La faute à Trump évidemment…

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La chronique de Michèle MAZEL

La machine de guerre turque a envahi le nord de la Syrie pour broyer les Kurdes et d’évidence, c’est le président américain qui en porte la responsabilité. Sur ce point la presse occidentale est unanime. Ainsi Le Figaro du 11 octobre : «Le jeudi 10 octobre 2019 signalera dans l’histoire la trahison la plus éhontée commise par les États-Unis. En abandonnant les Kurdes, ils viennent de faire preuve d’une déloyauté que leurs alliés naturels en d’autres endroits du monde trouveront sûrement prémonitoire».

Le Monde renchérit le même jour : «Le feu vert donné de facto par les Etats-Unis à l’opération turque – en annonçant le retrait de soldats américains stationnés côté syrien de la frontière – a été perçu comme une trahison par les Kurdes». Et la presse de se gausser de la réplique de Donald Trump selon laquelle les Kurdes n’étaient pas aux côtés de l’Amérique lors de la Seconde Guerre mondiale et n’ont aidé en rien le débarquement en Normandie. C’est aussi l’occasion pour des personnes bien intentionnées de mettre en garde Israël : l’allié sur lequel il compte risque de se révéler n’être que ce roseau brisé sur lequel on ne peut s’appuyer.

Curieusement les commentateurs ne se demandent pas pourquoi il y avait des troupes américaines dans cette partie du monde. Pourtant un bref coup d’œil dans les livres d’histoire récente ou sur l’internet leur aurait enseigné que l’Amérique du président Obama avait pris en 2014 la tête d’une vaste coalition pour lutter contre l’État islamique alors au sommet de son expansion et de sa puissance. Une coalition regroupant les principales armées européennes, l’Australie, le Canada, l’Arabie saoudite, la Jordanie, le Qatar, Bahreïn et les Emirats arabes unis.

Seulement tout ce beau monde a laissé les Américains fournir le plus gros des forces, une grande partie des armements et un soutien financier sans faille. Et tous ont été ravis de trouver un allié de poids dans la communauté kurde de Syrie. De fait, ce sont les combattants kurdes, encadrés et armés par des instructeurs américains qui ont assumé l’essentiel des combats au sol ; les Européens se contentant de la couverture aérienne. Le problème évidemment est que les vaillants soldats kurdes ont trop bien réussi. En janvier 2019, la coalition annonçait son retrait de la Syrie. Seuls les Américains, tout en amorçant le retrait de leur matériel, laissaient instructeurs et petites unités d’élite sur place. Aujourd’hui, ce sont pourtant eux qui sont montrés du doigt.

Mais au fait, et la responsabilité des Turcs ? Les pays européens font assaut de condamnations, agitant le spectre de mesures de représailles dont le Président Erdogan se gausse en direct à la télévision, proclament un embargo sur les armes – un peu tard – et se montrent bien incapables de faire passer une résolution au Conseil de Sécurité. Ne seraient-ce pourtant pas eux qui ont trahi les premiers ? Les visées de la Turquie sur cette zone frontalière étaient pourtant connues de longue date. Le président Trump, échaudé par le manque d’enthousiasme de ses «alliés» européens quand il s’est agi de faire face aux provocations de l’Iran dans le détroit d’Hormuz, en a tiré la conclusion logique.

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