Âpre débat au sommet du renseignement israélien

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Yossi Cohen

Source : DEBKA
13 octobre 2021

Ce débat devient aussi politique : faut-il rejoindre un éventuel accord entre les États-Unis et l’Iran ? Oui ou non l’Iran approche-t-il du seuil nucléaire ?

Une étrange controverse se déroule ces jours-ci, entre les principaux dirigeants politiques et ceux du renseignement israéliens. Elle concerne la politique israélienne envers l’Iran et son programme nucléaire. La controverse s’articule autour de trois thèmes :

1) oui ou non, faut-il rejoindre le nouvel accord nucléaire qui se dessine entre l’administration américaine du président Biden et l’administration iranienne du président Ibrahim Raisi. C’est-à-dire, faut-il poursuivre la politique de l’ancien Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui s’opposait au principe de tout accord avec les Iraniens ?

2) Oui ou non l’Iran approche-t-il du seuil nucléaire ?

3) Les accords d’ABRAHAM, entre les États du Golfe, les Émirats arabes unis, les États-Unis et Israël, qui ont établi un axe israélo-arabe contre l’Iran, seraient-ils susceptibles de détériorer les relations entre l’Iran et ses alliés (la Syrie et le Yémen). Ou au contraire, pourraient-ils aider à établir un pont entre Jérusalem et Téhéran ?

Comme souvent en Israël, de telles confrontations concernant des options stratégiques, débouchent sur une confrontation politique et où des attaques personnelles se concentrent sur la question de savoir qui assumera la responsabilité d’une telle nouvelle politique israélienne face à l’Iran.

Déjà le 7 octobre, Tikdebka, en exclusivité, faisait état de négociations secrètes entre les États-Unis, la Russie, l’Iran et Israël. Il serait question qu’Israël accepte que l’Iran soit « au seuil nucléaire », contre des garanties américano-russes, que l’Iran ne produira pas d’armes nucléaires. Selon les sources de Tikdebka, le Premier ministre israélien Naftali Bennet a probablement décidé de ne plus s’opposer aux accords avec Téhéran. Désormais, il chercherait à « monnayer » cette volte face israélienne (adhésion ou soutien israélien à l’accord) afin d’obtenir, aussi bien de Washington que de Moscou, des garanties de sécurité face à l’Iran. D’ailleurs, vendredi 22 octobre il se rendra à Sotchi, au bord de la mer Noire, pour en discuter avec Vladimir Poutine.

Dans tous ses contacts avec les leaders étrangers, en aparté, le premier ministre israélien Naftali Bennett, présente cette volte face comme la position officielle de l’État d’Israël. Toutefois, il y a un problème car Bennett fait du « en même temps ». Dans ses déclarations publiques, cette fois, en Israël et à l’étranger et en particulier devant l’Assemblée générale des Nations Unies, il a déclaré que

« si Iran continue à enrichir l’uranium, Israël agira contre lui, même s’il doit le faire seul ».

Une telle déclaration, qui plus est, depuis la tribune de l’ONU était, bien sûr, une erreur. En fait, elle était la conséquence de la pression du débat interne en Israël. Aucun leader politique expérimenté, sauf peut être le fantasque président turc Rajip Erdogan, ne se permettrait de déclarer « que sa patience est à bout ». Une telle déclaration indique une faiblesse et non une position déterminée.

Jusqu’à ce que Bennett décide quelle est sa position définitive, une âpre controverse s’est développée le 12 octobre, entre deux anciens chefs du Mossad, Efraim Halevi et Yossi Cohen. Cette vive discussion pourrait, à terme, influencer la décision finale du premier ministre israélien. Efraim Halevi a déclaré publiquement que la politique du gouvernement Netanyahu, concernant le programme nucléaire iranien était erronée, et que c’est à cause de cette politique, qu’aujourd’hui, l’Iran est au « seuil nucléaire » et peut-être en train de fabriquer sa première arme atomique.

Quelques heures plus tard, Halevy a reçu une réponse du chef sortant du Mossad, Yossi Cohen. Il a déclaré, sans mentionner les noms du Premier ministre Naftali Bennet et du ministre de la Défense Beni Gantz, que tous les discours selon lesquels l’Iran pourrait devenir un pays au « seuil nucléaire » sont, tout simplement, faux. Ses mots exacts sont :

« L’affirmation, selon laquelle, l’Iran est dans une meilleure position qu’avant, à ma connaissance, est fausse. Les installations iraniennes ont moins de capacités techniques et de production, que par le passé et de plus l’Iran dispose de moins de soutien international qu’au paravent ».

Cohen a également souligné qu’il parlait sur la base de documents qu’il avait consultés à la fin de son mandat, au début de l’été de cette année.

C’est une allusion au fait que, la dernière fois qu’Halevy a vu des documents sur le nucléaire d’Iran, remonte à 19 ans, en 2002, lorsque Halevy a mis fin à son mandat de chef du Mossad. En d’autres termes, le Mossad, dirigé par Yossi Cohen, a ralenti le programme nucléaire iranien. Bien sûr, ces choses contredisent également les positions de Naftali Bennett et Benny Ganz sur la question. Alors qu’Efraim Halevi tente d’amener le premier ministre Naftali Bennet à adhérer aux nouveaux accords avec l’Iran. Yossi Cohen, en revanche, s’oppose à cette politique, qui interdirait à Israël de prendre des mesures plus radicales, comme par le passé, la cyberattaque contre les installations d’enrichissement de Natantz ou l’élimination du directeur du programme nucléaire iranien Mohsen Fakhrizadeh. Concernant les accords d’ABRAHAM, il semblerait que les signataires de cette entente soient déjà dépassés par les nouveaux développements dans la région. En effet, l’Arabie saoudite, l’EAU (Émirats arabes unis), Petroleum Union, et la Jordanie, seraient déjà en contact avec Téhéran, soit directement, soit par l’entremise de l’allié de l’Iran, le syrien Bashar Assad.

Édouard GrisMABATIM.INFO
Traduction et adaptation

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