Autour de la table du Chabbath, par le rav David Gold
Cette semaine on lira deux parachayoth : Behar et Be’houkotaï. La deuxième section nous intéressera plus particulièrement car elle traite dans ses débuts d’un principe connu: la bénédiction dans la vie dépend de notre application dans les Mitsvoth.
C’est pour le public des croyants une évidence : plus la personne acquerra un haut niveau de droiture plus elle sera vectrice de bienfaits ! Ainsi le début de la paracha commence par la conjonction « Si »; : « Si vous suivez Mes décrets… alors Je donnerais la pluie en son temps, la récolte sera en profusion… et vous résiderez en paix sur votre terre… ». C’est-à-dire que la Tora énonce clairement que tout dépend de l’homme. C’est vrai pour l’œil aiguisé du croyant qui voit la main du Créateur derrière ses pas, mais cela demande un certain exercice intellectuel pour les gens plus éloignés. Par exemple lorsque l’on voit ce qui se passe avec le corona, on pourra comprendre que dans la vie il existe des facteurs non-palpables qui nous influencent qu’on le veuille ou non ! (De plus, ce corona est une grande giffle assénée au monde scientifique et à tous ceux qui se réfugient derrière ce monde et se donnent comme alibi : « Ce que je vois, je le crois mais ce que je ne vois pas… je n’y crois pas ! » Or, ce petit virus montre aux yeux de tous que la science marche dans un brouillard des plus opaques. Fin de l’aparté) A l’inverse, la Tora nous enseigne de notre paracha que la bénédiction dépend du « Si vous allez d’après Mes décrets… ». Les Sages de mémoire bénis enseignent qu’il s’agit (le décret) de l’EFFORT dans l’étude de la Tora ! Qu’est-ce que c’est que l’effort monsieur le Rabbin pour les hommes qui sont assis à longueur de journée ? On pourra prendre l’exemple de l’Avrekh (homme marié qui étudie la Tora) père de 10 enfants à Bené Brak ou Jérusalem –dans son T4- durant la période de corona. S’étant bien occupé de sa progéniture- (en particulier de enfants en bas âge, en faisant un suivi des cours de Guemara, Michna, en vérifiant le niveau de lecture, d’écriture etc.) et prendra son portable –en se plaçant au préalable dans un coin de pièce où cela dérangera le moins du monde- puis contactera son binôme (sa ‘havrouta) qui se trouve à Bené Brak ou même jusqu’à la lointaine Argentine (là-bas aussi ils sont en confinement) et étudiera un passage corsé du Talmud. La difficulté de concentration, l’écoute des fois difficiles avec les oreilles plaqués au combiné, le fait de ne pas déranger (ou de l’être) rajoutera dans la somme totale des efforts déployés pour comprendre le texte saint et en cela le salaire dans les Cieux sera décuplé. Comme la Michna l’enseigne : « Suivant l’effort, le salaire sera en conséquence… ».
On le sait, la Tora ne ressemble pas aux autres sciences. En effet, les connaissances n’ont d’autre utilité que dans la mesure où l’on en profite. Par exemple un théorème en maths ou physique n’aura d’intérêt que si on peut l’appliquer dans la vie de tous les jours. Or la Tora, c’est bien différent. L’étude n’est pas la recherche du bien-être tant espéré, mais c’est la connaissance de la volonté du Créateur. Donc lorsque les Avrékhim s’assoient sur le banc d’étude d’une manière désintéressée, alors leur étude agira sur le monde afin qu’il tourne d’une meilleure manière. Et si vous dites : rav Gold prêche toujours la bonne parole, mais alors pourquoi il y a « corona » dans le monde alors qu’il y a des Avrékhim dans le monde ? Je vous répondrais modestement que je ne suis pas prophète, mais certainement que le niveau déplorable d’éthique et de morale est descendu tellement que corona ressemble à un grand panneau placé par Hachem devant le monde entier sur lequel est écrit en gros caractères : « Fermé pour causes de travaux de ravalement ! » (l’image est donnée par rav Zamir Cohen de l’association « Hidabrout »). La Michna dans Pirké Avot enseigne : « Il n’y a d’hommes libres que ceux qui étudient la Tora. » On demandera : comment concevoir l’homme religieux comme libre, puisque sa journée est parsemée de nombreuses Mitsvoth sans compter l’étude de la Tora qui lui prend tout le reste de son temps ! Où donc est sa liberté (question bateau pour mes lecteurs qui me suivent depuis 5 années… mais c’est toujours intéressant de réviser nos classiques) ? La réponse que je vous propose, c’est qu’il existe des choses biens plus importantes que les profits et la jouissance qu’on peut tirer de ce monde. A l’image d’une magnifique parabole du Kéli Yakar sur la Mitsva marquée dans la Tora de ne pas se venger ni de garder rancune (paracha précédente, Kedochim). Il demande comment arrive-t-on à ne pas se venger sur son prochain qui s’est mal comporté vis-à-vis de nous, or c’est un trait de