Bien que les pays arabes aient officiellement condamné l’attaque américaine, des analystes de la région ont clairement désigné Téhéran comme responsable : « Le programme nucléaire a pavé sa route vers l’enfer » • Un commentateur des Émirats arabes unis : « Si l’Iran a déplacé son uranium, elle a de fait levé la menace nucléaire » • Un analyste saoudien à Israel Hayom : « Il est nécessaire de changer le régime iranien et d’extirper ses ramifications au Moyen-Orient »
Israël Hayom – Shahar Kleiman
Jamais des larmes de crocodile n’ont semblé aussi transparentes que celles versées par l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis au cours des dernières 24 heures. Leurs condamnations des frappes américaines n’étaient qu’un rideau diplomatique dissimulant une joie à peine contenue.
En coulisses, des analystes du Golfe ont expliqué comment Téhéran s’est elle-même dirigée vers l’abîme à l’aide de la hache de sa révolution. Une économie corrompue, l’écrasement systématique de toute dissidence, et la recherche désespérée de survie ont conduit le régime à développer l’arme nucléaire – mais ce qui devait être un remède est devenu un poison. Selon eux, c’est ce programme nucléaire qui a conduit aux frappes israéliennes et américaines, et désormais, le destin de la révolution islamique est incertain.
Même l’accusation iranienne selon laquelle l’uranium aurait été dissimulé dans un lieu secret ne convainc pas : « Si c’est vrai, les États-Unis et Israël savent déjà où il a été transféré. Cela signifie probablement que l’Iran a démonté une partie de son dispositif nucléaire, et que toute frappe future serait ciblée et à impact limité. En réalité, l’Iran a retiré la menace nucléaire de la table », a expliqué Amjad Taha, analyste basé aux Émirats.
Changement de cap à Riyad et à Abou Dhabi
Ces dernières années, l’Arabie saoudite et les Émirats ont changé leur approche vis-à-vis de l’Iran, délaissant la confrontation pour des voies diplomatiques. Il y a environ trois ans, Téhéran, Riyad et Abou Dhabi ont renoué leurs relations, rouvert des ambassades et organisé des visites de hauts responsables. En avril dernier, le ministre saoudien de la Défense, Khaled Ben Salman, a rencontré le guide suprême Ali Khamenei avec un message urgent : il existe une brève fenêtre pour conclure un accord nucléaire avec l’administration Trump, sinon Israël attaquera. L’ayatollah a refusé d’écouter.
Un chercheur saoudien m’a expliqué dans le passé que le royaume avait choisi la diplomatie parce qu’il ne comptait plus sur les États-Unis pour gérer les crises régionales. Ce fut le cas au Yémen, où Riyad a fini par soutenir une trêve fragile avec les Houthis. Reste à voir si la politique étrangère saoudienne subira un nouveau tournant après la décision dramatique de Trump.
Un commentateur saoudien de haut niveau m’a confié que « cette frappe américaine est un événement positif et bénéfique pour la région et pour le monde, qui fait avancer la paix au Moyen-Orient. Je la soutiens pleinement. Il est nécessaire de renverser le régime iranien actuel et d’éradiquer ses tentacules au Yémen, en Irak et au Liban ». Il a toutefois souligné que la paix doit désormais être recherchée, mais uniquement sur la base de l’initiative saoudienne, qui inclut la création d’un État palestinien.
Inquiétudes dans le Golfe
À Riyad, on craint toutefois un effet de ricochet. Des médias étrangers rapportent une mobilisation accrue des services de sécurité. L’Arabie saoudite n’est pas la seule : tous les pays du Golfe qui hébergent des bases américaines sont passés en alerte renforcée après les frappes américaines contre les sites nucléaires iraniens. À Bahreïn, par exemple, est stationné le quartier général de la 5e flotte américaine. Ce n’est pas un hasard si le royaume a annoncé que 70 % des ministères et administrations fonctionneraient désormais à distance. De plus, ces derniers jours, des hauts responsables du Golfe ont déclaré être prêts à divers scénarios d’urgence, et ont activé un centre de gestion de crise commun.
Khamenei acculé
Ali Khamenei, reclus dans son bunker, n’a que peu d’options. Étendre le conflit au Golfe – par une attaque contre les forces américaines ou par la fermeture du détroit d’Ormuz – pourrait entraîner l’implication de nouveaux pays, alors que l’espace aérien de Téhéran reste largement exposé. En revanche, céder aux exigences américaines et renoncer au programme nucléaire serait perçu comme un signe de faiblesse, risquant d’encourager des protestations internes qui menaceraient la stabilité du régime. Il semble qu’une erreur de sa part ne soit plus qu’une question de temps.