Des signaux d’alarme se sont allumés à Boston

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À la suite du rapport accablant publié par l’université Harvard sur l’antisémitisme en son sein, l’État d’Israël doit s’impliquer dans la lutte contre ce fléau, notamment dans les domaines où il possède un avantage comparatif.

Ynet – Yedidia Stern

La semaine dernière, Harvard a publié un rapport de 300 pages rédigé par un groupe de travail interne sur l’antisémitisme et les biais anti-israéliens dans l’institution. Il s’agit d’un véritable acte d’accusation glaçant contre ce qui se passe dans l’université la plus prestigieuse du monde. Il convient de souligner que ce document émane de Harvard elle-même, et non de l’administration Trump ni d’une organisation juive.

Harvard forme l’élite dirigeante de demain aux États-Unis. L’ombre inquiétante qui plane sur elle est donc grave en soi. Mais ce rapport ne parle pas que de Harvard : il suggère de manière troublante que l’antisémitisme moderne pourrait devenir la norme, même aux États-Unis.

J’ai étudié à Harvard dans les années 1980 pour mes masters et doctorat. Jamais je ne m’y suis senti mal à l’aise en tant que Juif ou Israélien. Malgré ma kippa, je n’ai jamais été victime de discrimination. On ne m’a jamais jugé pour mon identité ou mes opinions. Une soukka était érigée à un endroit central du campus, et tout le monde s’y pressait – Juifs comme non-Juifs. Pour les fêtes de Tichri, la synagogue était trop petite, et les prières étaient organisées dans des amphithéâtres universitaires – voire dans l’église locale. Le jour de Roch Hachana, il n’y avait pas cours à la faculté de droit. En tant que Juif, je me sentais « chez moi » à Harvard.

Or, selon le rapport, depuis les années 2000, un climat d’hostilité s’est installé contre les Israéliens, les Juifs, et toute personne exprimant une sympathie pour Israël (même non-juive). Harvard a changé de visage bien avant l’attaque du Hamas. Par une stratégie patiente, planifiée et sophistiquée, nos ennemis ont réussi à opérer une transformation idéologique dans le cœur symbolique de l’Occident. Ils ont récolté les fruits quelques jours après le 7 octobre, lorsque 33 associations étudiantes de Harvard ont déclaré qu’Israël était responsable de l’attaque du Hamas. Un monde à l’envers.

Un échec éducatif

Le rapport tend un miroir aux dirigeants de l’université, révélant un échec éducatif colossal. Les valeurs officielles de Harvard incluent le respect de la diversité, l’intégrité intellectuelle, le dialogue entre identités et la promotion d’un environnement pluraliste. Mais selon le rapport, l’université enseigne aujourd’hui des valeurs contraires : les étudiants ne savent pas affronter des récits contradictoires, sont incapables d’accepter la complexité historique et sont loin d’adopter une vision pluraliste de la réalité. À mes yeux – même si ce n’est pas formulé ainsi dans le rapport – des pans entiers d’une université qui prétend façonner la pensée libérale de l’Occident trahissent les valeurs libérales les plus fondamentales dès qu’il s’agit des Juifs et d’Israël.

Cette prise de contrôle idéologique du campus nuit gravement à la qualité intellectuelle de Harvard. Des enseignants, des cours entiers, des programmes diffusent des mensonges sous couvert académique : ils nient le lien historique entre les Juifs et la terre d’Israël, présentent Israël comme une colonie de peuplement européenne ayant dépossédé les autochtones, refusent de reconnaître l’existence de l’antisémitisme dans l’histoire de l’humanité et nient que les Juifs aient été un peuple persécuté. Les faits sont déformés dans les amphithéâtres de Harvard pour servir une idéologie anti-israélienne et antisémite.

Résultat : 73 % des étudiants juifs se sentent mal à l’aise d’exprimer leurs opinions politiques ; 60 % ressentent de la discrimination ou des sentiments négatifs sur le campus à cause de leurs idées ; 26 % se sentent même en insécurité physique.

Un sursaut nécessaire

Naturellement, le rapport insiste sur les aspects négatifs. Mais il y a aussi une autre Harvard. Le simple fait qu’un tel rapport ait été publié témoigne d’un certain courage et d’une clarté morale. Il exprime un véritable désir de correction.

La lutte contre l’antisémitisme est menée par des Juifs du monde entier, et par de nombreux défenseurs des droits qui ne sont pas juifs. Il faut maintenant réfléchir au rôle que doit assumer l’État d’Israël. Il ne doit pas forcément être à la tête de ce combat, mais il doit y prendre part, là où il possède un avantage comparatif. Il s’y est engagé dans la Loi fondamentale : Israël, État-nation du peuple juif. Il est temps d’honorer cette promesse.

Les signaux rouges clignotent à Boston (notre photo). Jérusalem, réveille-toi.

Le professeur Yedidia Stern est président de l’Institut pour les politiques du peuple juif (JPPI) et professeur émérite de droit à l’université Bar-Ilan.

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