caractère très humain ? Il répond en donnant l’image d’un jeune garçon sur les bords d’une plage qui construit un magnifique château de sable… Seulement dans l’après-midi arrive un autre petit garçon du même âge et « ping », ce dernier met son petit pied en plein sur le donjon… Toute la construction s’écroule et notre jeune constructeur court se réfugier dans les bras de son père alors qu’il est tout en pleurs. Le pauvre petit choux gémit puis, les larmes encore coulant des yeux demande à son père : »Papa… je t’en prie assène un coup de bèche à ce méchant garçon qui a cassé mon château ! » Le père fera alors un large sourire et dira : »Mon cher David (nom d’emprunt…)… ce château n’est fait que de sable et de toutes les façons il ne devait pas passer la journée, pourquoi veux-tu que j’envoie ce jeune garçon à l’hôpital ? » Pareillement explique le Keli Yakar, ce monde ressemble à ce château de sable : sans valeur intrinsèque ! La richesse, la beauté, l’esthétique, les beaux hôtels, la croisette (quand ce n’est pas le 14 juillet…), etc., tout cela est bien temporaire, alors pourquoi le considérer comme une valeur éternelle sur laquelle on doit tout sacrifier notre vie, celle de notre conjoint (car il doit travailler très dur pour payer les vacances aux îles) et en final celle de nos enfants (car on ne pourra pas avoir l’oreille attentive à leurs besoins vitaux) ? D’après cela, la Michna qui parle d’homme libre signifie que celui qui s’adonne à la Tora (l’étude) s’attache à de vraies valeurs à l’inverse de ce monde qui va à sa perte (je ne veux pas vous faire dans le genre apocalyptique –du début de corona- mais simplement que l’homme n’est pas éternel …). Si on a déjà accepté ce premier point, ce n’est déjà pas mal. Seulement ce n’est pas tout ! Car si on en restait là, on aurait envoyé notre fils –au lieu qu’il devienne avocat ou PDG- faire un stage d’apprenti-berger dans les Ardèche ou à traire les vaches vers les alentours d’Honfleur… Or, la Tora nous dévoile quelque chose de plus profond. C’est que la vraie félicité c’est de se rapprocher de son Créateur au travers de la Tora et de son étude. Grâce à la Tora on arrivera à servir Hachem de la meilleure manière. Et puisque D’ est au-dessus des contingences –Il est sans limite, omniprésent et entièrement libre- donc nous aussi, ses fidèles serviteurs- nous serons au-dessus de la mêlée et des contingences de ce monde ! C’est ce qu’indique la Michna: il n’existe d’homme libre que celui qui s’adonne à la Tora ! Donc après avoir séché les larmes de notre petit David, on lui chouchoutera dans l’oreille : « Quand tu seras grand, tu sais, j’aimerais beaucoup que tu ailles à la Yechiva et pas à HEC ni à Dauphine… ». A cogiter…
Histoire vraie… Je le sais bien, une partie des lecteurs se disent : « Le rav Gold est bien obtus dans son point de vue : la Tora ou niet! Or, la vie n’est pas si tranchée… » C’est vrai que pour le commun des mortels l’étude de la Tora à plein temps demande des conditions très particulières qui ne sont pas offertes à tout le monde: pour sûr ! Mais le propos de mon feuillet vise à faire réfléchir le public de mes lecteurs sur la vie et le but de notre court passage sur terre. Et ne croyez pas que je dénigre ceux qui travaillent à longueur de journée : au contraire… Donc l’histoire véridique que je vous propose sera très intéressante ! Non pas que c’est à la « James Bond » – (on a passé l’âge, n’est-ce pas ?)- mais qu’elle montre que dans la vie il existe des valeurs importantes à ne pas oublier… Il s’agit de deux amis d’enfance résidant en Amérique qui sont très liés, dans le cœur et l’âme. Les deux garçons feront ensemble le parcours des écoles religieuse/orthodoxe d’Outre Atlantique. Les deux commenceront aussi la Yechiva Ketana (institution post- Bar Mitsva où on n’étudie que les matières saintes). Seulement ces jeunes auront certaines difficultés dans leurs études et les responsables éducatifs leurs proposeront de pratiquer du sport aux heures libres. Les deux ados joueront donc entre midi et deux heures au basket dans un centre sportif à côté de leur Yechiva. Or, un jour un des employés municipaux avait laissé son IPhone sans surveillance dans la salle de sport. Un des deux garçons prit l’appareil et commença à pianoter dessus. Le poids des mots, le choc des photos laissera notre jeune Bahour Yechiva dans un grand tracas… Tandis que le second prit lui aussi l’appareil en main et rapidement l’abandonna car il savait, à la Yechiva les Rabanim les avaient mis en garde de ne pas s’approcher de ce genre d’appareil. Il dira à son ami : ‘Surtout ne touche pas à cela… » Mais semble-t-il que la réaction du premier était désinvolte du genre : « De quel danger tu parles ? Il est même très instructif (il y a même un rav