« La guerre c’est la paix, la liberté c’est l’esclavage ! »

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Et si je puis mettre mes pas dans ceux d’Orwell (roman 1984), j’ajouterais la traitrise c’est la fidélité.

Trois faits récents m’ont conduit à cette filiation.

Le premier fait.

Le 25 février, Galei Tsahal (les ondes de Tsahal), une radio qui se positionne « à gauche », statut qui contredit le caractère apolitique de Tsahal, ce qui ne pose aucun problème à la Cour Suprême, donc Galei Tsahal interviewait un ex-général, qui depuis une année est revenu sur la scène politique, tel un chef d’orchestre, pour diriger une première fois le mouvement Kaplan contre la Réforme juridique, une seconde le mouvement des familles d’otages, et aujourd’hui un putsch contre le gouvernement légal : « Il faut que 30 000 citoyens se relaient, autour de la Knesset, dans des campements, pendant trois semaines, jour et nuit. Quand le pays sera à l’arrêt, Netanyahou sera bien obligé de se rendre compte que son temps est fini et que les Israéliens n’ont plus confiance en lui ».

Ainsi sans la moindre réplique de la Cour suprême, gardienne parait-il des « valeurs démocratiques », ce militaire défroqué qui fut un commando audacieux mais qui n’est jamais arrivé à s’imposer dans la vie politique, n’arrivant pas à tenir plus que 2 ans comme Premier ministre, ne cesse depuis plus d’une année d’inciter à l’insurrection, même si le fleuve Yarkon devait se tinter de rouge avait-t-il précisé, le peuple pouvant se rassurer, puisqu’en fin de compte, il serait prêt à offrir sa personne pour occuper la place rendue vacante par le pronunciamiento et diriger le nouveau gouvernement, comme il l’annonça il y a quelques mois.

Hormis ses relations d’affaires avec le financier pédophile Epstein, entre temps suicidé, ses voyages fréquents aux USA n’était-ce pas aussi pour se familiariser avec les méthodes inspirées du théoricien Gene Sharp qui ont conduit aux dites « Révolutions de couleur« [1], pilotées et financées par la CIA au travers notamment des Fondations américaines, NED, Freedom House, CANVAS, Soros, que l’on vit à l’œuvre en Yougoslavie, Géorgie, Kirghizie et Egypte du ‘’printemps arabe’’ ? Cela est bien connu à présent, et un film libre d’accès sur internet, le montre assez [2]. L’Ukraine étant le plus spectaculaire des exemples puisqu’en 2004 la rue mit à bas le gouvernement issu des élections, et puisqu’en 2014, le même chef de gouvernement réélu, Ianoukovytch, était à nouveau mis à bas par la rue, mais cette fois avec le pilotage de Joseph Biden, alors vice-président d’Obama, et de la diplomate américaine Victoria Nuland opérant sur place à Kiev et dictant les noms des ministres du futur gouvernement ! La conversation interceptée fut aussitôt rediffusée dans le monde entier. Mais l’ONU ne s’en offusqua jamais.

Que ce soit sous le prétexte de la Réforme judiciaire ou aujourd’hui du sort des otages, et de la guerre faite au hamas, ne voit-on pas que depuis plus d’une année, s’est constitué une sorte d’Axe entre les Démocrates américains, le New York Times, qui aux USA est l’équivalent du Monde, cad l’organe du Département d’État, et certains cercles politiques israéliens, qui, via le Haaretz, vont de Lapid à ce général que nous n’avions pas encore nommé, Ehud Barak ?

Pour en terminer avec ce dernier, trois questions. En appeler à prendre d’assaut la Knesset, ce symbole dont peut être fière Israël, au milieu d’un océan arabo-musulmane de dictatures, n’est-ce pas ce que l’on appelle en français un acte de subversion ? Compte tenu du silence de la Cour suprême, qu’attend la Knesset pour intenter une action en justice contre ce trublion ? Mais un tel appel à la subversion lancé alors qu’Israël est en guerre sur au moins trois fronts, Gaza, Judée-Samarie, et Liban, et que chaque jour depuis près de 5 mois, des soldats tombent au combat et que le Hezbollah téléguidé par l’Iran, semble vouloir prendre le relais d’un hamas mis à genoux, cela n’est-il pas une circonstance plus qu’aggravante ? Comment appeler celui qui vous plante son couteau dans le dos alors que vous êtes en train d’en découdre avec un ennemi ? Cette posture ne porte-t-elle pas un nom ? Et dans la sémantique orwellienne de l’inversion, ne pourrait-on pas dire d’Ehud Barak, qu’il est un vrai féal, un véritable parangon de loyalisme et de patriotisme ?

