Le Shin Bet raconterait-il n’importe quoi ?

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Pour reprendre le cours… des choses, un commentaire de texte 

Un article écrit « par le Figaro avec AFP » nous en apprenait plus, le 22 avril 2020, par ses non-dits et sa ponctuation que par l’info noyée dans des circonlocutions dubitatives.

La vocation d’un titre est de susciter la curiosité en donnant les éléments principaux d’une information. Il répond généralement aux questions « quoi ? quand ? où ? » et éventuellement « comment ? ».

Celui du Figaro est révélateur : « Israël dit avoir arrêté trois Palestiniens qui préparaient des attentats. » 72 caractères, espaces inclus. Un titre neutre eût suffi : Trois Palestiniens préparant des attentats arrêtés par Israël. 61 caractères et toute l’info y est. Sauf si le rédacteur met en doute l’information qu’il donne et estime indispensable de le préciser en préambule. C’est la fonction de ces deux premiers mots : « Israël dit ». Le sous-entendu est parfaitement audible : si on le précise, c’est qu’on ne croit pas à ce que dit Israël.

Et de fait, en France, on enseigne aux étudiants des écoles de journalisme quelques principes de base concernant les sources : si Israël le dit, c’est faux. En général, on ne peut pas prouver le mensonge, la faute, voire l’erreur, aussi est-il d’une importance vitale de toujours marquer une distance avec ce qui est dit par cette source. En revanche, tout ce que dit n’importe quel pékin (pas seulement chinois) qui incrimine Israël ou les Juifs est à prendre avec le plus grand sérieux.

Un article démonstratif : celui-ci !

« Trois Palestiniens, membres présumés du mouvement islamiste Hamas, ont été arrêtés car ils préparaient des attentats anti-israéliens, a annoncé mercredi 22 avril le service israélien de sécurité intérieure, le Shin Beth. » Les suspects sont membres « présumés » du Hamas. Peut-être leur appartenance n’a-t-elle pas été corroborée par la présentation de leur carte de membre ? C’est plus que probable. Mais quid de leur nationalité ? C’est évident, cette appartenance-là n’est pas mise en doute par l’AFP, dont bien des pigistes prennent leurs rêves pour des réalités et appliquent le même traitement à l’information qu’à leurs vœux pieux, voire impies. Le rêve de ces militants, c’est qu’Israël soit remplacé par un état islamiste, d’où leur propension à accuser l’État juif de tous les méfaits possibles et imaginables. En l’occurrence, bien que le Shin Bet affirme avoir arrêté des militants du Hamas, le signataire de cette dépêche était si occupé à mettre en doute sa parole, qu’il a oublié la réalité : nul État palestinien n’ayant jamais existé où que ce soit sur la planète, la nationalité correspondante ne peut être attribuée que virtuellement. Pourtant, il a repris cette partie de l’information sans guillemets et sans conditionnel.

On se détend avec un cours d’histoire ?

Il était une fois le Royaume d’Israël, où régnèrent successivement, de 1051 à 922 avant l’ère actuelle, Saül, puis David, puis son fils Salomon. À la mort de ce dernier, le royaume se scinda en deux : le Royaume d’Israël, rassemblait dix tribus au nord, capitale Sichem, puis Thersa, puis Samarie (921 à 721 av. notre ère) et le Royaume de Juda au sud, s’était créé autour des tribus de Juda et de Benyamin, capitale : Jérusalem (921 à 587 av. l’ère actuelle).

En 587 avant notre ère, le roi assyrien Nabuchodonosor conquit Jérusalem, détruisit le temple et ramena avec lui à Babylone toute l’élite religieuse, politique et économique juive, ne laissant sur place que les familles les plus pauvres, afin qu’elles cultivent la terre.

Cinquante ans plus tard (- 538), l’empereur Cyrus de Perse (aujourd’hui Iran) conquit Babylone. Cyrus libéra les Juifs et les autorisa à rentrer chez eux et à y reconstruire leur temple à Jérusalem. Quelques milliers d’entre eux restèrent à Babylone, mais les autres retournèrent à Sion et reconstruisirent le temple, qui fut consacré en – 516, puis agrandi sous Hérode le Grand, à partir de l’an – 20, pour être finalement détruit Titus envoyé de Vespasien, en 70 de notre ère.

À la victoire romaine, de nombreux Juifs furent réduits en esclavage et déportés à Rome. Israël devint une province romaine, à laquelle les vainqueurs attribuèrent un nom romanisé : Palestina, tiré de celui des ennemis héréditaires des Juifs, les Philistins.

