Un partisan de la liberté de mentir dans «L’Esprit public» sur France Culture

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Durant son intervention de 2 minutes, c’est bien à un festival de mensonges auquel ont eu droit les auditeurs de L’Esprit public, une émission qui se veut une « mise en perspective de l’actualité politique au cours d’un débat d’intellectuels engagés ». Sans la moindre contradiction de la part des trois autres invités censés débattre, ni de l’animatrice.

Le mensonge, « stratégie légitime dans le conflit politique »

C’est que l’intellectuel déniché par France Culture n’a aucun scrupule sur les arrangements avec la vérité, bien au contraire. Dans son dernier livre « Post-vérité. Pourquoi s’en réjouir », il revendique la liberté de mentir.

Dans Libération, Manuel Cervera-Marzal postule que « Le mensonge fait partie de la panoplie des moyens légitimes du politique. Or, qu’est-ce que la politique, sinon du conflit où le mensonge s’avère être une stratégie, non un impératif ? Comme le dit Machiavel, la politique est un affrontement entre les grands et les petits, les patriciens et les plébéiens, ceux qui veulent dominer et ceux qui veulent mettre fin à la domination. Comme Gramsci ou Arendt bien avant, je rappelle que le mensonge peut avoir, sous certaines conditions, des vertus émancipatrices»

France Culture est parfaitement au courant de la conception très élastique de Manuel Cervera-Marzal de la vérité, puisqu’il a aussi été invité à l’exposer dans une émission précédente. Il y expliquait voir la politique comme un rapport de force entre les dominants, qui mentiraient systématiquement, et les dominés : « … Mon livre ne s’adresse pas aux grands […]. Il s’adresse plutôt aux petits, pour leur rappeler qu’eux aussi ont le droit de recourir à la ruse, de recourir au bluff. […] [Le mensonge,] c’est une stratégie légitime dans le conflit politique. »

« John Kerry disait… »

Dans l’esprit du philosophe-sociologue, les Israéliens sont des « dominants » et les Palestiniens des « dominés », qu’il faut « émanciper ». Par conséquent, il applique sa stratégie sans se soucier de la réalité.

Il commence donc son intervention [vidéo – durée 2 mn] en reprenant le cliché fallacieux des « confettis de territoires palestiniens en Cisjordanie » (ainsi que l’a déjà expliqué InfoEquitable, c’est pourtant depuis les accords d’Oslo conclus d’entente entre les deux parties qu’il existe pour la toute première fois dans l’histoire des territoires sous administration palestinienne).

Puis il enchaîne en affirmant que les Palestiniens « vivent dans un régime d’apartheid » et assure que « c’est John Kerry lui-même qui le disait ».

Mensonge : John Kerry n’a jamais dit que les Palestiniens vivaient aujourd’hui dans un régime d’apartheid. En 2014, alors secrétaire d’Etat, il a dans une conversation privée émis l’opinion que « la création de deux Etats sera la seule solution réaliste. Parce qu’un Etat unitaire finirait par être soit un Etat d’apartheid avec des citoyens de seconde classe, soit un Etat qui détruira la capacité d’Israël d’être un Etat juif ». Autrement dit, une crainte pour l’avenir, pas un jugement sur la situation actuelle. Surtout, John Kerry était ensuite revenu sur ses propos : « Je ne crois pas, ni n’ai jamais déclaré publiquement ou dans le privé qu’Israël était un Etat d’apartheid ou qu’il avait l’intention de le devenir (…) si je pouvais rembobiner la bande, j’aurais choisi un autre mot ».

Des routes « réservées aux Juifs » ?

 

Manuel Cervera-Marzal raconte ensuite être allé sur le terrain (doit-on le croire ?) : « Qu’est-ce que j’ai vu de mes propres yeux ? J’ai vu des routes avec des panneaux marqués en anglais et en hébreu “cette route est réservée aux Juifs” ».

Soit les yeux de l’invité de France Culture lui ont joué des tours, soit il joue des tours à ses auditeurs.

Il existe bien des panneaux multilingues interdisant l’entrée de certaines personnes à des parties de la Cisjordanie / Judée-Samarie. Les voici :

« Cette route mène à la zone “A” dépendant de l’Autorité palestinienne. L’entrée est interdite aux citoyens israéliens, dangereuse pour vos vies et est contraire à la loi israélienne »

Dans certaines partie de la zone A, administrée par l’Autorité palestinienne, ce sont en effet les autorités israéliennes qui interdisent l’entrée aux citoyens israéliens… pour leur éviter de subir le sort de ces deux Israéliens entrés par erreur à Ramallah en 2000, qui furent sauvagement torturés et tués.

Notez bien que le panneau ne parle pas de Juifs, mais d’Israéliens. Juifs, Arabes ou autres, tous les citoyens sont protégés par la mesure qui est valable pour les ressortissants israéliens de toute origine. Elle est basée sur la citoyenneté, pas sur l’éthnicité comme voudraient le faire croire ceux qui veulent accoler une étiquette « raciste » à Israël.

Un panneau « route réservée aux Juifs », cela n’existe donc pas. Même si des médias comme Libération ou… France Culture laissent parfois entendre qu’il y aurait un régime de faveur pour ceux qu’ils appellent les « colons ».

En laissant calomnier ainsi non seulement les Israéliens mais en plus les Juifs sur les ondes, en faisant passer mensongèrement ces derniers pour des racistes, la radio publique ne fera pas baisser l’antisémitisme en France

D’autres mythes, sur Gaza

Et ce n’est pas tout. Gaza, nous dit encore Manuel Cervera-Marzal, souffre de « pénuries de médicaments et de pénuries d’eau organisées par l’Etat d’Israël qui contrôle toutes les entrées et les sorties du territoire ».

Fake news ! Israël ne contrôle pas toutes les entrée et sorties de Gaza qui a bien entendu une frontière avec l’Egypte qui contrôle le poste-frontière de Rafah.

Et précisément, Israël applique des restrictions sur les « matériaux à double usage », par exemple le béton qui peut avoir des usages civils mais aussi militaires (tels que la construction de tunnels pour attaquer Israël).

Les médicaments n’entrent normalement pas dans cette catégorie et entrent quotidiennement d’Israël à Gaza (7000 tonnes d’équipements médicaux exportés en 2017) – quand le Hamas ne les court-circuite pas pour servir ses intérêts politiques !

Quant à l’eau, voici une allégation qui n’est pas sans rappeler l’accusation d’empoisonnement des puits fréquemment portée contre les Juifs au moyen-âge pour attiser la haine contre eux et régulièrement réactualisée contre Israël. Il se trouve qu’Israël fournit à Gaza 10 millions de mètres cubes d’eau par an, malgré les agressions répétées perpétrées par le Hamas et le Jihad islamique contre la population israélienne, à coup de cerfs-volants incendiaires ou de roquettes…

Tout le plateau laisse dire

On aurait pu imaginer que l’un des trois autres intervenants réagisse après un tel tissu d’approximations (pour ne pas dire plus). Mais non. Pas plus de réaction du côté de l’animatrice, Emilie Aubry – pourtant forcément au fait de la géopolitique puisqu’elle anime également l’émission Les Dessous des cartes sur Arte – qui valide au contraire : « Merci pour ce rappel de ce qu’est aujourd’hui la situation intérieure »…

En invitant un théoricien du mensonge, France Culture savait sans doute à quoi s’en tenir. Mais était-ce le cas des auditeurs venus s’informer sur l’actualité et des contribuables qui financent les émissions de Radio France ?

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