La montagne qui protège le nucléaire iranien : le secret géologique de Fordo

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L’installation nucléaire de Fordo a été construite en profondeur dans une chaîne de montagnes, en exploitant les propriétés naturelles de la roche comme protection. Une combinaison de géologie et d’ingénierie avancée lui confère une forte immunité contre les attaques. Le choix de ce site est considéré comme particulièrement stratégique, et des experts révèlent aujourd’hui les secrets de cet emplacement exceptionnel, que seule « la mère de toutes les bombes » (MOAB) pourrait endommager.

Ynet

Située près de la ville de Qom, l’installation de Fordo est l’un des sites les plus importants et les mieux fortifiés du programme nucléaire iranien. D’après les publications, elle se trouve à une profondeur de 80 à 90 mètres sous la surface et est protégée par du béton épais et des systèmes de défense aérienne. Cette localisation rend presque impossible toute attaque conventionnelle. Seule la MOAB américaine pourrait lui causer des dégâts significatifs.

Selon l’AIEA, le site a servi à enrichir de l’uranium à des niveaux très élevés (jusqu’à 60 % et plus), proches des 90 % requis pour la fabrication d’une arme nucléaire. Cette capacité réduit considérablement le temps nécessaire à l’Iran pour produire une bombe, ce qui en fait une cible centrale pour les frappes israéliennes.

Fordo abriterait environ 2 000 centrifugeuses, en majorité de type avancé IR-6, permettant un enrichissement rapide. Aux côtés du site de Natanz, fortement endommagé récemment, Fordo est l’un des deux centres principaux d’enrichissement d’uranium en Iran. Sa protection et ses capacités en font une sorte de « plan B » stratégique pour la République islamique.

Révélé au monde en 2009, Fordo fut un point clé des négociations sur le nucléaire iranien en 2015. Après le retrait des États-Unis de l’accord, l’Iran a repris et étendu ses activités sur le site. Sa construction en profondeur dans une masse rocheuse lui offre une protection naturelle contre les frappes.

Une protection géologique naturelle

Les roches volcaniques constituent l’essentiel de la masse rocheuse de la montagne, offrant une résistance efficace aux pénétrations et aux ondes de choc. Le professeur Itzhak Makovsky (Université de Haïfa), spécialiste de la croûte terrestre, explique que Fordo est situé sur un massif formé par la collision des plaques asiatique, arabe et africaine, créant une élévation contenant des roches anciennes et dures.

Selon lui, ces montagnes conviennent à la fois à l’extraction d’uranium et à la construction de bunkers. Les travaux de creusement ont probablement nécessité des outils à base de diamant. L’emplacement a été choisi aussi pour sa proximité de Téhéran (environ 100 km), et pour sa stabilité relative vis-à-vis des séismes.

L’Iran se trouve dans une zone sismique active, au croisement de plusieurs plaques tectoniques. Un site nucléaire doit donc être conçu pour résister aux tremblements de terre. Même si les détails du renforcement sismique de Fordo ne sont pas publics, on suppose qu’il a été conçu en ce sens. Sa construction souterraine dans une masse rocheuse offre une certaine protection contre les secousses.

Le professeur Yoel Raskin (Université Bar-Ilan) précise que le site se trouve dans une région désertique, au climat similaire au Néguev. Les roches du site sont principalement de la basalte, des roches pyroclastiques, du rhyolite et de l’andésite. Contrairement aux idées reçues, certaines de ces roches sont faciles à éroder.

Il souligne que le site est situé sur une ligne de faille active, ce qui pourrait affecter sa stabilité. Le choix du site repose probablement aussi sur un compromis entre la dureté de la roche et la facilité d’excavation, permettant de créer de grands espaces pour le bétonnage.

Des structures souterraines presque imprenables

Selon le Dr Amihai Meitelman (Université Ariel), les sites souterrains comme Fordo sont extrêmement difficiles à percer. Les missiles comme la série GBU de l’armée américaine sont conçus pour cela, avec des ogives en acier très dur et des systèmes de détonation différée.

Le missile GBU-57, le plus avancé de la série, peut pénétrer jusqu’à 60 mètres. Mais selon le Dr Meitelman, les roches sédimentaires du site comme le calcaire et la dolomite peuvent être plus résistantes que le béton armé. Il est donc peu probable qu’un seul missile GBU suffise à atteindre le cœur du site.

Les fissures naturelles dans la roche influencent aussi la pénétration. Si le sous-sol est très fracturé, la pénétration pourrait être facilitée — mais cela rend aussi la trajectoire du missile moins prévisible.

Il est aussi probable que les tunnels soient renforcés de béton de l’intérieur, rendant la pénétration encore plus difficile. Plusieurs missiles devraient donc être tirés successivement au même endroit pour espérer pénétrer profondément.

La stratégie alternative : frapper les ouvertures

Une autre stratégie consisterait à frapper les ouvertures du site (entrées, sorties, conduits d’aération), qui sont ses points faibles. Ces points sont visibles et exposés, et donc vulnérables à des armes moins puissantes. Mais une telle attaque causerait sans doute moins de dégâts et serait plus facilement réparable par les Iraniens.

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