Le deuxième fait.

Proposant de livrer toute la Judée Samarie (zone C israélienne, y compris), et Jérusalem-Est (y compris la Vieille ville et le Mont du Temple), à un Mahmoud Abbas qui heureusement refusa, jugeant la concession insuffisante, ce Premier ministre de 2006 à 2009 fut condamné en 2014 à six ans de prison ferme et un million de shekels (210.000 euros) d’amende, pour avoir accepté des pots-de-vin dans le cadre d’un énorme scandale immobilier (« Holyland ») à Jérusalem alors qu’il en était le maire (1993-2003). Mais aussi pour faux-témoignage et tentative de ternir la réputation du témoin principal de l’accusation, donc pour avoir entravé le travail de la justice.

Il s’agit cette fois d’un autre Ehud, Olmert pour ne rien vous cacher. Avec une telle carte de visite, on aurait pu penser que le délictueux se consacrerait désormais, pour se faire oublier, aux joies de l’arrière grande paternité, jusqu’à la fin de son existence. Ce serait ainsi dans tous les pays du monde… sauf en Israël. Un Etat juif, ça redonne sa chance au fautif.

Et tout comme pour l’autre Ehud, il y a en Israël, une voie rapide rêvée pour se faire un nom en politique, ou y revenir : s’en prendre à la tête de turc qu’incarne Netanyahou tant sur la scène israélienne que mondiale. Pour paraphraser le défunt philosophe juif de France zal André Gluksman qui avait dit des Falestiniens, « leur chance c’est d’avoir les Juifs pour adversaires’ » on pourrait dire aussi à ces Ehud : « Votre chance, c’est d’avoir Netanyahou à qui vous attaquer ». C’est de lui dont vous tirez une légitimité. Sans lui vous ne seriez plus rien.

Mais nous nous égarons. Il ne me serait pas venu à l’idée de vous parler de lui, si je n’avais appris que, ces derniers jours, il avait donné une interview sur une chaine émiratie, où il informait « qu’Israël est incapable de détruire la capacité atomique de l’Iran… » Bravo Ehud ! La bonne nouvelle a rapidement déferlé dans le monde arabo-musulman. Bonbons et chants de victoire. Les seuls à se méfier, figurez-vous, ce sont les principaux intéressés qui formés par 14 siècles de dissimulation chiite (au sein d’un monde musulman dominé par le sunnisme) se sont demandés si ce hoax ne visait pas à affaiblir leur vigilance…

Mais au fait qu’est-ce qui vous autorise à tenir un tel propos ? Seriez-vous encore, malgré les infamies dont vous fûtes le récipiendaire, dans le secret des dieux ? De quels dieux, d’ailleurs ? Ceux qui ont aveuglé nos services de renseignements le 7 octobre ? Et si, comme je l’espère, ce ne serait pas le cas, votre intempestive sortie ne ferait-elle partie que d’une guerre psychologique, mais une guerre où vous auriez choisi votre camp, celui de notre ennemi ?

N’empêche, l’état-major et les soldats qui se battent au sud et au nord contre les proxy de l’Iran – se battent et MEURENT Monsieur Olmert – ont dû apprécier.

Et puisque si nous ne le faisions, nous ajouterions au malheur du monde, comme disait mon compatriote Albert Camus, comment donc nommer ce genre de spécimen ? En 2014, le juge David Rosen qui avait, comme on l’a vu, lourdement condamné notre Ehud, avait tenu à commenter sa décision : « Il avait le poste le plus central et le plus important, et il a fini condamné pour les crimes les plus méprisablesUn responsable public qui accepte des pots-de-vin est comparable à un traître »[3].

« Traitre » diantre ? Je n’aurais pas osé. Pour moins que çà on se fait censurer. Moi, comme Orwell, j’aurais dit : Féal, Loyal et même Patriote.