Googolovitch qui donne un cours dessus…), j’apprends des choses dont je n’ai aucun accès à la Yechiva ! » Le lendemain, les 2 jeunes se retrouvèrent sur le terrain de basket et là encore l’IPhone les attendait ! L’ami le prit et cette fois resta fort longtemps… le jeu de balle ne l’intéressait plus du tout… Les jours passèrent, entre temps celui qui était devenu mordu du IPhone disait à son copain de venir partager les joies des glissades dans les différents réseaux sociaux. Le deuxième déclinait toujours l’offre en disant que si jamais il prenait l’appareil dans ses mains s’en était fini des Yechivoth… Les deux jeunes se trouvèrent à une croisée de chemins. L’un choisira la voie facile: celle de l’ouverture au monde tandis que le second resta sur ses positions: en aucun cas il ne goutera au fruit défendu. Les deux se séparèrent: chacun prit sa voie. Le premier dégringolera très bas, devenant un mordu du IPhone, en 6 mois il n’avait déjà plus l’apparat d’un Ba’hour Yechiva ni même d’un Juif fidèle aux Mitsvoth… Tandis que le second garda le cap et resta à la Yechiva. Longtemps après le deuxième garçon rencontra un éducateur en Erets Israël. Ce dernier lui demanda comment avait-il eu la force de ne pas flancher devant un courant si violent ? Notre jeune ouvrit son cœur devant cet homme venu d’Israël. Il avait les larmes aux yeux et dira : « En vérité, lorsque mon ami m’incita à prendre l’IPhone dans les mains, je n’avais pas les forces de le repousser ! J’ai pensé alors que j’allais basculer avec lui vers d’autres horizons. Seulement une chose m’a retenu. Je me suis rappelé que si je tombais (spirituellement) j’allais causer beaucoup de tort à mes parents en abandonnant la voie qu’ils s’étaient efforcés de me transmettre. L’épreuve était très grande, mon cœur était lourd, j’avais une grande envie de voir ce qui se passait dans le vaste monde… Le Ba’hour (jeune) continua et les larmes coulèrent de ses yeux… « Je me suis souvenu alors de mon enfance. J’étais un enfant de type hyper actif, un de ceux pour qui on prescrit la « rétalyne » à forte dose. J’étais un enfant complétement désordonné et je faisais les 400 coups. J’étais la bête noire de l’école et à plusieurs reprises j’ai failli être viré de l’institution scolaire. Les professeurs m’infligeaient des punitions mais rien n’y faisait, je continuais de plus belle ! Seulement il y avait une chose qui ne bougeait pas, à chaque fois que je revenais de l’école, mon père se dégageait de toutes ses occupations et prenait de son temps avec moi, tandis que ma mère me donnait une part de gâteau et discutait aussi avec moi. Ils ne m’ont jamais laissé dans ma solitude du genre : tu n’es qu’un bon à rien… cela t’apprendra à mieux te comporter. Ils ont toujours partagé avec moi ma souffrance. Ce n’est pas uniquement lorsque je faisais les 400 coups mais aussi lorsque je leur provoquais de grandes hontes ; malgré tout, mes parents restaient à mes côtés. Il a toujours existé entre nous un lien, une écoute. On a pleuré ensemble, rigolé ensemble… Jamais mes parents ne m’ont mis garde pour la prochaine fois. Et toute cette préoccupation qu’ils ont manifestée pour moi, je ne pouvais pas l’oublier ! Quand, j’ai pris l’IPhone en main, j’ai compris que j’allais être déconnecté pour toujours de mes parents, et cela je ne l’ai pas voulu ! Cet amour que je porte pour mes parents, je veux le garder pour toujours ! » Fin de l’anecdote véritable que le rav Kolobski rapporte (dans Penini HaParacha « Terouma » n° 266). Et pour nous, c’est de comprendre qu’au-delà de la difficulté du moment avec son fils/fille, il faut savoir que si on lui garde une oreille attentive, qu’on reste à ses côtés dans les moments difficiles, alors ce lien d’amour-là préservera son enfant à l’avenir de ne pas trébucher dans toutes sortes d’épreuves… Qu’Hachem nous en préserve…
Chabat Chalom ! On souhaitera toujours beaucoup de courage au Clall Israel ! A la semaine prochaine si D’ le veut
David Gold
Soffer écriture Askhénase et Sépharade Mezzouzoths Téphilins Birka haBait Meguila
Tel : 00972 52 767 24 63 email 9094412g@gmail.com
Une bénédiction de bonne santé et de réussites à notre fidèle lecteur monsieur Y. Wolf et son épouse (Elad) ainsi que toute leur descendance. Une belle bénédiction pour notre ami lecteur Rafaël Zemour et son épouse (Elad) ainsi qu’aux enfants.
On continuera à prier pour la bonne santé de tous les malades du Clall Israel et en particulier de Ye’hia Ben Aïcha (Rav Teboul, Lyon-Villeurbanne), Edmond Haim Ben Léa et Haim Ben Rah’el parmi tous les malades du peuple juif. On remerciera la famille Azoulay Maurice et son épouse (Enghien) pour leur soutien et on leur souhaitera une très bonne santé avec toute leur famille. David, tu veux bien sécher tes larmes…