L’incroyable odyssée de réfugiés fuyant le nazisme en 1941 en photos (Vidéo)

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La photographie est à l’honneur cette semaine alors que débutent les rencontres d’Arles. Pour l’occasion, le réalisateur Olivier Assayas nous a raconté l’incroyable destinée de la photographe Germaine Krull, amie de son père rencontrée sur un bateau fuyant la France vichyste en 1941… Détails et vidéo…

C’est l’histoire d’une traversée en bateau à la fois tragique et pleine d’espoir. Un épisode méconnu, dont les images viennent d’être découvertes.
Le 24 mars 1941, le capitaine Paul-Lemerle quitte Marseille pour la Martinique. À son bord, des Juifs, des réfugiés espagnols, des opposants politiques qui fuient la France de Vichy.
Parmi eux, de nombreux artistes et intellectuels comme André Breton, Claude Lévi-Strauss, qui raconte cette traversée au début de Tristes tropiques, et l’écrivain et militant communiste anti-stalinien Victor Serge.
Il y a aussi la photographe allemande Germaine Krull, connue pour ses portraits de célébrités et Jacques Rémy, de son vrai nom Raymond Assayas, le père d’Olivier.

Je savais de cette traversée le peu de choses que mon père m’avait racontées. J’ai progressivement découvert cela assez jeune, d’abord en lisant Claude Lévi-Strauss, le premier chapitre de « Tristes tropiques », que le bateau sur lequel se trouvait mon père avait une histoire. (Olivier Assayas)

Les 350 passagers quittent une Europe déchirée avec l’espoir d’une vie meilleure outre-Atlantique. Débute alors une traversée de 30 jours dans des conditions très difficiles.

C’était plutôt un départ de forçats (…). On entassait 350 personnes environ sur un petit vapeur qui ne comprenait que deux cabines, faisant en tout sept couchettes. (Claude Lévi-Strauss, « Tristes tropiques »)

On voit à quoi ressemblait les chiottes, les cuisines, la déglingue du bateau. (Olivier Assayas)

Dans la douleur et la détresse, les destins de ces réfugiés vont pourtant se lier. Ces moments de vie sont capturés par Germaine Krull : Elle racontait l’histoire d’un voyage à la fois bouleversant, historiquement et artistiquement important, dont elle était l’unique le témoin photographique. 
Il y avait quelque chose de suspendu, un moment de paix au plus noir de la guerre. Il y a d’abord eu échange intellectuel entre Claude Lévi-Strauss et André Breton, c’est documenté. 
Il y a eu du point de vue de mon père, la rencontre avec Germaine Krull qu’il ne connaissait pas. Il y a eu aussi la rencontre entre mon père et Victor Serge. Il y a une histoire intellectuelle qui a marqué ceux qui ont fait ce voyage. (Olivier Assayas)

Le bateau arrive finalement à Fort-de-France, sous administration vichyste :
L’administration française de Martinique voit d’un œil très peu favorable ces émigrés qui sont les rebuts de l’Europe. 
Ils mettent tout le monde dans un camp qui est une sorte de léproserie où on mettait autrefois en quarantaine les passagers. Ils vivent là dans des conditions difficiles, la nourriture et l’eau sont rationnées. 
Après, à chacun de se débrouiller, comme il peut, pour poursuivre son voyage. (Olivier Assayas) 

Raymond Assayas et Germaine Krull réussissent à quitter la Martinique. Ils transitent par Cayenne, où ils découvrent le désespoir des forçats du bagne. Leur route se sépare mais ils restent en lien avec la France libre durant la guerre. Ils se reverront après et resteront des amis proches jusqu’à leur mort. Les photos de ce voyage resteront longtemps cachées :
C’était une amie de mes parents, très gentille avec moi. Je savais qu’il y avait des tiroirs dans lesquels il y avait des trucs à elle qui trainaient. Quand j’ai commencé à fouiller, j’ai retrouvé une centaine de photos de Grmaine Krull. J’ai été happé par cette histoire parce qu’elle est fascinante
(Olivier Assayas)

Plus de 75 ans après, c’est tout un pan de l’histoire qui resurgit grâce à ces photos :
Il y a ce sentiment très étrange d’être hanté par une histoire qui va revivre à travers vous. (Olivier Assayas) 

Source France Culture

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