Il est beaucoup plus facile de détester les orthodoxes quand on est ignorant

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De tous les dommages sociaux du corona, le plus grave est peut-être la légitimité apportée à l’ignorance. Malgré leur mauvaise connaissance de cette partie de la société, celle du monde orthodoxe, les gens se laissent aller à blâmer un secteur complexe, formé de centaines de milliers de personnes.

Yaakov Flavinsky, Michpa’ha – paru sur Ynet

La rue orthodoxe est en ébullition depuis quelques jours à cause d’une déclaration sur les réseaux sociaux qui comportait un élément rappelant la période nazie (le tweeter se demandait pourquoi ne pas verrouiller les Yechivoth et y injecter du gaz), en réponse à une discussion sur la fermeture des établissements d’enseignement. Mais à dire vrai, il n’y avait rien de surprenant dans cette déclaration. Après de longs mois de lutte contre le virus d’hostilité contre le monde orthodoxe, il est possible qu’au stade actuel, nous assistions simplement à une nouvelle mutation. Et cela, comme les mutations du corona, cela peut être très contagieux. Cela nécessite des mesures préventives importantes pour interrompre les chaînes de contagion avant qu’il ne soit trop tard.

Le corona n’a pas forcément changé le monde. Il a surtout mis en évidence des couches cachées, celles qui, les jours normaux, sont dissimulées sous un manteau d’ignorance qui se cache. Le corona n’a pas inventé des procédés : il les a accélérés. Cela inclut l’attitude envers le secteur orthodoxe.

Les orthodoxes et les laïcs peuvent partager le même sort face à un virus trompeur, mais ne sont pas d’accord sur la nature de ce partenariat. Même dans la routine, les orthodoxes et les laïcs ne voient pas le partenariat du même côté et ont du mal à comprendre l’un l’autre. Un laïc ne comprend pas comment un orthodoxe peut être un partenaire s’il ne sert pas dans l’armée israélienne, tandis qu’un orthodoxe ne comprend pas comment soutenir la profanation du Chabbath nous laisse en commun dans l’État juif. Cette opposition, qui émane en partie d’un manque de compréhension respectif, met en devant la plus grande haine possible.

Mais s’il y a un processus qui s’est accéléré sous les auspices du corona et qui est particulièrement inquiétant, c’est sans nul doute la légitimité publique apportée à l’ignorance. Le chaos actuel a donné légitimation au trait humain qui consiste à exprimer des opinions même sur des questions qui nous échappent. Les journalistes ont remplacé les épidémiologistes, les politiciens sont devenus des experts en santé publique et presque tous les citoyens ont une position solide sur les vaccins et leur impact sur l’univers.

Il en va de même envers les orthodoxes. Malgré une mauvaise connaissance du terrain, les gens se permettent de blâmer huit cent mille personnes en Israël. La connaissance limitée, nulle dans certains cas, ne constitue pas un obstacle à la diffamation générale et au blasphème.

Ceux qui veulent critiquer la société orthodoxe, et certainement ceux qui ont eu envie de la diffamer, devraient connaître au préalable l’objet de leurs critiques. Reconnaître la vérité. Comprendre que le secteur n’est pas seulement noir et blanc, mais diversifié et plein de couleurs.

J’ai récemment assisté à une discussion dans laquelle un participant laïc justifiait ses attaques par le fait qu’il avait rencontré pas mal d’orthodoxes dans sa vie. La connaissance de médecins ne fera pas encore de lui un expert des questions médicales, mais utiliser la même logique ridicule sur les orthodoxes fonctionne bien pour lui. Comment écrit le professeur Yuval Noa’h Harari ? « Les humains pensent en histoires, pas en faits, en chiffres ou en équations. » Les histoires sur les orthodoxes ont toujours bon effet.

Précisément à l’ère de l’alphabétisation, l’ignorance fixe encore le programme du jour. La génération la plus exposée au savoir est aussi celle qui est incapable de la contenir au quotidien. La tolérance est liée à l’agression et le désir de profondeur vit en paix avec la superficialité.

Et tout cela se passe également en ce qui concerne les orthodoxes. Ya’akov ‘Hazan, l’un des fondateurs du Hachomer Hatza’ir et du Mapam, a bien décrit le phénomène dans sa célèbre phrase : « Nous voulions élever une génération d’hérétiques, et nous avons formé une génération de paysans. » Les anciens hérétiques, qui savaient une chose ou deux sur la société orthodoxe, ont cédé la place à des ignares qui détestent les orthodoxes sans connaitre la vérité. Nous sommes les éclairés les plus ignorants qui soient.

Ceux qui veulent critiquer la société orthodoxe, et certainement ceux qui ont eu envie de la diffamer, ont intérêt à connaître au préalable l’objet de leur critique. Vraiment connaître. Comprendre que la société orthodoxe n’est pas seulement noir et blanc, mais diversifiée et pleine de couleurs. Cela ne nécessite pas d’apprendre la Halakha et de faire des recherches approfondies sur toutes les communautés ‘hassidiques, mais cela nécessite certainement un examen avant d’attacher de l’importance à une connaissance ou à une opinion négative sur ce secteur (à plus forte raison avant d’écrire à son sujet et de faire paraitre des appréciations à son égard).

Voici un exemple: il y a quelques mois, une émission a été diffusée à la télévision sur un soldat qui appartenait autrefois à une ‘hassidouth « fermée et extrêmiste », et faisait référence à des jets de pierres contre des soldats. Une certaine connaissance, ou qu moins un examen plus approfondi, aurait permis de savoir que cette ‘hassidouth ne participe jamais à des manifestations de ce genre et bien évidemment ses membres ne lancent hamais des pierres sur des soldats. ce qui aurait permis aux auditeurs de refuser une telle histoire qui présente les orthodoxes sous un jour peu flatteur, mais l’ignorance, même dans ce cas, n’a pas empêché l’item.

Reconnaître que nous ne connaissons pas l’autre assez bien pour le juger et le blâmer, ce qui peut être un vaccin efficace contre les maux de la société. Peut-être de cette manière nous épargnerons-nous la propagation de la nouvelle mutation d’hostilité qui déchire la société israélienne de l’intérieur.

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