Lettre du rabbi de Kalov pour Chavou’oth

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Chavou’oth 5780

Étudier la Tora dans toutes les circonstances

On relate que le ‘Hozé de Lublin vit un jour un homme, lors de la prière de Yom Kippour, proposer à D’ une « transaction » formulée en ces termes : « Je suis prêt à renoncer en Ta faveur à 20% de mes revenus que Tu m’accordes chaque semaine, à condition que Tu m’accordes mon salaire dès le dimanche, afin de me libérer tous les autres jours de la semaine pour étudier et prier. »

Le ‘Hozé de Lublin répondit à cet homme : « D’ n’a pas besoin de tes 20%, Il a assez d’argent. S’Il le désirait, Il te donnerait toute ta subsistance afin que tu n’aies pas du tout besoin de travailler, mais uniquement d’étudier et de prier sereinement toute la journée. Apparemment, D’ ne désire pas ton étude de la Tora et ta prière de cette manière, mais veut que tu fasses des efforts dans la parnassa, et que malgré tout, tu dégages du temps pour l’étude et la prière, et c’est de cette manière que tu Lui procureras de la satisfaction, tel est ton rôle et le tikoun (rectification) de ton âme. »

C’est un grand principe connu de tous : le Yétser Hara’ (mauvais penchant) œuvre sans relâche pour tenter l’homme, pour insinuer que le lieu ou la situation dans laquelle il se trouve ne lui convient pas pour progresser et qu’il doit chercher autre chose, un autre endroit, une autre communauté, un autre rav, ou d’autres conditions, qui l’aideront peut-être, mais dans la situation actuelle, il va de soi qu’il ne pourra pas avancer. Lorsque le mauvais penchant tente de séduire l’homme de cette façon sans obtenir de succès, il retente sa chance dans un autre domaine.

Pour parer à ces attaques, il faut se renforcer dans la émouna dans la Providence divine. Chacun doit retenir constamment que si le Créateur, loué soit-Il, l’a placé dans tel endroit ou dans telle situation, c’est le signe qu’Il désire que l’homme Le serve depuis ce lieu et dans cette situation, et il est obligé de se mesurer à ces circonstances. Cela peut paraître difficile, mais il faut faire l’effort de commencer, et celui qui cherche à se purifier est aidé du Ciel à mener à bien la mission qui lui a été confiée sur terre.

Les ouvrages sacrés nous révèlent que deux hommes ne descendent pas dans le monde pour accomplir une mission identique, mais chacun a un rôle bien spécifique. Nos Sages (Sanhédrin 4,5) l’expriment ainsi : « Chacun est tenu de dire : « Le monde a été créé pour moi » : j’ai un rôle à jouer dans le monde que je suis le seul à pouvoir assumer, dans les circonstances choisies par D’, correspondant à ma vocation et à la racine de mon âme ». »

Nous voyons qu’il est écrit (Devarim 6,4) : «Tu aimeras l’Éternel, ton D’, de tout ton cœur. » Nos Sages (Sifri Devarim 32) expliquent que le cœur ne doit pas être divisé contre le Makom (lieu). L’un des Noms de D’ est Makom, c’est le lieu du monde, en effet : « Toute Sa gloire remplit la terre ». Le saint rabbi Chlomo de Karlin en donne une autre lecture : l’homme ne devra pas contester le lieu où il réside : il ne prétendra pas que son lieu de résidence ne lui permet pas de servir Hachem, loué soit-Il, et préfère repousser Son service à plus tard. En effet, Il désire qu’on Le serve du lieu où on se trouve ; s’Il avait souhaité qu’on Le serve uniquement ailleurs, alors Il l’aurait fait naître dans cet endroit.

Le mauvais penchant déploie des efforts dans le domaine de la Mitsva d’étude de la Tora : il tente de convaincre l’homme de manquer son cours de Tora lorsque c’est au prix de difficultés, par exemple lorsqu’il a peu de temps, ou qu’il est soucieux ou fatigué.

