Contre le gouvernement : la conseillère juridique du gouvernement va demander un arrêt historique de la Cour suprême sur le limogeage du chef du Shin Bet

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À la suite de l’annonce de Ronen Bar selon laquelle il quitterait son poste le 15 juin, le gouvernement est revenu sur sa décision de le limoger et a demandé à la Cour suprême de rejeter les recours – dans le but d’éviter une décision de justice. Mais Gali Baharav-Miara estime que la Cour suprême doit garantir l’indépendance des gardiens institutionnels de l’État. Selon elle, une décision judiciaire aurait des conséquences majeures sur l’indépendance et le professionnalisme des hauts fonctionnaires du service public.

Ynet

Contrairement à la position officielle soumise par le gouvernement à la Cour suprême, la conseillère juridique Gali Baharav-Miara devrait demander cette semaine à la Cour de rendre une décision de principe sur la question du limogeage des chefs des services de sécurité et autres hauts fonctionnaires indépendants. Elle demandera que la Cour établisse clairement que ces postes ne relèvent pas de la confiance personnelle des responsables politiques – afin d’assurer à leurs titulaires la liberté de travailler sans pression, sans crainte d’être renvoyés, et uniquement dans l’intérêt public.

La semaine dernière, le gouvernement a renoncé à limoger Ronen Bar après que celui-ci eut annoncé de son propre chef qu’il quitterait ses fonctions le 15 juin. Le gouvernement en a immédiatement informé la Cour suprême, afin que celle-ci supprime les recours déposés – autrement dit, qu’elle s’abstienne de rendre un jugement de fond. Or, fidèle à sa position initiale, selon laquelle elle ne représentait pas le Premier ministre dans cette affaire, Baharav-Miara compte demander à la Cour de ne pas accéder à la requête du gouvernement, mais au contraire de rendre une décision claire garantissant l’indépendance des postes concernés. Après réception de la réponse du gouvernement, la Cour a fixé au 7 mai la date limite pour que les requérants réagissent à la demande d’annulation.

Selon la conseillère juridique, la décision initiale du Premier ministre de limoger Ronen Bar a des conséquences qui dépassent largement son cas personnel. Elle considère que cette décision est porteuse d’effets négatifs importants sur le fonctionnement professionnel, impartial et souverain du Shin Bet, aujourd’hui et à l’avenir.

Les implications majeures d’un arrêt de la Cour suprême

Baharav-Miara insiste sur les caractéristiques particulières du Shin Bet : c’est un service de sécurité opérant secrètement, y compris à l’intérieur du territoire israélien, disposant de vastes prérogatives – interrogatoires, collecte de renseignements, perquisitions secrètes – qui peuvent porter atteinte à des droits fondamentaux comme la vie privée, la liberté et la dignité.

Certaines fonctions du Shin Bet ont des implications très sensibles en matière d’État de droit et de valeurs démocratiques, notamment face à des menaces comme la subversion. Elle rappelle que l’agence agit souvent en dehors du regard public, et parfois même sans mandat judiciaire.

Se fondant sur la loi régissant le Shin Bet, la conseillère juridique estime que le législateur interdit explicitement à ses dirigeants de servir des intérêts politiques partisans. Elle juge donc nécessaire que la Cour insiste sur la nécessité de garantir l’indépendance professionnelle et la séparation du pouvoir politique dans l’exercice de ces fonctions. Elle s’appuie entre autres sur la déposition de Ronen Bar à la Cour, dans laquelle celui-ci affirme que le Premier ministre Netanyahu a tenté de lui dicter une évaluation sécuritaire dans le but d’influencer son procès – et qu’il aurait également tenté d’impliquer le Shin Bet dans la gestion des manifestations anti-gouvernementales.

Pour Baharav-Miara, cette affaire ne concerne pas seulement la fin de mandat de Ronen Bar. Elle estime qu’une position claire de la Cour aurait des effets majeurs sur l’indépendance, le professionnalisme et l’éthique de tous les hauts fonctionnaires du secteur public – et sur la nature même de ce secteur. Tout au long de cette crise, elle a exprimé son inquiétude quant à la manière dont ce limogeage a été mené, soulignant que cela pourrait saper la capacité des chefs du Shin Bet à agir de manière indépendante, s’ils savent qu’ils peuvent être congédiés rapidement, sans justification, sur simple motif d’« absence de confiance » politique, comme s’ils étaient des ministres.

Elle considère qu’il faut empêcher un scénario où un haut fonctionnaire serait renvoyé pour avoir pris une décision professionnelle qui ne plaît pas à l’exécutif. Une telle situation le rendrait totalement dépendant de la bonne volonté de ses supérieurs politiques. Cela vaut tout particulièrement pour les titulaires de fonctions d’enquête et de poursuite, dont l’indépendance est cruciale pour l’État de droit, la protection des droits humains et la confiance du public.

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