Les Etats-Unis confrontés au terrorisme intérieur

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Par BAZAK

                       Au moment où l’Amérique se focalise sur l’élimination du chef de Daesh et la tentative du Congrès, majoritairement démocrate, pour obtenir la destitution du président Trump, on en viendrait presque à oublier que c’est malheureusement aussi une autre date à retenir. Depuis le 11 septembre 2001, les violences des suprématistes blancs ont fait plus de victimes que les djihadistes. On se souviendra qu’en 1995 un attentat à Oklahoma city fit 168 victimes. Pour 2018 on a recensé 50 meurtres racistes perpétrés par des terroristes blancs.

            Il y a un an, un terroriste américain blanc a tué 11 fidèles à la synagogue l’Arbre de vie de Pittsburgh. Ce fut l’attaque la plus meurtrière contre un lieu de culte juif. Ces actes n’ont cessé d’augmenter, de 38 en 2015 ils sont passés à 67 en 2018. La dernière attaque des suprématistes a fait 22 victimes, majoritairement latino-américaines à El Paso.

            Depuis 2001 près de 40% des 150 victimes étaient en relation avec des problèmes locaux, sans lien djihadiste. Une étude effectuée sur la période de 2001 à 2018 démontre qu’il n’y a pas eu d’expansion de la radicalisation parmi les musulmans américains qui sont au nombre de trois millions.  Sur une période de 15 ans, on dénombre 400 inculpations pour acte de terrorisme.

            Le ministère de l’intérieur a défini une nouvelle doctrine anti-terroriste qui met cette menace au même plan que celle du djihadisme. Ce qui en dit long sur cette prise de conscience récente. Le problème paraît d’autant plus difficile à appréhender que le président Trump utilise une rhétorique à double détente, qui semble devoir satisfaire tant les soutiens de cette mouvance que les bons citoyens ; pour mémoire : lors d’un meeting à Charlottesville en 2017 le président Tromp déclarait : «Il y a de bonnes gens des deux cotés» !

            Ses déclarations faisant allusion à la possibilité d’une guerre civile, sous-entendu «Si je ne suis pas réélu», incitent les terroristes à s’engager dans une guerre raciale et trouvent un écho favorable dans ces groupes confortés par ces déclarations de l’exécutif. Ces groupes ont établi des relations avec d’autres organisations racistes et néo-nazies ailleurs dans le monde. On pense à l’Ukraine, l’Allemagne notamment, avec qui ils ont ébauché une forme de coopération internationale qui ne peut qu’aggraver les actions meurtrières.

            La question de comprendre quels sont les rouages idéologiques de cette mouvance terroriste domestique est posée. Certains ont pensé que l’inspiration viendrait du narratif identitaire djihadiste dans une version blanche raciste et meurtrière envers toutes les minorités et de préférence celle qu’on peut charger de tous les maux, les Juifs. La croissance et la récurrence de ces actes confrontent le pays à plusieurs problèmes, pas seulement celui de la religion et de la foi, mais également le sens donné dorénavant au patriotisme qui est clairement mis en cause par ces crimes et à la notion de race.

            L’arrivée de Donald Trump à la présidence, sa rhétorique, ses déclarations souvent contradictoires ont mis à jour divers problèmes que la société américaine avait mis sous le tapis depuis des années. Malgré l’apparente prospérité du pays, on constate qu’il existe de nombreux problèmes sociétaux à l’instar de l’Europe, dans un contexte sans doute différent. Comme l’Allemagne, qui supporte de plus en plus mal le fardeau du nazisme, la France qui n’a jamais tout à fait digéré Vichy et la collaboration, certains pays de l’Est (Hongrie, Pologne), l’Amérique du 21° siècle est confrontée à son récit national qui révèle des fractures naissantes et son malaise grandissant devant des problèmes qu’elle n’attendait pas mais que la mondialisation a sans doute accéléré.

            Même si les efforts des démocrates du Congrès n’aboutissent pas, gageons que les auditions à venir, désormais publiques et télévisées, se traduiront par des révélations sur le fonctionnement de l’exécutif, susceptibles de mettre les Américains face à leur réalité et leurs choix à venir. On voit bien que les citoyens d’un bord à l’autre de l’Atlantique sont en demande d’une toujours plus grande transparence, qui pourrait peut-être devenir une passerelle nouvelle, entre l’exécutif et le peuple en mal de dialogue avec ses gouvernants.

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