Algérie : Boualem Sansal à nouveau condamné, l’issue politique négociée reste possible
La cour d’appel d’Alger a confirmé ce mardi matin la peine de 5 ans de prison ferme pour l’écrivain. La partie n’est pas pour autant terminée : Paris attend et espère une libération dans le cadre d’une grâce présidentielle.
C’était le scénario le plus prévisible : la cour d’appel d’Alger a confirmé ce mardi 1er juillet la peine prononcée contre Boualem Sansal : cinq ans de prison ferme et 500.000 dinars d’amende (environ 3500 euros).
L’écrivain franco-algérien de 80 ans avait déjà été condamné en première instance, le 27 mars, pour «atteinte à l’unité nationale», «outrage à corps constitué», «pratiques de nature à nuire à l’économie nationale» et «détention de publications menaçant la sécurité du pays». En première instance comme en appel, le parquet avait requis 10 ans de réclusion et un million de dinars d’amende (7000 euros).
La justice ayant tranché, les regards se tournent donc désormais vers le président algérien Abdelmadjid Tebboune, le seul habilité à accorder une mesure de grâce. Paris mise d’ailleurs sur un «geste humanitaire» comme l’a souvent répété le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot. La logique voudrait que le chef de l’État algérien intervienne à l’occasion des grâces accordées le 5 juillet, à l’occasion du 63e anniversaire de l’indépendance du pays.
C’est du moins la volonté du premier ministre François Bayrou qui a réagi à la confirmation de la peine de Boualem Sansal en espérant que «des mesures de grâce, notamment en fonction de la santé de notre compatriote, soient prises.» À ses côtés, Bruno Retailleau a affirmé qu’il ne voulait «gâcher aucune chance, d’ici notamment la fin de la semaine, pour que Boualem Sansal puisse être libéré.» Le Quai d’Orsay, lui, regrette une décision «à la fois incompréhensible et injustifiée.» «La France appelle les autorités algériennes à faire preuve d’un geste de clémence et à trouver une issue rapide, humanitaire et digne à la situation de notre compatriote». Même son de cloche du côté du patron de Renaissance, Gabriel Attal, qui vise directement le régime d’Alger : «Aujourd’hui, une fois de plus, la liberté et le droit ont été bafoués», s’est insurgé l’ancien premier ministre sur son compte X, avant d’affirmer que Boualem Sansal «est victime d’un simulacre de justice». «Son seul tort est d’être libre, Français, d’écrire et de s’exprimer», a-t-il martelé.
Cela permettrait à l’Algérie de clore le dossier sans avoir à renier l’indépendance de sa justice, un geste que la France interpréterait comme un signal d’apaisement pour sortir du dernier conflit bilatéral provoqué par l’expulsion, en avril, des douze fonctionnaires français en poste en Algérie.
Si la grâce n’était pas accordée rapidement, les conséquences diplomatiques pourraient être lourdes. Le retour de Stéphane Romatet, l’ambassadeur de France en Algérie, rappelé à Paris le 15 avril, pourrait être compromis. Et les visas diplomatiques bloqués depuis des mois afin que les consuls, diplomates et autres fonctionnaires nommés puissent prendre leurs fonctions, resteraient gelés. La situation de fait de quasi-rupture diplomatique pourrait durer, d’autant que la condamnation, dimanche en Algérie, d’un journaliste sportif français, Christophe Gleizes, à sept ans de prison ferme pour « apologie du terrorisme », ne contribue pas à détendre l’atmosphère.