Ni victimes ni dégâts

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Par Michèle Mazel

 L’actualité est si riche que les événements de Gaza passent au second plan. C’est tout juste si la presse évoque les frappes de représailles de l’armée de l’air israélienne après des tirs de roquettes du Hamas ou de la Jihad Islamique qui pour reprendre l’expression maintes fois répétée par les médias « n’ont fait ni victimes ni dégâts. » Façon de sous-entre qu’Israël se saisit du moindre prétexte pour pilonner les malheureux Gazaouis.

A y regarder de plus près tout de même, quand un groupe de jihadistes lance des roquettes, des obus de mortier et autres engins de mort vers des cibles civiles – kibboutzim, villes et villages –, c’est pourtant bien dans le but de faire des victimes et des dégâts. Et si cet objectif n’est pas atteint, c’est soit que les paramètres de tir avaient été mal ajustés et que le projectile est tombé en plein champ, soit que le système dôme de Fer a réussi à le pulvériser en plein ciel. Le système n’est pas infaillible ; c’est pourquoi l’alerte est donnée dès qu’un départ de missile a été détecté. Israël peut se vanter d’être le seul pays au monde où la plupart des habitations et tous les établissements publics sont équipés d’abris. Ils sont obligatoires dans les nouvelles constructions. Seulement dans le pourtour de la bande de Gaza, certaines localités sont si proches de la frontière que les habitants ne disposent que de quelques secondes pour se mettre à l’abri.  Dans la journée, tous ne sont pas chez eux. Il leur faut alors chercher refuge dans l’une structures en béton disposées à cette effet sur le trottoir. Dans les lieux de travail, des exercices ont régulièrement lieu pour s’assurer que la course vers la pièce sécurisée se fasse sans panique et en bon ordre. Dans les écoles aussi des exercices d’évacuation, organisés de façon ludique, ont préparé écoliers et enseignants. C’est plus compliqué dans les jardins d’enfants où les plus petits sont souvent gagnés par la peur. Il y a des chutes, des pleurs, des mouvements de panique. « On ne s’habitue pas » avouent à mi-voix les institutrices, ajoutant en haussant les épaules, « et pourtant on n’a pas le choix. »

Si dans la journée les choses se passent relativement bien, la nuit c’est bien différent. Réveillés en sursaut les parents doivent courir vers les chambres d’enfants, prenant les plus petits dans leurs bras et se précipitant pour les mettre en sûreté. Lorsque l’abri est au sous-sol, les chutes sont fréquentes. Heureusement elles ne sont généralement pas graves. Bien sûr les personnes âgées sont particulièrement à risques. Souvent, jambe ou bras cassé, elles seront transportées à l’hôpital une fois l’alerte passée. Début février, une jeune maman serrant sur son cœur sa petite fille de trois semaines a trébuché dans l’escalier. La tête du bébé a cogné la marche. Des heures d’angoisse ont suivi pendant que la mère affolée attendait le verdict des médecins. Heureusement le crane des tout-petits est encore bien malléable et il y a eu plus de peur que de mal.

Plus tard, terrés dans leurs abri, attendant le signal de fin d’alerte,  les habitants entendront les avions partir effectuer des missions de représailles. Et si par hasard les médias s’en font écho en France, ils ne manqueront pas d’ajouter que pourtant les missiles gazaouis n’ont fait ni victimes ni dégâts. Du drame que vivent au quotidien les hommes, les femmes et surtout les enfants côté israélien il ne sera jamais question.

© Michèle Mazel

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