Rabbi Méïr – Le Maharam de Rothenburg (1220 – 19 Iyar 1293)

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Le Maharam de Rothenburg, plus connu que d’autres maîtres de la même époque par son histoire dramatique, est l’une des personnalités charnières ayant vécu en pleine période des Richonim d’Europe occidentale, les Tossafistes.

Le Maharam de Rothenburg était le disciple de rabbi Yehouda haKohen (Levantin), de rabbi Ye’hiel de Paris et rabbi Chemouel de Falaise (car le Maharam avait rejoint les Yechivoth françaises, et fut même témoin en 1242 de l’autodafé du Talmud à Paris ordonné par Louis IX), de rabbi Yits’haq, auteur du Or zaroua’, et de rav Avigdor Kohen.
Il avait pour élèves rabbi Chimchon ben Tsadoq, auteur du Tachbetz, le Roch, le Mordekhaï, rabbi Méïr haKohen de Rothenburg, l’auteur des Hagaoth Maimoniyoth, rav Dan Achkenazi et d’autres encore.
Le Maharam est né vers 1220 à Worms en Allemagne, ville dont son père était le rav, mais son nom est ensuite attaché à la ville de Rothenburg en Bavière, située au sud de Würzburg, puisqu’il en est devenu lui-même le rav et y tenait une Yechiva.
Il était alors considéré comme l’une des plus importantes personnalités rabbiniques de ce pays.
Il était déjà âgé quand la situation des Juifs en Allemagne, considérés comme étant des serviteurs du Trésor public, se dégrada. Le nouvel empereur, Rodolphe Ier de Habsbourg, élu en 1273, adopta en effet une politique de harcèlement contre les Juifs. Il leur était cependant interdit de quitter le territoire – ce que firent pourtant certains d’entre eux, dont le Roch et sa famille. Il semble bien que le Maharam fut même impliqué dans l’organisation de la fuite de nombreux Juifs, et lui-même avait déjà réussi à quitter le pays en direction d’Erets Israël en 1286, quand, au passage des Alpes, il fut fait captif à la suite de la dénonciation d’un Juif renégat. Il fut alors jeté en prison, dans la tour de la ville alsacienne d’Ensisheim. Une énorme rançon fut demandée pour accorder sa libération, mais le Maharam refusa qu’on la paie, craignant qu’à l’avenir, le pouvoir ne saisisse d’autres Grands du peuple juif, pour obtenir les mêmes gains. C’est l’enseignement d’une Michna dans Guittin (4,6 – cf. Yam chel Chelomo ad loc.) qui se fait l’écho de cette conduite du Maharam. Et ce, même si son absence priva le public tout entier de ses enseignements.
Au début, le Maharam fut dépossédé de tout moyen d’étude, mais une personnalité politique eut pitié de lui, et obtint les autorisations nécessaires pour que plusieurs disciples puissent venir l’assister durant ses années d’incarcération. Une légende rapporte qu’il souffrait aussi du manque de Séfer Tora, mais qu’il reçut de manière miraculeuse un ouvrage lui permettant d’en écrire un nouveau. Ce dernier aurait été déposé plus tard à la Altneue Schul de Prague.
L’un de ses disciples, rav Chimchon bar Tsadoq, rapporte les enseignements qu’il a reçus alors du Maharam – lequel se plaint de n’avoir sous la main aucun écrit des Ba’alé haTossafoth, et demande donc de ne pas tenir compte de son avis s’il va à leur encontre…
Au bout de 7 années, le Maharam décéda dans sa prison, mais les autorités civiles refusèrent de rendre son corps ! Ce n’est que sept années plus tard qu’un Juif du nom de Alexander Wifman vendit une partie de ses biens pour récupérer ses restes funéraires et le fit enterrer dans le cimetière de Worms – lui-même mérita d’être inhumé à ses côtés.
L’essentiel de l’œuvre du Maharam nous est surtout transmis par ses disciples, mais l’on possède un commentaire sur Yoma, et sur quelques traités de Taharoth, signé par lui, ainsi que des responsa qui lui sont propres (on en trouve d’autres dans les écrits de divers élèves).
Une de ses réponses concerne le fait de frapper sa femme : « En ce qui concerne une personne qui frappe sa femme, j’ai reçu [de mes Maîtres] qu’il faut être plus sévère que dans le cas de coups donnés à un homme… C’est une conduite qui n’est pas digne de notre peuple, et celui qui agirait ainsi doit être excommunié et mis au ban de la société… » (responsa 81).

D’un autre côté, il a instauré qu’une femme ne pouvait pas être sandaq (prendre l’enfant sur les genoux pour la circoncision), ce qui, visiblement, était pratiqué auparavant.

On lui doit divers textes poétiques, dont l’un, assez connu, sur le brûlement du Talmud à Paris de 1242.■

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