubliait au fur et à mesure ce qu’il apprenait. Grâce aux eaux du puits de Myriam qu’il lui fit boire, le Ari lui permit de tout retenir et lui annonça qu’il était dans ce monde spécialement pour lui. Le temps pressait, le Ari sachant sa fin proche. Ils ne disposèrent que de 18 mois ensemble, puis le Ari nous quitta.

Depuis, l’intégralité de l’étude de la Kabbala, partout et par tout le monde, repose donc sur ces seuls 18 mois et les écrits de rabbi ‘Hayim Vital.

Une question simple se pose : pourquoi tout cela ?  Résumons la situation : aucun élève ne saisit vraiment en profondeur ce que le Ari enseigne (warning : nous parlons là de niveaux inaccessibles pour nous, chacun des élèves concerné étant un géant en Tora et Midoth). Il a peu de temps car il sait qu’il va quitter ce monde relativement jeune, rabbi Hayim Vital comprend mais oublie. Alors pourquoi le Ari zal ne prend-il pas lui-même sa plume, pourquoi toutes ces « complications » ? Si je dois planter un clou, pourquoi le demander à un non bricoleur, alors que j’ai un marteau et sais moi-même le faire plus vite et mieux ?

Plusieurs réponses peuvent être apportées. La première est que parfois nous devons duper le Yétser, afin qu’il n’empêche pas certaines grandes choses de s’accomplir (royauté de David hamélekh par exemple par le biais de Ruth).

La seconde est que la grandeur d’un homme, quel que soit son niveau, peut se voir pour qui a de bons yeux. Parfois au travers de ses connaissances, parfois à son comportement (sa résistance à l’alcool, de traiter les affaires ou son caractère fougueux… cf. Erouvin 65b), parfois simplement à sa façon de marcher, parler (ou pas) ou d’ouvrir une porte. Mais son but profond ici-bas, personne ne peut le connaître avant le moment de rendre des comptes.

Le Ari zal eut cependant droit à une révélation : sa mission était d’enseigner à rav ‘Hayim. Malgré l’immensité totalement inimaginable de son niveau, le Ari était principalement ici-bas pour un autre. L’élève représente donc la raison d’exister du maître, et non l’inverse. Le « petit » (re warning) permet au « grand » d’exister. C’est là un incroyable ‘Hidouch.

Il est connu que le Gaon de Vilna a voulu monter en Erets mais n’est pas allé au bout de son voyage, pour des raisons inconnues (visiblement certains « empêchements » lui ayant fait comprendre que le moment n’était pas arrivé, étant un Nitsots de Moché rabbénou…)

Dans le livre « ‘Aliot Eliahou » du rav Lévin (1894), l’histoire suivante est ramenée : dans ses préparatifs de voyage, le Gaon fit envoyer un petit mot à un certain reb Leib. Celui-ci, suite à des soucis financiers, était devenu simple ouvrier chez un riche patron. L’émissaire du Gaon demanda donc à voir reb Leib, afin de lui remettre en main propre le courrier. Les réponses des villageois furent « Quel reb Leib ? », « Non, ici il y a juste Leib, pas de reb Leib. Voici où il travaille…». Une fois son patron identifié, l’émissaire dut lui avouer que l’expéditeur n’était autre que le Gaon en personne. Le patron trembla en lisant sur l’enveloppe « à l’attention du rav Eloki Leib », le saint rav. Le Gaon, que l’on ne peut soupçonner d’exagération, qualifiait l’ouvrier d’un incroyable niveau spirituel. Ce dernier, trouvé là en train de réciter des Tehilim, lut le mot, puis le jeta au feu, sans répondre. L’émissaire insista pour obtenir au moins une réponse à rapporter au Gaon. Et reb Leib se contenta d’un « pas besoin ».

N’y tenant plus, le patron le pressait chaque jour de s’expliquer, et de peur de perdre son travail, reb Leib dut un jour avouer le dessous des cartes : le Gaon voulait qu’il l’accompagne dans sa Alya. Mais il répondit « pas besoin », car il savait qu’il ne parviendrait pas à destination à cause d’ «empêchements ».

Le Gaon avait, comme évoqué ci-dessus, de « bons yeux », même de loin. Mais nous ? Savons-nous lire la grandeur d’un homme sur son front ? Chaque Juif doit mériter notre plus grand respect, grand ou petit suivant nos propres critères fallacieux, amateur de carpe farcie ou de couscous, religieux ou pas. Le Midrach (Beréchit Rabba 58) nous enseigne au nom de rabbi Chim’on bar Yo’haï que l’amour, comme la haine, détériore notre jugement (cf. Sanhédrin 29a sur les Passoul Laédout) : אמר רבי שמעון בן יוחאי אהבה מקלקלת את השורה ושנאה מקלקלת את השורה

Etonnamment, le même comportement que nous apprécions chez un être aimé, deviendra objet de dénigrement chez la personne haïe. Qui n’a pas connu de bons amis ou conjoints qui, après rupture, s’accusaient de tous les maux, du jour au lendemain alors que rien n’avait réellement changé ?

L’amour permet donc de tout voir en rose, même ce qui n’est pas reluisant. En chérissant mon prochain, comme ma propre personne (parachath Kedochim 19,18), alors mon jugement sera  orienté pour le bien (cf. Avoth 1,6).

Qu’est-ce que le froid ? C’est l’absence de mouvement. Si aucune particule élémentaire ne bouge, alors aucune chaleur n’est créée, et on peut atteindre le zéro absolu (-273,15 °C). Existe-t-il une limite à la chaleur ? Pratiquement aucune (limite de Planck, théoriquement de 141.700.000.000.000.000.000.000.000.000.000° C. La Tora est de feu, l’amour du prochain n’a aucune limite, nous devons y mettre toute notre fougue et notre chaleur. Le « petit » permet peut-être au « grand » d’exister.

En cette période d’unité, le Lachon hara’ et les querelles doivent rester au placard. Céder devant l’autre, pour que Hachem fasse céder nos ennemis. Dire du bien des autres, pour que l’on dise du bien de nous Là-Haut. Libérer notre amour pour, qu’à l’instar de Barekh ‘Aleinou de ce soir, Hachem nous déverse le Sien sur nous et que nous ayons le mérite de retrouver tous nos prisonniers.

Que des bonnes nouvelles !

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