C’est pas Byzance pour tout le monde

À l’empire romain succéda l’empire byzantin, puis l’empire ottoman (1299-1917), réduit, aujourd’hui à la Turquie. Les Turcs s’étant alliés avec les puissances de l’Axe lors de la Première Guerre Mondiale, leurs colonies moyen-orientales furent divisées entre les vainqueurs et c’est ainsi que la France se vit attribuer la Syrie et le Liban, alors que l’Angleterre prenait l’Irak et la Palestine, sur laquelle le nouvel occupant reçut mandat de préparer et de favoriser la création d’un foyer national juif.

On ne sait pas si les Grands-Bretons étaient mal comprenants. Ce qui est sûr, c’est qu’ils firent le contraire de ce qui leur avait été demandé : ils commencèrent par soustraire 80% de la Palestine mandataire, tout ce qui se trouvait à l’est du Jourdain, pour en faire cadeau, sous le nom d’émirat de Transjordanie, qui deviendrait le royaume de Jordanie en 1946, à un roitelet arabe. Cela montre que les Anglais, quand ils y voient leur intérêt, sont capables de tenir leur parole. En effet, ils avaient promis à Abdallah un émirat, en échange de son engagement à leurs, côtés lors de la guerre contre les Allemands (oui, l’épisode Lawrence d’Arabie, bravo, 10/10). Ensuite, ils encouragèrent l’immigration arabe au détriment de celle des Juifs dans les 20% restants du territoire destiné au foyer national juif.

À l’heure de la récré-éh, on révise !

Juste pour ne pas sauter du coq à l’âne et des Britanniques aux terroristes financés par l’Union européenne, petit rappel de ce qui eût dû être et de ce qui fut, entraînant ce qui est (non, ce n’était pas pour vous faire réviser les conjugaisons, quoique…)

L’ancêtre de l’ONU, la SDN, avait prévu une partition de la Palestine mandataire entre un État juif et un État arabe, se gardant Jérusalem comme pot-de-vin pour son intervention.

Plutôt que de s’opposer à l’empire britannique encore puissant, son successeur onusien continua le projet de Foyer national juif sur les 27000 km2 restant à sa disposition. Les Juifs acceptèrent le tout petit gruyère qu’on leur offrait, mais les Arabes ouvrirent un large bec pour crier leur refus et laissèrent tomber le fromage. Cette leçon leur valut une défaite à la guerre qu’ils entreprirent, à cinq (Égypte, Jordanie, Irak, Syrie, Liban) contre l’État juif, le jour de sa déclaration d’indépendance, le 14 mai 1948.

Résumé à apprendre par cœur

  • Les Juifs ne possèdent ni cornes ni queue en tire-bouchon.
  • Il n’a jamais existé d’État indépendant nommé Palestine sur la surface terrestre.
  • Si Israël + les deux dictatures palestiniennes mesurent aujourd’hui 27.000km2, c’est parce que les Britanniques ont soustrait 89.350 km2 au territoire qu’on leur avait confié pour créer le Foyer national juif, sur lesquels ils fabriquèrent, à la place, la Transjordanie.
  • S’il n’existe pas d’État arabe palestinien aujourd’hui, c’est parce que les Arabes ont refusé tous les États qu’on leur proposait depuis 1947. (1947, 1967, 1973, 2000, 2001, 2008…)
  • Il existe deux États peuplés exclusivement de Palestiniens arabes : la Jordanie et Gaza, dont les Israéliens se sont retirés unilatéralement en 2005, ce qui a permis au Hamas d’y prendre le pouvoir par un coup d’État et de transformer cette bande côtière en base de lancements de missiles contre leur voisin juif.
  • Depuis l’élection pour 4 ans, en 2005, de Mahmoud Abbas, aucune élection n’a été organisée en Cisjordanie. Les opposants au Fatah’ (le mouvement du président) sont morts ou en prison.

Dissertation

Discutez la phrase suivante : « Si les Arabes déposaient les armes, la paix serait signée le lendemain. Si Israël déposait les armes, sa population serait exterminée le lendemain. »

Aidez-vous des documents suivants : déclaration d’indépendance d’Israël (14 mai 1948), Charte du Hamas (18 août 1988), grille de salaire des moudjahidine et des shahids ayant tué des civils juifs (Budget de l’Autorité palestinienne chaque année), Résolution 181 de l’Assemblée Générale de l’ONU sur le partage de la Palestine mandataire, Résolution 242 du Conseil de Sécurité de l’ONU du 22 novembre 1967, Résolution des Trois NON de Khartoum de la Ligue Arabe, du 1er septembre 1967.

Justifiez votre conclusion en transposant les événements à notre pays, avec la France dans le rôle d’Israël et dans celui du Hamas et de l’Autorité palestinienne, un Daesh dont les membres seraient en nombre équivalent à la population française.