Or nos ancêtres, depuis plus de 3000 ans, depuis Avraham Avinou jusqu’à aujourd’hui, se sont sacrifiés pour étudier la Tora dans toute situation. Un grand nombre de Sages en Tora ont étudié et composé des ouvrages célèbres alors qu’ils traversaient de grandes épreuves, comme le Gaon rabbi Akiva Eiger qui souffrit durant toute sa vie. Il rédigea dans son testament que lors de son éloge funèbre, il autorisait une seule louange : la mention de son étude de la Tora alors qu’il subissait de grandes souffrances. Un grand nombre de ces Tsadikim vivaient très à l’étroit, comme mon vénérable ancêtre, auteur du Hékhal Habrakha de Kamarna : dans sa jeunesse, il n’avait pas de bois de chauffage pendant tout l’hiver, et à peine de quoi se nourrir. J’ai aussi entendu de l’Admour de Klausenbourg que mon vénérable ancêtre, auteur du Bené Yissakhar, vivait dans une grande pauvreté dans une maison au toit cassé par lequel la pluie s’infiltrait.

Mais un principe immuable était ancré chez ces hommes simples d’antan : tout Juif est tenu d’étudier chaque jour, même dans des circonstances très difficiles.

Un jour, un Juif simple de Russie me raconta qu’il avait vécu dans un lieu où les communistes contraignaient les hommes à travailler depuis cinq heures du matin et qu’il était dangereux d’arriver en retard, et de ce fait, il se levait à trois heures du matin afin de pouvoir étudier et prier avant de commencer sa journée de travail. Son père affirma qu’il ne s’agissait pas d’un sacrifice, car le sacrifice n’intervient que lorsqu’on va au-delà de l’obligation, et l’étude quotidienne de la Tora est une obligation qui incombe à chaque Juif.

Grâce à la peine investie dans l’étude de la Tora, on a droit à la vie, comme il est dit (Devarim 32, 47) : « Et c’est par ce moyen seul que vous obtiendrez de longs jours sur cette terre. » Le Midrach (Kohélet Rabba 83,4) dit : l’ange de la mort avait avoué à rabbi Chimon ben ‘Halafta qu’il n’avait pas d’emprise sur lui et ses amis ; en effet, chaque jour, ils se consacraient avec fouge à l’étude de la Tora, et par ce mérite, D’ lui prolongea la vie.

Ainsi, lors du don de la Tora au Mont Sinaï, nos Sages (Chabbath 88b) affirment que D’ avait renversé la montagne sur eux, et dit : « Si vous acceptez la Tora, très bien, et dans le cas contraire, là sera votre tombeau. » Nos Sages posent une question : il aurait fallu dire : « Ici sera votre tombeau.» Mais D’ les avait préparés à des situations complexes, ils portaient un lourd fardeau et se heurtaient à des problèmes difficiles impossibles à se défaire, à l’instar d’un homme enfermé dans un lieu fermé dépourvu de fenêtre et de portes. D’ leur dit : « Si vous acceptez la Tora», même dans cette situation, «c’est préférable », afin de mériter grâce à cela une bonne vie. «Et dans le cas contraire » : si vous ne l’acceptez pas en l’état, lorsque vous prétendez que vous pourrez étudier et pratiquer la Tora dans un autre lieu, alors « là sera votre tombeau» : vous risquez de tomber en déchéance et de ne pas mener à bien votre mission sur terre, que D’ en préserve.

De ce fait, la fête de Chavou’oth, au cours de laquelle a lieu une réminiscence du don de la Tora, est un moment propice pour chacun pour s’engager à se renforcer dans l’étude quotidienne de la Tora, pour ne pas manquer un seul jour d’étude de la Tora, même dans des circonstances difficiles. Par ce mérite, on aura droit à une bonne vie dans ce monde-ci et dans le Monde à venir.

‘Hag Saméa’h !

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