Intervention de Mme Laurence Boone, Secrétaire d’Etat chargée de l’Europe, au nom du gouvernement français

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Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Permettez-moi de débuter mon intervention par une évidence. La France est l’amie d’Israël. La France est indéfectiblement attachée à la sécurité d’Israël. Et c’est aussi ce lien indéfectible, cette amitié profonde, fondée sur un attachement à des valeurs communes, qui permet à la France d’entretenir un dialogue franc avec nos amis israéliens, et de dire les choses clairement.
1/ Dire les choses clairement, c’est d’abord bien les nommer. A cet égard, nous ne pouvons que rejeter l’utilisation du terme d’apartheid, largement excessif, largement déplacé.
Nous rejetons ce vocable, qui porte une charge lourde, attachée à des souffrances et des mémoires meurtries, dans des circonstances bien particulières. Le détournement des morts ne sert pas la cause de la paix. Il n’est nul besoin d’employer ce terme pour rappeler Israël à ses obligations internationales. Nous le faisons, comme nous rappelons notre rejet des actes terroristes dont les civils israéliens sont victimes. Notre seul objectif est que tous les civils, Israéliens et Palestiniens voient leur sécurité garantie. La rhétorique d’escalade n’y aide pas.
Je souhaite aussi rappeler ici les mots du président de la République : « il y a trop souvent, chez certains, derrière des affirmations antisionistes, un discours hostile au peuple juif, qui rappelle une période sombre de notre histoire. Nous devons combattre avec la plus grande fermeté ces formes latentes d’antisémitisme ».
2/ Venons-en maintenant à la question de la reconnaissance de la Palestine en tant en tant qu’Etat. Vous connaissez la position constante de la France. Nous soutenons la solution à deux Etats, qui est la seule solution qui permette aux peuples israélien et palestinien de vivre en paix côte à côte. Cette solution doit être obtenue par la négociation. Car il faut que l’Etat palestinien soit un Etat viable, contigu, souverain – un Etat qui soit un véritable Etat pour les Palestiniens, un Etat qui réponde à leurs aspirations.
C’est pourquoi la reconnaissance de l’Etat palestinien, pour être utile, ne peut intervenir qu’à la fin des négociations.
Il existe une voie pour y parvenir : la négociation directe entre les parties, dans le cadre du droit international et des paramètres internationalement agréés, et dans l’objectif d’établir deux Etats vivant dans la paix et la sécurité au sein de frontières sûres et reconnues.
Un règlement juste et durable du conflit israélo-palestinien est du reste essentiel pour garantir la sécurité et la stabilité de la région. En tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, la France sait la responsabilité qui est la sienne pour faire respecter et appliquer le droit international.
Les parties ont récemment pris des engagements concrets à Aqaba et Sharm el-Sheikh. Il faut encourager ce mouvement. Il faut continuer à œuvrer à la désescalade, et à œuvrer pour la paix.
Nous continuerons donc nos efforts, et la Ministre des affaires étrangères, Mme Catherine Colonna, se rendra à Berlin le 11 mai prochain, pour discuter de la question avec ses homologues allemande, égyptien et jordanien. Il s’agira de tracer des perspectives pour l’avenir immédiat
3/ Enfin, sur le sujet des appels à boycott.
La liberté d’expression doit toujours être conciliée avec le respect de l’ordre public. La liberté d’expression ne saurait impliquer la liberté d’inciter à la haine et à la discrimination.
Cette conciliation est réalisée par le juge. Dans le cas d’espèce, le juge européen des droits de l’Homme a défini un cadre clair : les appels à boycott sont autorisés uniquement dans la mesure où ils émanent d’un particulier, et ne comportent aucun propos haineux ou discriminatoire. Il ne fait pas de doute que tout appel à boycott qui se transformerait en appel à la discrimination, ou à la haine, sera pénalisé, par le même juge européen.
Dans ce contexte, la France s’est conformée à ses obligations, par la voie d’une circulaire du Ministère de la Justice en date du 20 octobre 2020, demandant aux Procureurs de n’engager des poursuites que dans le cas où l’appel au boycott s’accompagnerait, précisément, d’« appel à la haine ou à la discrimination ». Cela est pleinement conforme à l’arrêt Baldassi de la Cour européenne des Droits de l’Homme, et le Comité des ministres du Conseil de l’Europe l’a confirmé, en prononçant la clôture de l’exécution de l’arrêt Baldassi contre la France, le 13 avril dernier. La France est donc parfaitement dans la légalité.
Plus généralement, ce gouvernement est déterminé à concilier ces deux principes essentiels à la démocratie et à l’Etat de droit : lutte contre les discriminations et les discours de haine, notamment l’antisémitisme, d’une part ; et liberté d’expression d’autre part. Nous ne transigerons jamais sur la lutte contre l’antisémitisme. Et je m’étonne que certains bancs contestent cette politique du gouvernement.
En conclusion, mesdames et messieurs les Députés, le gouvernement, vous vous en doutez, ne peut qu’émettre un avis défavorable sur cette proposition de résolution.
Je vous remercie ./.

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