De l’importance de la ponctuation

Deux phrases exactement identiques signifient le contraire l’une de l’autre. Dans Le maître dit : « cet élève est un âne. », le maître juge l’élève sans indulgence.

« Le maître », dit l’élève, « est un âne ». Là c’est le contraire, un élève exigeant trouve le maître incompétent.

Le Figaro-avec-AFP rédige ainsi une phrase de son article :

Arrêtés en mars, les trois hommes « voulaient commettre des attentats à la bombe contre des cibles militaires et civiles » israéliennes à Jérusalem et en Cisjordanie, territoire palestinien occupé depuis 1967 par Israël, a indiqué le Shin Beth dans un communiqué.

Suivant la ponctuation et les codes d’impression français, cette phrase commence par situer « qui » : les trois hommes arrêtés en mars. La suite, entre guillemets et en italiques, est une citation choisie par le Figaro-avec-AFP dans ce que dit Israël, ou plus précisément sa DGSI, le Shin Bet en version originale.

Il faut lire le texte avec une vigilance particulière pour se rendre compte que la citation du Shin Bet, s’arrête en réalité au mot « civiles » et que ce qui suit, à savoir « Cisjordanie, territoire palestinien occupé depuis 1967 par Israël », est de la plume-avec-préjugé du Figaro-avec-AFP, que notre petit doigt nous suggère d’écrire « de l’AFP-via-le-Figaro », vu l’antisionisme consubstantiel de notre Pravda nationale.

En effet, en 1967, la Cisjordanie faisait partie intégrante de la Jordanie, qui l’avait annexée en 1950 et qui y appliquait des lois racistes interdisant aux Juifs l’accès à leurs lieux saints. Si le Shin Bet avait jugé utile de préciser ce qu’étaient la Judée et la Samarie (leur nom depuis plus de deux millénaires), il aurait écrit « territoire jordanien occupé depuis 1967 par Israël » et il aurait même pu préciser « faisant auparavant partie du territoire destiné à devenir un foyer national juif, confié par la SDN à la Grande-Bretagne, qui l’avait subtilisé pour l’offrir à l’émir Abdallah en 1923. »

Piqure de rappel du vaccin antisioniste

L’article du Fig-avec-AFP se termine par ce que l’on appelle, en journalisme, un éclairage, c’est-à-dire une phrase qui remet la situation particulière traitée dans l’article en perspective par rapport à un environnement plus large. Lorsqu’on dit « aujourd’hui, 720 personnes sont décédées du virus en France », c’est l’éclairage qui nous permet de situer ce chiffre dans les conséquences de la maladie : « ce qui porte à 20.000 le nombre de victimes depuis le début de la pandémie. »

Après l’arrestation de trois Palestiniens, dont le Shin Bet « dit » qu’ils préparaient des attentats, arrive un éclairage au sujet de la situation palestinienne : « Le Hamas contrôle la bande de Gaza mais la Cisjordanie est gouvernée par l’Autorité palestinienne, organisation dominée par le Fatah, rival du Hamas. Israël et le Hamas se sont livré trois guerres depuis 2008. »

Mais que vient faire ce « mais » ? On comprendrait cette conjonction de coordination dans une construction du type « Le Hamas contrôle la bande de Gaza mais pas la Cisjordanie. » En revanche, ce que cette phraséologie suggère, c’est que le Hamas n’est pas tendre et, probablement les lecteurs savent-ils déjà que c’est une organisation terroriste. Toutefois, s’il y a une chance qu’un étourdi l’ignore, ce n’est pas l’AFP qui lui mettra les points sur les « i », en lui expliquant que le mouvement islamiste met son poing dans la gueule de tous ses contradicteurs. MAIS la Cisjordanie, elle, n’est pas contrôlée : elle est gouvernée, sous-entendu par un président démocratiquement élu. L’éclairage prévu par le journadandisme version AFP est trop faible pour qu’on ait vu ledit président souffler démocratiquement la 15ème bougie de son mandat de quatre ans, le 9 janvier dernier.

De plus, dans la phrase « Israël et le Hamas se sont livré trois guerres depuis 2008 », on est bien en peine de savoir s’il y a un agresseur et un agressé ou si les deux parties se sont spontanément jetées l’une sur l’autre. Des milliers de missiles, lancés jour après jour sur les civils israéliens, il n’est nulle part fait mention, dans cette formulation qui renvoie les adversaires dos à dos, quand ils sont face à face.

Si un jour, les écoles de journalisme françaises se mettent à l’objectivité, il faudra pas mal de volontaires pour enseigner le décryptage des dépêches AFP ! LM♦

Liliane MessikaMABATIM.INFO

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