Alors que les négociations pour la libération des otages israéliens avancent, Israël élève une requête inhabituelle mais grave : éviter que les prisonniers ne soient suralimentés juste avant leur remise. Le coordinateur pour les otages et disparus, Gal Hirsch, a remis à la Croix-Rouge une note d’experts du ministère de la Santé, précisant les quantités et modalités d’alimentation souhaitables pour les détenus. Il craint que, lors d’un précédent échange, les ravisseurs aient donné des portions excessives peu avant la libération, ce qui aurait pu menacer la vie des otages affaiblis.
L’enjeu est de taille : 48 otages, vivants ou décédés, sont concernés. La remise des vivants s’annonce en une seule phase, selon des sources proches des négociations. Quant aux dépouilles des morts, elles devront être rassemblées à l’avance, comme cela a été confirmé par le Hamas — qui a déjà dit qu’il se préparait à récupérer les corps, sous condition d’un arrêt des raids aériens.
Pourquoi la suralimentation peut être mortelle
Chez des personnes en état de sous-nutrition prolongée ou affaiblies, une réintroduction trop rapide ou excessive de nourriture peut provoquer des déséquilibres métaboliques — troubles électrolytiques, œdèmes, voire complications cardiaques. Dans un contexte de captivité, où les détenus sont souvent malnutris, des quantités inappropriées peuvent constituer un véritable danger. D’où l’importance de protocoles stricts de réalimentation, qui respectent un seuil calorique progressif et une composition contrôlée.
Des témoignages d’anciens otages libérés indiquent qu’ils avaient reçu peu avant leur remise des repas lourds, que leur corps n’était pas prêt à assimiler. Hirsch s’appuie sur ces récits pour justifier son alerte : « (Ils) ont été servis avec des quantités inhabituelles », a-t-il déclaré.
Le rôle de la Croix-Rouge : pivot entre humanité et neutralité
La Croix-Rouge, en tant qu’intermédiaire, se trouve au cœur de cette délicate opération humanitaire. elle est habilitée à proposer, à surveiller et à faciliter l’application des normes de traitement humanitaire. Elle devra, si possible, vérifier sur le terrain que les instructions nutritionnelles sont bien respectées et s’assurer que les otages soient transportés vers des soins immédiats.
Ses équipes devront emporter dès le lieu de la remise tout le matériel médical nécessaire pour détecter et corriger toute complication liée à la réalimentation. Le défi est logistique, médical et diplomatique à la fois.
Réponse du Hamas et conditions posées
Dans le passé, le Hamas avait déjà affirmé ne pas abuser intentionnellement de la nourriture des otages, arguant qu’ils recevaient « ce que mangent nos combattants ». Cette fois, certaines sources arabes rapportent qu’il accepterait — sous condition — de respecter les directives de la Croix-Rouge. Cependant, ce consentement est soumis à des conditions : notamment la création de couloirs humanitaires ouverts, et l’arrêt des bombardements pendant les livraisons de nourriture. Le Hamas précise que toute livraison doit être assurée dans toutes les zones de la bande de Gaza, sans entrave.
Ce positionnement illustre combien les détails apparemment techniques — ici la nutrition — peuvent s’intégrer au jeu diplomatique : chaque concession dans le protocole est soumise à des contreparties stratégiques.
Une coordination cruciale dans un contexte fragile
Nous sommes à un moment sensible. Les pourparlers entre l’État israélien, le Hamas et les médiateurs égyptiens se poursuivront prochainement. L’aspect nutritionnel, inattendu, montre que même les détails les plus anodins peuvent engager des vies. Israël, en imposant cette exigence, ne cherche pas à polémiquer, mais à éviter que l’un de ses citoyens ne soit fragilisé par un geste mal calibré.
Ce souci technique pourrait paraître secondaire, mais il reflète une vigilance à 360 degrés : la sécurité, la santé et la dignité des otages ne peuvent pas être sacrifiées à l’approximation. La coordination médicale, logistique et diplomatique sera scrutée de près.
L’initiative de Gal Hirsch de contrôler la nutrition des otages avant leur libération témoigne d’une attention méticuleuse portée à chaque détail susceptible de mettre leur vie en danger. Israël ne peut tolérer qu’un geste humanitaire devienne un piège fatal — surtout pour des personnes déjà affaiblies par des mois de captivité. En imposant ce protocole rigoureux, l’État hébreu réaffirme sa responsabilité envers ses citoyens, sa vigilance face au Hamas et son exigence de préservation de la dignité humaine. Tout compromis doit s’inscrire dans ce cadre strict : la sécurité, la santé et la vie ne sauraient être négociables.
Jforum.fr – Illustration : Flash 90