Officiellement, les relations entre Moscou et Pékin s’affichent comme solides, stratégiques et fondées sur des intérêts partagés. Pourtant, un document confidentiel des services de renseignement russes, récemment révélé, trace un portrait bien plus nuancé et préoccupant de cette alliance. Selon ce rapport émanant d’une unité secrète du FSB, la Chine serait perçue comme la principale menace à long terme pour la sécurité russe, malgré les déclarations officielles d’amitié.
Une coopération affichée, une méfiance profonde
Depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022, la Russie a redirigé une grande partie de ses ressources militaires et de renseignement vers l’Ouest. Profitant de ce vide stratégique, Pékin aurait multiplié ses efforts pour recruter des fonctionnaires russes, des scientifiques, des journalistes, et des entrepreneurs proches du Kremlin. Le rapport évoque une véritable « guerre du renseignement », qualifiant la Chine d’« ennemi ultime ».
Une curiosité stratégique de Pékin
Le rapport souligne également la stratégie de la Chine consistant à observer la guerre en Ukraine pour en tirer des enseignements militaires. Des responsables chinois, liés aux industries de défense, se seraient rendus en Russie dès les premiers jours du conflit afin d’étudier les tactiques russes, en particulier l’usage des drones, les réponses aux armes occidentales, et les systèmes de commandement sur le terrain.
Ambitions territoriales et préoccupations stratégiques
La crainte d’une expansion territoriale chinoise n’est pas nouvelle en Russie, mais elle semble avoir gagné en intensité. Pékin remet en question des accords historiques signés au XIXe siècle, à l’époque où la Russie a annexé des territoires alors revendiqués par la Chine, notamment autour de Vladivostok. En 2023, la publication d’une carte officielle chinoise mentionnant les noms historiques chinois de villes russes a ravivé ces tensions.
Le FSB s’alarme également de la stratégie d’influence chinoise en Asie centrale, notamment en Ouzbékistan. Des programmes de coopération en matière humanitaire ou commerciale pourraient servir de leviers d’influence dans une région que Moscou considère encore comme relevant de sa sphère d’influence post-soviétique.
Une dépendance économique difficile à rompre
Malgré ces inquiétudes, le document recommande aux agents russes de faire preuve de retenue, soulignant que toute action contre Pékin doit être approuvée au plus haut niveau. Car dans un contexte de sanctions occidentales, la Russie est devenue économiquement dépendante de la Chine, principal acheteur de son pétrole et fournisseur de composants électroniques et militaires.
Des entreprises chinoises ont remplacé de nombreuses marques occidentales qui ont quitté le marché russe. En parallèle, les deux pays annoncent des coopérations ambitieuses, allant de la construction d’une base lunaire à des productions cinématographiques conjointes.
Aux États-Unis, certains stratèges voient dans ces tensions une opportunité diplomatique. Pour des figures comme Donald Trump ou Marco Rubio, un rapprochement tactique avec Moscou pourrait éloigner la Russie de la Chine, évitant un axe sino-russe trop puissant face aux intérêts occidentaux.
Le rapport du FSB, en révélant la fragilité de l’alliance actuelle, alimente cette thèse. Mais il peut aussi refléter une vision réaliste du Kremlin : malgré la méfiance, Vladimir Poutine semble prêt à continuer son partenariat avec Pékin, estimant qu’il en tire plus d’avantages que de risques. Une posture qui pourrait façonner durablement l’équilibre géopolitique mondial.
Jforum.fr
3 empires – Russie, Chine et USA – qui vont devoir vivre ensemble, entre coopération et rivalités.