Le troisième fait.

Nous venons d’apprendre que depuis quelques semaines, des députés dits « de droite’ » par certains, voire « d’extrême-droite » par d’autres, ont été menacés par des lettres anonymes, et pas qu’eux, leurs proches également. Leur but ? « Faire tomber le gouvernement ». Tiens, ça devient une obsession ! Ils n’ont certes pas exigé « Akhchav ! » (Maintenant), mais quelle coïncidence. Leur modus operandi ? Les députés en question doivent transformer le fantasme en réalité. Sinon ? Sinon, ils n’hésiteront pas « à s’en prendre à leur vie et même à celles de leurs proches : enfants, petits-enfants, frères, sœurs, parents, oncles, tantes… ».

Les lettres ont été déposées dans les boites aux lettres des destinataires. Exemple ? La belle-sœur du député Moshé Saada en a reçu une alors que son mari est en train de se battre à Gaza.

Les auteurs ? Ils signent « Vengeurs israéliens« [4] et se disent inspirés par Abba Kovner, grand chef partisan dès 1942, et qui après la Shoah tenta d’anéantir les prisonniers nazis avec un mouvement appelé ”Les Vengeurs juifs”.

Au-delà du mutisme de la presse mainstream qui aurait sans doute été plus diserte si les destinataires concernés avaient été les familles de députés « ’de gauche », ou du laxisme d’une police qui ne semble pas trop pressée de mettre la main sur ces malades, les caméras d’immeuble ne sont quand même pas faites pour les chiens, le phénomène ne devrait-il pas alerter ? Car quels qu’ils soient, psychopathes, éphémèrement ou profondément dérangés, voire tout simplement fumistes, comment ne pas y voir cependant le symptôme d’un dérangement généralisé de la société israélienne, elle-même ?

Nazifier ses adversaires politiques n’est malheureusement pas qu’un procédé tiré de la vaste panoplie antisémite contemporaine, utilisé notamment par les chefs de l’Autorité falestinienne. Le virus s’est aussi emparé, et depuis longtemps, de la scène politique israélienne, phénomène justement déconstruit par le philosophe israélien Elhanan Yakira (Post-sionisme, post-Shoah), et dénoncé à plusieurs reprises par le Président Herzog lui-même. Ne vient-on pas de voir le frère d’un otage perturber les travaux d’une commission de la Knesseth, en s’affichant avec une étoile jaune sur la poitrine ?

Mais comme on vient de le voir avec les trois exemples examinés ci-dessus, la nazification n’est pas notre seul péché. Appeler à la violence comme levier politique, délégitimer la Knesseth comme représentation du peuple, désacraliser nos institutions, participer à la guerre psychologique, mais du côté de notre ennemi, appeler au putsch contre un gouvernement en train de faire la guerre sur 3 fronts et contre 4 adversaires, dont l’Iran est la tête de la pieuvre, tout cela n’est-il pas d’une extrême gravité ? Combien de temps encore nous obligera-t-on de subir ce type de discours qui a pour vocation de devenir acte ?

Rien n’est légitime sans des limites. Y compris la démocratie et la liberté.

Oui Monsieur Orwell, vous avez raison : La Guerre c’est la Paix, la Liberté c’est l’Esclavage ! Et puis-je ajouter… La Traîtrise c’est le Patriotisme !

Ehud Barak, Ehud Olmert, et quel Ehud vengeur encore, demain ?

Jean-Pierre Lledo

29 Février 2024

[1] https://www.revuepolitique.fr/est-il-encore-possible-de-penser/ (article de JP Lledo en 4 parties)

[2] Documentaire: https://www.youtube.com/watch?v=QATmyx92H3Q . Comment la CIA a préparé les révolutions colorées…

[3] https://www.lesechos.fr/2014/05/six-ans-de-prison-pour-lex-premier-ministre-israelien-ehud-olmert-302776

[4] https://lphinfo.com/des-deputes-de-la-coalition-et-leurs-proches-ont-recu-des-lettres-de-menace-sur-leur-vie/

2 Commentaires

  1. @Jean-Pierre. Lledo: On a besoin de toi dans l’espace politique d’Israel; viens donc t’inscrire a Otzma Yehudit et etre candidat au Knesset.

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